A Lausanne, reprise de la production de Pet Halmen pour Die Zauberflöte 

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En hommage au décorateur, costumier et metteur en scène Pet Halmen, disparu il y a trois ans, Eric Vigié, son élève, reprend sa production de Die Zauberflöte qui avait été conçue pour la Salle du Métropole à Lausanne au printemps 2010. Ô combien sur ce plateau trop grand elle avait donné  une impression de confusion avec, en toile de fond, cette Bibliothèque Anna-Amalia de Weimar détruite par un incendie en décembre 2004, et cet étudiant, les bras chargés de livres, attaqué en lever de rideau par le gang du ‘serpent’ (die Schlange).

Recadrée selon les dimensions du plateau de l’Opéra de Lausanne, la lecture d’aujourd’hui paraît beaucoup plus fluide, notamment dans le rite d’initiation où Sarastro et les prêtres portent perruque poudrée, masque et tablier maçonnique au sein de la Salle Rococo calcinée ou dans le finale où le même Sarastro trône comme Goethe en Italie selon la toile de Tischbein. A la tête du Chœur de l’Opéra de Lausanne, de la Maîtrise Horizons du Conservatoire et de l’Orchestre de Chambre de Lausanne, Diego Fasolis met sa pratique du répertoire baroque au service de Mozart en allégeant les textures et en dynamisant le propos. Seuls rescapés de la production originale, Benoît Capt confère une épaisseur des moyens au service d’un Papageno bon enfant toujours aussi touchant alors qu’il est métamorphosé en pingouin ; et Stuart Patterson, précédemment Monostatos, affiche maintenant la solidité du Premier Janissaire et du Deuxième Prêtre face à Jérémie Brocard (Deuxième Janissaire et Premier Prêtre). La jeune Catalina Bertucci laisse fleurir son soprano lyrique pour dessiner une Pamina émouvante dans sa fragilité, alors qu’elle est confrontée au Tamino du ténor américain Shawn Mathey, un peu raide dans sa sobriété. Anna Siminska laisse affleurer dans le timbre les inflexions méchantes et le suraigu étincelant  qui font d’elle une véritable Reine de la Nuit, tandis que Kenneth Kellogg aurait la profondeur d’un Sarastro si le coloris peu homogène n’était mis en péril par une élocution allemande non maitrisée. Céline Mellon prête à Papagena une drôlerie qu’elle partage avec le Monostatos retors d’André Gass. Et le trio des dames est adroitement constitué par Marion Grange, Inès Berlet et Marina Viotti.
Paul-André Demierre
Lausanne,  le 5  juin 2014

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