Gala des 10 ans du Concert de la Loge au Théâtre des Champs-Élysées

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Le Concert de la Loge a célébré son dixième anniversaire au Théâtre des Champs-Élysées le 15 janvier dernier, réunissant une quinzaine d’artistes qui collaborent régulièrement avec l’ensemble. Combinant une dramaturgie opératique narrative et une série d’interprétations instrumentales, cette soirée en trois parties s’est déroulée dans une atmosphère chaleureuse et amicale, reflétant une collaboration artistique épanouie.

Au début du concert, Julien Chauvin, fondateur de l’ensemble, salue le public et prend la parole pour évoquer les absents, notamment Marie-Nicole Lemieux, Cyrille Dubois… et surtout Jodie Devos, prématurément décédée en juin dernier à l’âge de 35 ans. « On pense bien fort à elle », confie-t-il avec émotion.

La première partie commence avec  l’ouverture de La Flûte enchantée, suivie d’un pastiche de scènes d’opéra constitué d’extraits de Phèdre de Jean-Baptiste Lemoine, de Chimène ou le Cid d’Antonio Sacchini et d’Iphigénie en Tauride de Gluck. Judith van Wanroij, Jérôme Boutillier et Stanislas de Barbeyrac prêtent leur talent à ce jeu, accompagné d’une mise en espace et d’un jeu d’acteurs marqué par quelques exagérations théâtrales volontaires qui accentuent les propos. Dans ces premières pièces, chaque pupitre de l’orchestre déploie une sonorité distincte, conférant à l’ensemble une richesse corsée et pleine de caractère, notamment les cordes.

Julien Chauvin reprend le micro pour évoquer une pratique historique méconnue : celle d’applaudir au cœur d’une pièce, à la manière des concerts de jazz, lorsqu’une interprétation est appréciée. Le 2e mouvement de la Symphonie concertante n° 4 pour flûte, hautbois, basson et cor de François Devienne illustre cette coutume. Ce genre musical, très prisé entre 1775 et 1780, permettait à chaque instrumentiste de briller par son virtuosité. Ainsi, Tami Krausz, Emma Black, Javier Zafra et Felix Roth offrent chacun une prestation éclatante.

La suite du programme inclut des airs extraits de La Clémence de Titus de Gluck et de L’Enlèvement au sérail de Mozart, interprétés avec brio par Sandrine Piau, Sulkhan Jaiani et Florie Valiquette. Puis vient le Concerto pour clarinette de Mozart, magnifiquement joué par Nicolas Baldeyrou sur une clarinette de basset, reconnaissable à son pavillon d’amour.

Enfin, une œuvre inédite est mise à l’honneur : la cantate sacrée Le Jugement dernier, que Salieri composa spécialement pour le Concert de la Loge Olympique. Cette première partie, centrée sur le répertoire historique de l’institution, met en lumière la richesse musicale de l’époque. Seulement, Haydn, dont les Symphonies parisiennes, composées pour La Loge Olympique, sont réservées à la troisième partie de la soirée.

La deuxième partie de la soirée plonge dans l’univers baroque, avec Vivaldi, Haendel et Rameau. L’ouverture de L’Olympiade de Vivaldi donne le ton : ferait-elle un clin d’œil à la performance du danseur Samuel Florimond ? Sur des extraits des Quatre Saisons, de la contredanse des Boréades et de « Forêts paisibles » des Indes Galantes, son corps évolue avec une remarquable maîtrise, alternant souplesse et mouvements articulés, en symbiose avec la musique. Mais avant cela, Adèle Charvet et Eva Zaïcik démontrent leur agilité vocale dans des extraits de La Fida Ninfa et Il Giustino de Vivaldi. Philippe Jaroussky et Sandrine Piau enchantent ensuite avec le duo « To thee thou glorious son » tiré de Theodora de Haendel, suivis par Karina Gauvin, qui interprète avec une intensité émouvante « Ah mio cor » d’Alcina.

La troisième partie, la plus éclectique de la soirée, débute avec une rareté : l’ouverture de Démophon de Johann Christoph Vogel. Elle est suivie par d’autres découvertes musicales, notamment un extrait d’Il Siroe de Giovanni Battista Ferrandini, ainsi que des airs et chœurs de Carmen Sæculare de François-André Danican Philidor.

Enfin, Haydn fait son entrée avec le final du Concerto pour violoncelle, interprété par Victor Julien-Laferrière, et celui de la Symphonie n° 82 « L’Ours ». Cette symphonie évoque l’un des enregistrements marquants de l’ensemble, l’intégrale des symphonies parisiennes enregistrées en live à l’auditorium du Musée du Louvre. Dans cette intégrale, Le Concert de la Loge a attribué des surnoms recueilli auprès du public à certaines œuvres, renouant avec une tradition de son illustre ancêtre.

La soirée se poursuit avec un quatuor émouvant extrait de Fidelio, interprété par Chantal Santon Jeffery, Florie Valiquette, Stanislas de Barbeyrac et Sulkhan Jaiani. Enfin, Marina Viotti électrise la salle avec une interprétation brillante de « Nacqui all’affanno... Non più mesta » tiré de La Cenerentola, avant de conclure sur un registre comique avec « Vous a-t-on dit souvent » de La Périchole, aux côtés de Stanislas de Barbeyrac, dans une mise en scène légère et amusante.

Pour clore la soirée en apothéose, tous les chanteurs solistes, accompagnés par les chantres du Centre de musique baroque de Versailles sous la direction artistique de Fabien Armengaud, entonnent le chœur final de L’Enlèvement au sérail. Dans une ambiance joyeuse et festive, l’ensemble conclut avec un Joyeux anniversaire devant un gâteau en forme de lyre, symbole parfait pour marquer cette décennie de succès et de créativité musicale.

Pendant les deux entractes, le public a pu admirer l’exposition de documents originaux relatifs au Concert de La Loge Olympique. 

Le 15 janvier 2025, Théâtre des Champs-Elysées à Paris.

Victoria Okada

Crédit photographique © Lucie Locqueneux

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