SGT. Pepper's Lonely Hearts Club Band

par
The Beatles

The Beatles, et divers musiciens classiques
2017 – ADD – coffret quatre CDs plus un livre en anglais, Parlophone PCS 7027

Aux alentours du 1er juin dernier, les principaux medias ont fait écho aux cinquante ans du célèbre album des Beatles, Sgt Pepper’s Lonely Hearts Club Band. Le journal télévisé, l’émission « Transversales », divers magazines, les quotidiens nous ont tous rappelés que cet album « iconique » était généralement considéré comme étant le plus grand album de toute l’histoire de la musique rock. Pourquoi ? Voici quelques éléments de réponse :
L’enregistrement (en fait un véritable accouchement) a commencé en novembre 1966 pour se clôturer en avril 1967, une durée inédite à cette époque. L’album est sorti le 1er juin 1967, une année d’une très grande richesse : premiers albums de Pink Floyd, de Jimi Hendrix, des Doors parmi beaucoup d’autres. Avec cet album des Beatles, la musique dite « pop » est devenue un art à part entière, plus seulement un business. L’album est l’équivalent sonore du pop art d’Andy Warhol ou de Roy Lichtenstein.
Le contexte est l’année 1967. Les Beatles avaient donné leur dernier concert en août 66 et avaient décidé de se consacrer au travail en studio. « Créativité » a été le maitre mot : tout doit être différent, depuis le son des voix jusqu’à l’orchestre symphonique ; « non » et « pas faisable » sont des mots bannis ! Place à l’expérimentation tous azimuts. Voilà quelles étaient les consignes de départ. Une soif créative et un souffle nouveau régnaient dans toute la société. Il n’est pas inutile, même si c’est audacieux, de rappeler que c’est à cette époque qu’est né aux Etats-Unis le mouvement du renouveau charismatique.
Le studio d’enregistrement est donc devenu un véritable laboratoire dans lequel les innovations sonores de toutes sortes se sont succédées : bandes ralenties ou accélérées pour altérer le son des voix ou des instruments, collages divers, bandes passées à l’envers (ou bandes retournées), enregistrement directement dans la console…, des techniques habituelles dans la musique électro-acoustique d’alors (Stockhausen figure parmi les personnages en carton sur la pochette multicolore), mais inédites dans le cadre de la musique rock. Le plus étonnant est que cette musique très complexe a été enregistrée en seulement quatre pistes, ce qui paraît aujourd’hui un exploit. En réalité, il a fallu souvent pré-mixer des parties en les recopiant sur un deuxième, voire un troisième quatre pistes. Il faut garder à l’esprit que la vraie (et meilleure) version est l’album mono (ce sont les mixages originaux), un album introuvable depuis des décennies, mais qui vient d’être réédité. La version stéréo n’a jamais été satisfaisante. C’est pourquoi la nouvelle édition est un nouveau mix stéréo, une restauration qui rend enfin justice à cette fantastique musique.
En 1967, pour la première fois, les paroles sont imprimées sur le dos de la pochette. Celle-ci, double (inédit à cette époque), a été conçue par le célèbre peintre pop britannique Peter Blake.
Dans plusieurs chansons, les Beatles firent appel à des instruments classiques : quatre cors dans la chanson titulaire, le clavecin dans I’m Fixing a Hole, La harpe et les cordes dans She’s Leaving Home, trois clarinettes dans When I’m 64, saxophones et trombones dans Good Morning Good Morning et quatre orchestres symphoniques superposés dans A Day In The Life.
Pour ceux qui ne l’ont pas vécu, il est difficilement imaginable de se représenter l’impact de cet album à sa parution : on n’avait tout simplement jamais entendu quelque chose de pareil ! Plus qu’un simple disque pop, aussi bon fût-il, Sgt Pepper's a eu des répercussions sur toute la société d’alors, transcendant le seul domaine musical. Il est assez juste de dire que tout le monde, à commencer bien sûr par les musiciens, était comme assommé, littéralement abasourdi. Ce n’est plus jamais arrivé depuis. Le seul point de comparaison, mais dans un autre domaine, celui de la musique classique, est Le Sacre Du Printemps, le scandale en moins.
Bien sûr, un album d’une telle richesse sonore ne livre pas tous ses secrets lors des premières écoutes. A l’occasion de cet anniversaire, un nouveau mix a été réalisé par Giles Martin, le fils de George Martin, responsable de la production en 1967 et récemment décédé. Contrairement aux craintes fort répandues (remixer un tel album tient du sacrilège), ce nouveau mix est très réussi. L’édition nouvelle se décline en trois versions : le vinyle, un double CD (le nouveau mix et des versions documentaires de travail), et un coffret somptueux contenant un livre explicatif et quatre CDs dont la version mono originale !
Dominique Lawalrée

Son 10 Livret 10 Répertoire 10 Interprétation 10

Pour en savoir plus : The Beatles, un guide pour les écouter, par Dominique Lawalrée, édition Camion Blanc, 2014 ISBN 978-235779-497-9

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.