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 La Gitane maudite galvanise Le Trouvère à l’Opéra National de Paris

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Cette reprise de l’un des plus populaire opéras de Verdi (1853), dans la mise en scène d’Alex Ollé (Fura dels Baus, 2016), présente trois atouts : la force d’une œuvre-quintessence du romantisme européen, des direction et distribution de haut vol, le tout plongé dans un bain de latinité aux antipodes des rigueurs puritaines.

L’orchestre, ici dégagé d’impératifs scéniques hasardeux, se déploie dans toute son envergure. A sa tête, Carlo Rizzi, familier de Pesaro, de l’italianità mais également du Grand Opéra -il a notamment dirigé la Juive de Fromenthal Halévy (1835) si présente dans le Trouvère. D’un geste aussi précis qu’élégant, teinté d’une légère sprezzatura, il obtient un équilibre, une tension dramatique sans failles.

 Arturo Toscanini réclamait les quatre meilleurs chanteurs du monde pour le Trouvère. Cette distribution n’en est pas loin. Le plateau ne s’économise ni en puissance (au risque de saturer le système de spatialisation acoustique) ni en expressivité ; jusqu’aux nuances du chœur d’hommes qui surprennent agréablement par leur velouté.

Quoique peu prodigue en demi-teintes, le ténor azerbaïdjanais, Yusif Eyvazov, balaye tout sur son passage, assumant les périls de la partition avec une témérité qui force l’admiration. Le poète-guerrier sait se révéler également touchant en rival-frère du Comte de Luna (Etienne Dupuis).

Ce dernier met sa vaillance, son élégance, son timbre clair et sonore au service d’un personnage dominateur et jaloux dont la folie le distingue et l’éloigne du cynisme d’un Scarpia.

La Dame de Pique  et Adriana Lecouvreur à La Scala de Milan

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Quel théâtre en Europe peut-il afficher, durant un week-end, Adriana Lecouvreur le samedi soir et La Dame de Pique  le dimanche en matinée ? C’est donc  la gageure que relève fréquemment la Scala de Milan. Indépendamment  des productions, il faut  en évoquer une constante, la qualité irréprochable de l’orchestre et du chœur.

Depuis l’après-guerre, Adriana Lecouvreur a été représentée trois fois entre septembre 1948 et juillet 1958 en confiant le rôle-titre à Mafalda Favero, Renata Tebaldi, Clara Petrella et Magda Olivero. Puis pendant trente ans, l’ouvrage a été laissé de côté. Et il a fallu attendre le 30 mai 1989 pour le voir réapparaître dans une nouvelle production de Lamberto Puggelli qui a eu pour interprètes majeures Mirella Freni et Daniela Dessì jusqu’à la fin avril 2007. Quinze ans plus tard, Dominique Meyer, l’actuel surintendant, présente la mise en scène de David McVicar qu’il a coproduit avec le Royal Opera House Covent Garden, le Liceu de Barcelone, la Staatsoper de Vienne, l’Opéra National de Paris et le San Francisco Opera ; et ce spectacle a déjà été  immortalisé  par un DVD réalisé lors des représentations londoniennes avec Angela Gheorghiu et Jonas Kaufmann. 

Il suffit de quelques lignes pour en remarquer l’intelligente conception dans un magnifique décor de Charles Edwards nous montrant l’envers du plateau de la Comédie-Française et la fourmilière des coulisses. Sa structure amovible servira ensuite de porte d’accès au Pavillon de la Grange-Batelière puis dominera la salle des fêtes du Palais Bouillon avant de revenir à sa position initiale, près de laquelle sera dressée une paillasse de fortune permettant à l’héroïne de s’isoler du monde extérieur. Sous d’habiles jeux de lumière conçus par Adam Silverman et repris par Marco Filibeck, les somptueux costumes de Brigitte Reiffenstuel jouent sur les brocards sombres de l’aristocratie contrastant avec les tenues pastel  d’Adriana et la bigarrure des vêtements de scène. Le côté nunuche du divertissement de l’acte III fait sourire par sa chorégraphie compassée (imaginée par Andrew George) qui passe totalement inaperçue. Et la régie de David McVicar déroule avec une rare lisibilité une intrigue enchevêtrée par les quiproquos et les faux-semblants. 

Une fois de plus, Jeanne de Lorraine revoit le film de sa vie dans le chef d'oeuvre d'Honegger et de Claudel !

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Arthur Honegger (1892-1955) : Jeanne d'Arc au bûcher. Claire de Sévigné, soprano ; Christine Goerke, soprano ; Judit Kutasi, mezzo-soprano ; Jean-Noël Briend, ténor ; Steven Humes, basse ; récitants : Judith Chemla ; Jean-Claude Drouot ; Christian Gonon ; Adrien Gamba-Gontard ; Rotterdam Symphony Chorus ; Netherlands Chrildren's Choir ; Royal Concertgebouw Orchestra Amsterdam, Stéphane Denève, direction. SACD-2018-79'16"-Livret en anglais, français, allemand et néerlandais-1SACD Royal Concertgebouw Orchestra -RCO 19001

À Genève, Un Ballo in Maschera pour une fin de règne

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Au Grand-Théâtre de Genève, l’un des grands chefs-d’œuvre de Verdi, Un Ballo in Maschera, achève la saison 2018-2019 qui a vu la réouverture de la salle de la Place de Neuve et qui sert aussi de point final aux dix années que Tobias Richter et son conseiller artistique Daniel Dollé ont passées à la tête de l’institution. De cette décade, l’on gardera en mémoire d’indéniables réussites telles que la Tétralogie (reprise pour la réouverture), Parsifal, Wozzeck, A Midsummer Night’s Dream, Il Giasone de Cavalli, L’Etoile, Le Médecin malgré lui, Cavalleria rusticana et I Pagliacci, sans oublier les versions de concert d’Ascanio, La Pucelle d’Orléans et les Szenen aus Goethes Faust.