Deuxième soirée des finales

par

L'allemand Thomas Reif étudie actuellement à la Hochschule für Musik de Hambourg. Troisième candidat, il gagne d'emblée l'estime du public en interprétant l’œuvre imposée, ...aussi peu que les nuages... , avec justesse et poésie.

© Bruno Vessiez
© Bruno Vessiez

Très à l'écoute, il s'intègre parfaitement à l'orchestre grâce à une sonorité équilibrée quoiqu'un peu faible. Son choix s'est porté sur le concerto de Tchaïkovsky, œuvre monumentale qui nécessite l'arrivée de renforts dans l'orchestre. Dès le premier mouvement, le jeune musicien fait preuve de grandes qualités : un archet fluide, des phrases bien menées, un son doux et timbré. Le vibrato reste léger. En revanche, la justesse pêche un peu : dans plusieurs traits de virtuosité (et ce n'est pas ce qui manque dans ce concerto), les déplacement de main gauche ne sont pas tout à fait exacts. L'effet du stress peut-être ? C'est d'autant plus dommage que les passages plus lents sont très réussis ; ainsi le second mouvement où le legato de Thomas Reif, son timbre chaud et ses portamenti évoquent une ligne de chant. Dans le troisième mouvement, le soliste fait des efforts héroïques pour tenir un tempo stable pendant que les cordes qui l'accompagnent se laissent environ une croche de marge de manœuvre. Malgré cela, son interprétation reste de belle facture, avec des graves profonds et une ligne élégante. Des trois premiers candidats, Thomas Reif est le mieux côté à l'applaudimètre : on espère pour lui une place dans le classement.

© Bruno Vessiez
© Bruno Vessiez

La finaliste suivante, la japonaise Mohri Fumika, se distingue des autres sur de nombreux points. D'abord, c'est la seule à jouer un violon moderne, un Poggi des années 1950. Ensuite, elle surprend dans l’œuvre imposée en ne faisant aucune démonstration de virtuosité : son interprétation contemplative, épurée, donne à cette musique un certain air de théâtre Nô... Ses yeux restent clos la plupart du temps. Son concerto de Sibelius est une grande réussite. Techniquement, tout est là : un son large et généreux, une justesse exceptionnellement sûre (même dans le redoutable troisième mouvement), un archet impeccablement maîtrisé et une grande variété de vibrato. De plus, c'est la seule candidate qui ose finir ses notes aiguës sur un decrescendo afin de mieux se fondre dans l'orchestre, par-dessus lequel elle n'a d'ailleurs aucun mal à passer. Ce qui impressionne chez Mohri Fumika, c'est l'intensité de sa concentration. Son Sibelius, bien que simple, est chargé d'une grande tension expressive. Il faut enfin noter dans son interprétation l'intelligence de la construction. Bien qu'elle soit peu démonstrative, cette toute jeune candidate (21 ans) a gagné l'admiration du public : à la fin de sa prestation, elle est applaudie pendant plus de deux minutes. Plusieurs membres du jury affichent un large sourire ; déjà dans le peloton de tête ?
Quentin Mourier
Bruxelles, Palais des Beaux-Arts, le 26 mai 2015

Les commentaires sont clos.