« Ravel et l’Espagne » par Les Siècles : des couleurs et du théâtre
Ce concert risque malheureusement de rester dans les mémoires davantage comme étant le premier que François-Xavier Roth aura été contraint de renoncer à diriger, par suite de l’article « Un chef d'orchestre qui mène son monde à la braguette » paru le matin même dans Le Canard Enchaîné, que pour son contenu musical propre, pourtant réel.
Qui n’aurait pas su tout cela ne l’aurait sans doute pas soupçonné lors de ce concert. Les Siècles ont été fondés en 2003. Les musiciens, inévitablement bouleversés (ne serait-ce que parce que cela fragilise grandement leur avenir professionnel), étaient souriants, particulièrement avenants vis-à-vis d’Adrien Perruchon (qui malgré une brillante carrière ne fait pourtant pas toujours l’unanimité auprès des instrumentistes qu’il dirige). Sans doute lui étaient-ils reconnaissants d’avoir pu assurer ainsi, au pied levé, la direction de ce concert, sans en changer le programme, et surtout en donnant une impression d’aisance remarquable étant donné le contexte. Et, en effet, il faut saluer cette performance.
Ravel et L'Espagne, donc. L’idée est on ne peut plus pertinente, quand on sait à quel point ce pays a influencé le compositeur. À vrai dire, il faudrait plutôt parler de l’idée qu’il s’en faisait, à travers, notamment, les très nombreux musiciens espagnols qui venaient en France à cette époque. Car Ravel n’est allé en Espagne qu’à l’approche de la cinquantaine, bien après avoir écrit presque toutes les œuvres de ce concert (à l’exception du Bolero).
La première partie, purement instrumentale, commençait par Alborada del Gracioso. Les cordes, très présentes, donnent une sonorité un peu massive à la pièce. Malgré la plus extrême liberté laissé au basson dans ses solos, cette « Aubade du bouffon » a un peu de mal à décoller.