Bruckner par Paul Kletzki
Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°7 en mi majeur, WAB 107 (révision de 1885 édition Leopold Nowak 1954). Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Direction : Paul Kletzki. 1973. Livret en anglais et en japonais. 63’45’’. Janus Classic. JACL-5
Nous avions déjà parlé de la figure, bien trop oubliée, du compositeur et chef d’orchestre Paul Kletzki (1900-1973) à l’occasion d’une très belle parution dans le cadre de la collection des archives du festival de Lucerne par le label Audite. On est heureux de retrouver ici ce grand chef au pupitre du magistral Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks pour une captation munichoise de la Symphonie n°7 de Bruckner.
Le contexte de cette lecture est particulier car, captée le 25 janvier 1973, elle précède de quelques semaines le décès du musicien. Dès lors, difficile de ne pas ressentir une forme de tension prémonitoire dans cette lecture.
Sauf erreur de notre part, cette parution est la première à documenter Paul Kletzki dans une symphonie de Bruckner. Son Bruckner est plutôt rapide mais jamais précipité. Le chef porte une grande attention à la fluidité du discours et à la lisibilité de la texture instrumentale. Le ton est plutôt léger et l’ensemble sonne avec une plastique en apesanteur, portée par le niveau vertigineux d’un orchestre concentré et particulièrement appliqué. Le tour de force du Bruckner de Paul Kletzki est d’imposer une tension plus suggérée qu’affirmée ou martelée, et c’est la clarté de la baguette et la gestion des tempi qui composent la force de cette lecture qui fonctionne plus comme une houle qu’un rouleau compresseur.
Saluons le sérieux de cette édition due Janus Classics, un label des plus exigeants : un travail exemplaire sur la bande sonore tirée des fonds de la Radio bavaroise et un livret exhaustif et passionnant ! On en redemande !
Dans tous les cas, cette archive est à connaître tant pour l’histoire de l”interprétation bruckrienne que pour l’art de cet immense chef que fut Paul Kletzki. Cet enregistrement est sans aucun doute, aux côtés de son intégrale des Symphonies de Beethoven avec la Philharmonie tchèque (Supraphon) et des Symphonies n°1 à n°3 de Sibelius avec le Philharmonia (Warner), l’un des indispensables de sa discographie.
Son : 10 Notice : 10 Répertoire : 10 Interprétation : 10
Pierre-Jean Tribot