Un chef d’exception

par

0126_JOKERGiuseppe SINOPOLI et la Staatskapelle de Dresde
Œuvres de Carl Maria von WEBER (1786-1826), Robert SCHUMANN (1810-1856), Franz LISZT (1811-1886), Richard WAGNER (1813-1883), Richard STRAUSS (1864-1949) et Giuseppe SINOPOLI (1946-2001)

Kai VOGLER (violon), Peter BRUNS (violoncelle), Staatskapelle de Dresde : dir. : Sylvain CAMBRELING, Peter RUZICKA et Giuseppe SINOPOLI
DDD–2016–70’ 36’’ et 71’ 40’’–Textes de présentation en allemand et anglais–Hänssler PHO 7053

Quinze ans après sa mort tragique (il est mort sur scène à Berlin, terrassé par une crise cardiaque, alors qu’il dirigeait Aïda), Giuseppe Sinopoli continue de faire des vagues, ses détracteurs le considérant comme le champion de l’esbroufe musicale, ses admirateurs le portant aux nues et le tenant pour un des chefs d’orchestre les plus remarquables de sa génération. Que l’on soit dans un camp ou dans l’autre, force est de constater que ses nombreux enregistrements (chez Deutsche Grammophon entre autres) intéressent toujours les mélomanes et que certains d’entre eux sont même devenus des références dites incontournables (par exemple le Stabat Mater d’Antonin Dvorak ou Ainsi parlait Zarathoustra de Richard Strauss).
On sait qu’au cours de sa fulgurante carrière internationale, Giuseppe Sinopoli s’est produit à la tête des meilleurs orchestres du monde et que, partout où il est passé, il a laissé son empreinte, tantôt dans le sens positif du terme, tantôt dans son sens péjoratif, des musiciens l’accusant de par trop les martyriser ou de leur proposer des lectures sidérantes de divers grands classiques du répertoire. Tout indique qu’il s’est fort bien entendu avec les membres de la vénérable et prestigieuse Staatskapelle de Dresde, dont les archives font, depuis plusieurs années, l’objet d’une belle collection de CD historiques dans laquelle on peut désormais trouver des live recordings de Giuseppe Sinopoli. Y figurent l’ouverture d’Oberon de Carl Maria von Weber, la Symphonie n° 4 de Robert Schumann, Orphée de Franz Liszt, l’ouverture des Rienzi de Richard Wagner, Une vie de héros de Richard Strauss et trois œuvres de Giuseppe Sinopoli lui-même, la plus importante étant le troisième volet de son cycle Tombeau d’Armor écrit pour violoncelle et orchestre et datant de 1977.
Joué par Peter Bruns et dirigé par Sylvain Cambreling, ce troisième volet de Tombeau d’Armor est inspiré d’un poème de Tristan Corbière et, par sa puissance expressive, constitue peut-être la partition la plus riche, la plus aboutie et la plus prenante de toutes celles que Giuseppe Sinopoli a composées (une trentaine de 1968 à 1981). C’est là, sans conteste, la pièce maîtresse de ce disque, au même titre que l’exécution d’Une vie de héros, incroyablement vivante et colorée, à la fois espiègle et turbulente, primesautière et lyrique, quintessence du génie orchestral de Richard Strauss, héros narcissique conscient de l’être, d’être déjà en 1898, l’année de la composition de l’œuvre, à l’âge de trente-quatre ans à peine, une personnalité marquante, essentielle, de l’histoire de la musique occidentale.
Jean-Baptiste Baronian

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