Venise en majesté

par
venezia

SAN MARCI DI VENEZIA
Oeuvres Giovanni BASSANO, Giovanni et Andrea GABRIELI et Claudio MERULO
Les Traversées Baroques, dir.: Etienne MEYER
2017-DDD-71'41-Textes de présentation en anglais, français et allemand-Accent ACC 24345

La Capella Musicale di San Marco bénéficiait, au tournant du 16ème siècle, de l'opulence économique de Venise, alors grande puissance à l'apogée de son âge d'or: son choeur, avec ses 36 chantres, était l'un des plus fournis et les plus fameux d'Italie, un ensemble auquel se joignaient à l'occasion des enfants. L'arrivée d'Adrien Willaert, en 1527, annonça un tournant décisif dans l'art musical de la Sérénissime en adoptant un langage résolument moderne et novateur. Véritable laboratoire de l'avant-garde, la cité permit à des esprits brillants, tels que Andrea et son neveu Giovanni Gabrieli, Claudio Merulo ou Giovanni Bassano, d'épanouir leur génie. C'est à cet univers en ébullition qu'Etienne Meyer et son ensemble Les Traversées baroques se proposent de nous convier dans un disque très bien imaginé, où tous ces noms se voient réunis. Difficile de tout décrire: chaque pièce mériterait qu'on s'y attarde longuement. Citons donc le Miserere de Giovanni Gabrieli, d'une densité et d'une audace harmonique qui illustrent à souhait le statut de l'institution dont il était l'un des illustres représentants. Ou encore son Vox Domini, d'une complexité contrapuntique saisissante. Ces pièces liturgiques sont agrémentées de quelques-unes de ces célèbres Canzon pour cuivres typiques de l'Art de Venise ou de pièces d'orgue remarquables telle une toccata d'Andrea. Même Palestrina, l'alpha de l'explosion artistique qui marque le remarquable 16ème siècle, est indirectement convié à la fête par l'inclusion au programme de deux pièces de sa composition, un Ave Maria et un Veni dilecte mi, revisitées par Giovanni Bassano. A l'écoute de ces pages, on ne peut que réaliser à quel point cette musique participait avec harmonie à l'élan artistique, au sens le plus large, de cette ville hors normes: comment, en effet, ne pas penser aux élaborations somptueuses des Titien, Véronèse, Tintoret, et de tant d'autres, contemporaines, dont plusieurs chefs-d'oeuvre ornent quelques-unes des plus belles églises de la ville. L'interprétation évite la surenchère d'effets et s'avère très efficace. Malgré la pléthore de programmes consacrés à cette période de l'aventure musicale, ce disque devrait « sortir du lot » par son climat, très véridique, qu'instille Meyer et ses complices. On regrettera seulement que le livret se limite à des considérations générales, d'ailleurs fort pertinentes, sur ce « grand siècle » italien et ne détaille pas davantage par le menu chacun de ces joyaux.
Bernard Postiau

Son 10 - Livret 5 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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