Mots-clé : Nahuel di Pierro

A Pesaro, Le Comte Ory triomphe d’Otello 

par

Inauguré en août 1980, le Festival Rossini de Pesaro (ROF) présente, en ces jours-ci, sa 43e édition en ouvrant les feux avec Le Comte Ory, avant-dernière création lyrique du maestro et quatrième des ouvrages parisiens donnés à l’Académie Royale de Musique le 20 août 1828. A Pesaro, il n’a connu que quatre séries de représentations entre 1984 et 2009. Et la nouvelle production, présentée dans le vaste auditorium du Vitrifrigo Arena, est confiée à Hugo De Ana qui assume régie, décors et costumes. Plutôt que de nous immerger dans un Moyen-Age de carton-pâte, il a l’ingénieuse idée de nous entraîner dans le Jardin des Délices de Hieronymus Bosch en nous faisant passer par le Jardin d’Eden au début de chaque acte afin de faire miroiter en fond de scène le Lac avec la Fontaine de la Vie. De ce large triptyque se détacheront quelques éléments ‘en dur’ come l’Homme-arbre du Panneau de l’Enfer ou la tête de vieillard sortant d’une citrouille du volet central. Continuellement, le rire vous vient aux lèvres à la vue des dames de Formoutiers dont la coiffure fleurit sous forme de buisson ou du Comte Ory travesti en Moïse à barbe postiche qui se laisse guider par l’étoile-néon bleue d’un dancing pour affronter son page Isolier portant des tables de la loi phosphorescentes. Le salon gothique de l’acte II se métamorphose en terrain de sport où ces dames se livrent à l’aérobic avant de faire entrer les soi-disant pèlerines dans une cave qui tient d’une cuisine des anges en pagaille. Et c’est en trottinette électrique que la pseudo sœur Colette se rendra auprès de la vitrine de musée où un colibri tente de s’accoupler à un canard totalement avachi. Mais le célèbre trio « A la faveur de cette nuit obscure » réunissant Ory, la Comtesse et le page frise le ridicule avec les tentatives d’étreintes qu’entrave la grandeur des oiseaux empaillés. Mais qu’importe ! Le spectacle est continuellement émoustillant !

Et son dynamisme est amplifié par la baguette du chef vénézuélien Diego Matheuz qui dirige l’Orchestra Sinfonica Nazionale della RAI en faisant scintiller les pépites de l’orchestration géniale du dernier Rossini. Le Chœur du Teatro Ventidio Basso d’Ascoli Piceno s’adapte aisément à cette veine hilarante qui contamine aussi le plateau. 

Mozart : un Requiem crépitant. Et hors sujet ?

par

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791) : Requiem en ré mineur K. 626. Golda Schulz, soprano. Katrin Wundsam, mezzo-soprano. Martin Mitterrutzner, ténor. Nahuel di Pierro, basse. Andrea Secchi, chef de chœur. Stefano Montanari. Orchestre et chœur du Teatro Regio de Turin. Juillet 2020. Livret en italien et anglais ; pas de texte des paroles. TT 43’16. Dynamic CDS 7932

Ercole amante de Cavalli, une production éblouissante en DVD 

par

Francesco Cavalli (1602-1676) : Ercole amante, opéra en un prologue et cinq actes. Nahuel di Pierro (Hercule), Anna Bonitatibus (Junon), Giuseppina Bridelli (Déjanire), Francesca Aspromonte (Iole), Krystian Adam (Hyllus), Eugénie Lefebvre (Pasithea, Clercica, Troisième Grâce), Giulia Semenzato (Vénus, La Beauté), Luca Tittoto (Neptune, Eurytus), Ray Chenez (Le Page), Dominique Visse (Lichas), etc. Chœur et Orchestre Pygmalion, direction Raphaël Pichon. 2019. Notice en anglais et en français. Pas de texte du livret, mais synopsis en anglais et en français. Sous-titres en italien, en anglais, en français, en allemand, en japonais et en coréen. 187.00. Deux DVD Naxos 2. 110679-80. Aussi disponible en Blu Ray.

A Genève, un Enlèvement au Sérail défiguré 

par

Sur un plateau tournant se dresse une gigantesque cage à bois ajouré, flanquée d’une tour ; jeunes et vieux ne cessent de courir sans raison apparente, tandis que Fabio Biondi et l’Orchestre de la Suisse Romande attaquent le Presto dans l’Ouverture de Die Entführung aus dem Serail ; mais sur la musique de l’Andante intervient un comédien débitant un propos incriminant l’isolement du visiteur étranger dans une ville (suivez mon regard…) où l’argent des banques fait la loi. Du fond du parterre, un spectateur excédé s’écrie : « Et Mozart ? ». Que lui dire puisque le metteur en scène Luk Perceval et son team (Philipp Bussmann pour la scénographie, Ilse Vandenbussche pour les costumes, Mark Van Denesse pour les lumières) ont jugé le livret de Johann Gottlieb Stephanie d’une alarmante insuffisance ?

Aussi tarabiscoté qu’il soit, un tel texte s’inscrit dans une époque déterminée que le spectateur d’aujourd’hui considère avec le recul nécessaire. Tout bibliophile, amateur de bandes dessinées d’autrefois, ne procède-t-il pas de manière identique avec un album comme Tintin au Congo qu’il feuillette avec plaisir sans trop se préoccuper des connotations racistes de l’intrigue ? Dans le cas présent, plutôt que de réécrire les dialogues, le régisseur recourt à un roman, Le Mandarin miraculeux, rédigé en 1996 par Asli Erdögan, première étudiante turque dans le domaine de la physique au CERN et farouche opposante au régime de son pays natal. Donc, sur scène, quatre des chanteurs sur cinq sont doublés par un acteur plus âgé qui parle de sa solitude et du passage de vie à trépas. Mais rapidement l’on bute sur un problème : chacun de ces monologues, parfois difficiles à comprendre tant les micros faciaux sont de mauvaise qualité, n’a aucun rapport avec l’ouvrage de Mozart dont a été conservé fallacieusement le titre. N’y a-t-il pas une imposture par rapport au produit que l’on a accommodé au goût du jour, en organisant force défilés de contestation avec drapeaux blancs, que côtoie un Osmin acteur en chaise roulante mais à la libido effervescente, propulsé dans les extrémités de scène par son double chantant ? Comment ne pas se sentir grugé lorsque la partition que l’on vous présente a été modifiée selon les exigences de la relecture avec, sur les vingt-et-un numéros existants, trois ‘Duetten’ qui passent à la poubelle et un Finale modifié qui incorpore ‘An die Hoffnung’, un lied pour voix de soprano K 390 et quelques séquences dansées extraites d’Ascanio in Alba ?

Magie de haut vol à la Cour du Roi Soleil, Ercole Amante (Hercule amoureux)

par

Vantardises d’Hercule suivi d’un chien-monstre verdâtre, éclosion de Vénus au milieu d’une fleur géante, facéties des pages, pleurs de Déjanire prolongés d’une interminable traîne, tout ce que l’on voit prête à rire. Vols planés, plongées sous terre, vagues de carton... dès le premier tableau du Prologue où seuls les visages dorés des choristes apparaissent dans les rayons du soleil, le public est pantois. Il le restera jusqu’au final où dieux, astres, roi Louis XIV et sa future épouse -pour lesquels l’œuvre avait été commandée à Cavalli par Mazarin- scintillent en une pyrotechnie formidablement réglée. L’ingéniosité règne, l’humour également, bon enfant, loin de la parodie ou de la dérision. D’autant plus efficace qu’un plateau agile, familier du style baroque, dirigé de main de maître par les metteurs en scène Valérie Lesort et Christian Hecq, s’approprie ce ton léger, ces blagues juvéniles, sans jamais négliger de servir la musique.

A Pesaro, le génie de Rossini est l’atout majeur

par

En ce mois d’août 2019, le Rossini Opera Festival (ROF) présente sa 40 édition, car les deux premiers spectacles, La Gazza ladra et L’Inganno felice, ont été affichés à partir du 28 août 1980. Pour ma part, j’ai eu la chance de prendre part à vingt-cinq saisons consécutives ; s’il fallait tirer un bilan, je dois constater que le niveau musical et vocal s’est considérablement amélioré grâce à l’apport constant des jeunes artistes formés à l’Accademia Rossiniana, alors que les mises en scène partent dangereusement à la dérive, comme partout !

Le cru 2019 n’échappe pas à la règle, preuve en est donnée par la nouvelle production de Semiramide confiée à Graham Vick. Depuis août 2003, donc depuis seize ans, l’ouvrage n’a pas été repris par le festival. Au cours de la dernière décennie, le metteur en scène britannique y a donné des lectures décapantes de Mosè in Egitto et de Guillaume Tell qui ont divisé le public et la critique. Dans des décors et costumes de Stuart Nunn et des éclairages de Giuseppe Di Iorio, cette Semiramide provoque nombre de réactions négatives.

Une perle napolitaine à découvrir

par

Gioachino ROSSINI
(1792 - 1868)
Ricciardo e Zoraide
Randall Bills (Agorante), Alessandra Marianelli (Zoraide), Maxim Mironov (Ricciardo), Nahuel Di Pierro (Ircano), Silvia Beltrami (Zomira), Artavaszd Sargsyan (Ernesto), solistes, Camerata Bach Choir, Poznan, Virtuosi Brunensis, dir.: José Miguel PEREZ-SIERRA
3 CD Live-2018-70' 40'', 30' 31'' et 64' 30''-Textes de présentation en anglais et en allemand-chanté en italien-livret non inclus- Naxos 8.660419-21

Sur les ailes de la danse

par

Jean-Philippe RAMEAU
(1683 - 1764)
DARDANUS, version 1739
Karina GAUVIN, Vénus, Gaëlle ARQUEZ, Iphise, Reinoud van MECHELEN, Dardanus, Florian SEMPEY, Anténor, Nahuel di PIERRO, Tencer, Isménor, Katherine WATSON, Amour, une Bergère, un Songe, Etienne BAZOLA, Un Berger, Virgile ANCELY, Guillaume GUTIERREZ, un Songe, ENSEMBLE PYGMALION, dir.: Raphaël PICHON. Mise en scène : Michel FAU. Décors : Emmanuel CHARLES. Costumes : David BELUGOU. Chorégraphie : Christopher WILLIAMS. Lumières : Joël FABING.
Opéra de Bordeaux, avril 2015
1 DVD NTSC + 1 BLU-RAY- 3h12'24- format 16/9- DTS 5.1- sous-titres allemand, anglais et français- chanté en français-HMD 9859051.52