Claude Debussy (1862-1918) : La Mer. Robin Holloway (*1943) : Ten settings of Paul Verlaine for soprano and orchestra, arranged, linked scored with an Epilogue [d'après Debussy]. Vannina Santoni, soprano. Orchestre philharmonique de Radio France, direction: Mikko Franck. Septembre 2022. Livret en français, anglais, allemand ; paroles en français et leur traduction en anglais. TT 52’03. Alpha 981
Perdu en forêt lors d’une partie de chasse, il l’a découverte près d’un plan d’eau, hagarde, terrorisée. Elle a beaucoup souffert, lui dit-elle, et vient de jeter une couronne dans l’eau. Non, il ne doit surtout pas tenter de la récupérer. Elle s’appelle Mélisande. Lui, Golaud, la prend sous sa protection. Il l’épousera et finira par rentrer chez lui, là-bas, au château familial d’Allemonde où l’attendent sa mère Geneviève et son grand-père Arkel. Et surtout Pelléas, son demi-frère. La tragédie aura lieu.
Le livret de Maurice Maeterlinck, adapté de sa pièce de théâtre, conduit inexorablement les tristes héros à leur tragique destinée. Il est une merveille d’évocations, de signes annonciateurs, de phrases reprises, de suggestions, de métaphores, de silences significatifs. Il y a ce qu’on saisit immédiatement, il y a ce qu’on se rappelle. Symboliste tout simplement. « Nous ne voyons que l’envers des destinées ».
Claude Debussy a fait sien ce récit, il l’a inscrit dans une musique tout aussi évocatrice, qui s’ouvre à tant de sens quant aux êtres et à ce qu’ils vont (devoir) vivre. Une musique surtout à l’extraordinaire prosodie. Elle a fusionné avec les mots qu’elle accompagne, qu’elle magnifie, qu’elle multiplie. C’est sans doute l’une des plus belles rencontres entre un texte et une partition.
Pour la sélection de la semaine, on commence par le festival numérique de l’Opéra de Liège qui va proposer près de 15 spectacles et concerts en ligne d’ici fin juin.
Un titre de prestige est à l’affiche pour inaugurer cette série de diffusions numériques : La Traviata mise en espace par Gianni Santucci d’après la mise en scène de Stefano Mazzonis en 2009.
Sous la baguette de Speranza Scappucci, directrice musicale de la maison, et avec une belle distribution : Patrizia Ciofi, Dmitry Korchak et Giovanni Meoni. Ce spectacle est à voir jusqu’au 17 avril.
Dès ce jeudi 15 avril (et jusqu’au 24 avril), l’Opéra de Liège propose un concert lyrique, tel un voyage entre l’œuvre de Verdi et le vérisme, avec le chef Daniel Oren et la voix de la soprano Saioa Hernández.
La Traviata et ce concert sont visibles en ligne sur la plateforme de streaming de l’Opéra de Liège : https://streaming.operaliege.be/fr
A Lille, l’évènement musical résidait dans la nouvelle production du Pelléas et Mélisande de Claude Debussy dans une mise en scène et scénographie de Daniel Jeanneteau et sous la direction de François-Xavier Roth au pupitre de son orchestre Les Siècles. La distribution est superbe : Julien Behr, Vannina Santoni, Alexandre Duhamel, Maris-Ange Todorovitch.
https://www.youtube.com/watch?v=t5S4BJy2x5Y
Enfin à Hambourg, la scène de la prestigieuse Philharmonie de l'Elbe accueille son orchestre résident de la NDR pour une Symphonie n°9 de Schubert sous la direction de Herbert Blomstedt.
Après avoir ouvert leur nouvelle saison à la Seine Musicale, Insula orchestra et Laurence Equilbey ont fait leurs débuts au Festival de Laon. Et dans quel contexte ! Placée sous le signe de la locution italienne Da Capo, cette 32e édition du festival symbolise beaucoup plus qu’une reprise après l’interruption due à la crise sanitaire. Malgré les incertitudes, les problèmes logistiques et l’existence au jour le jour, le festival a gardé ses ambitions et sa haute qualité artistique. La preuve ? La venue à Laon des orchestres prestigieux comme Les Siècles, l’Orchestre Philharmonique de Radio France et bien sûr Insula orchestra. Le concert, réunissant trois compositeurs germaniques, a rendu un double hommage. . Bien évidemment (l’année 2020 oblige), la phalange orchestrale de Laurence Equilbey a honoré Beethoven pour son 250e anniversaire. Néanmoins, c’est aussi l’Italie qui a été célébrée en réunissant des œuvres parfois librement influencées par l’esprit et le style italien. Très opératique, le concert fut une occasion de réentendre la collaboration entre Insula Orchestra et Vannina Santoni, deux ans après leur version de la Nonne sanglante de Gounod à l’Opéra-Comique. Les ouvertures, celles des Noces de Figaro (Mozart) et de Coriolan (Beethoven), ont préparé le terrain de jeu pour la soprano. Comtesse convaincante dans les Noces de Figaro (Porgi, amor et Dove sono), Santoni a surtout brillé dans l’air Ah ! Perfido qui a donné l’exemple d’un Beethoven moins idéalisé et inventif car plié au service des codes de l’air à l’italienne. Si l’air de la Comtesse fut un beau mélange d’un accompagnement bien dosé de l’orchestre avec les phrases bien construites et préméditées de la chanteuse (malgré quelques fâcheux glissandi par la note inférieure), le ton dramatique de l’air de Beethoven lui a convenu parfaitement. Sa voix, puissante et presque menaçante, n’a pas sacrifié le caractère au détriment de la compréhension du texte.
Dans la nouvelle production de La Traviata au Théâtre des Champs-Elysées (du 28 novembre au 9 décembre), Deborah Warner invente un double : Violetta à l’hôpital, entourée d’une équipe médicale, et qui interagit avec la Violetta en ville. Pour sa prise de rôle, Vannina Santoni incarne la jeune femme infiniment touchante aux côtés de Saimir Pirgu (Alfredo) et Laurent Naouri (Germont) tout aussi inspirés.