Succès du Béjart Ballet Lausanne

Chaque année, à la mi-décembre, le Béjart Ballet Lausanne propose un spectacle où alternent les créations de Gil Roman et les reprises des productions majeures de Maurice Béjart.‘Tombées de la dernière pluie’ a été d’abord proposé à l’Opéra de Lausanne en mars 2015 ; mais il prend sa véritable dimension sur le plateau plus vaste de Beaulieu. En s’appuyant sur l’Adagio du Quintette à cordes de Schubert alternant avec diverses séquences élaborées par l’Ensemble Citypercussion, Gil Roman conçoit un univers cauchemardesque où un homme (le magnifique Julien Favreau) se bat contre ses désirs et ses démons. Par la porte d’un frigidaire, il se glisse dans un dédale souterrain que nous restitue le montage vidéo. Il cherche une voie d’issue parmi dix créatures féminines, avant de se laisser aller à la dérive, tout comme le spectateur s’il ne tient pas en considération l’axiome de départ.
Le problème est identique avec ‘Le Mandarin merveilleux’ que Maurice Béjart avait chorégraphié en 1992. La partition violente de Bela Bartok fait surgir des bas-fonds glauques une prostituée, ses trois souteneurs, le mandarin chinois qui en est le client et même un Siegfried, victime blonde issue du film ‘M.le Maudit’ de Fritz Lang. Fleur vénéneuse, la Fille (Lawrence Rigg) mène le bal des truands d’où se détachent le Chef (Julien Favreau), le Mandarin (Masayoshi Onuki) et le jeune Siegfried (Connor Barlow).
Sur une note plus intimiste se profile ‘Liebe und Tod’ de Maurice Béjart. Recourant à deux lieder du ‘Des Knaben Wunderhorn’ de Gustav Mahler (Der Tambourg’sell et Wo die schönen Trompetten blasen), le premier solo met en lumière la dérision tragique du soudard campé par Oscar Chacon, rejoint en duo par Katherina Shalkyna, magnifique.
Remporte tous les suffrages ‘Piaf’, conçu par Maurice Béjart en 1988. Devant une gigantesque photo de la chanteuse, les hommes de la compagnie dansent sur ses chansons à la modernité effarante, en suscitant une émotion qui vous prend aux tripes.
Paul-André Demierre
Lausanne, Théâtre de Beaulieu, 19 décembre 2015
P.S. A noter la venue du Béjart Ballet et du Tokyo Ballet à Bruxelles du 20 au 22 mai 2016 pour ‘La IXe Symphonie’