Mélodies espagnoles par Bernarda Fink

par

Manuel DE FALLA
(1876-1946)
Siete canciones populares espanolas-Trois mélodies-El pan de Ronda que sabe a verdad-Tus ojillos negros
Joaquin RODRIGO
(1901-1999)
Tres canciones espanolas-Cuatro canciones sefardies-Coplas del pastor enamorado-Cancion del cucu-Fino cristal-Cuatro madrigales amatorios
Enrique GRANADOS
(1876-1916)
Tonadillas en estilo antiguo

Bernarda FINK (mezzo-sop.), Anthony SPIRI (piano)
2011-DDD-66'08-Textes de présentation en français, anglais, allemand et espagnol-Harmonia Mundi HMC 902133
Les récitals entièrement dévolus à la mélodie espagnole ne sont pas légion. Si l'on excepte la grande Victoria De Los Angeles qui se soucia de faire découvrir de manière assez systématique au plus grand nombre ce monde foisonnant et fut à celui-ci ce que Fischer-Dieskau fut au lied, peu d'interprètes, depuis, se hasardent à insérer plus de quelques numéros dans leurs disques ou concerts, généralement puisés parmi une poignée d'oeuvres, toujours les mêmes. Née en Argentine à Buenos Aires où elle fit toutes ses études, Bernarda Fink se sent très à l'aise dans ce répertoire dont on s'étonne seulement qu'elle ne l'ait pas abordé plus tôt, si l'on excepte un disque de mélodies argentines qui faisait la part belle à Gustavino et Piazzola. Son programme d'aujourd'hui débute par les incontournables Siete canciones populares espanolas de Manuel de Falla. Lecture sans surprise mais de très bon aloi: la voix, un peu rauque, s'adapte à merveille à cet univers et le contraste avec le piano virevoltant de Anthony Spiri est des plus réussis. Nous retrouvons de Falla dans des pièces beaucoup moins connues, telles les trois écrites en 1909 sur des poèmes de Théophile Gautier, sans doute la part la plus debussyste du compositeur. Enrique Granados n'est représenté que par sept fragments d'un cycle qui en comporte douze: les Tonadillas en style ancien. Grand succès à leur création, elles plongent leurs racines au plus profond du sol hispanique, à l'instar des plus célèbres Goyescas. On pourrait presque parler de folklore imaginaire, en pensant à celui de Bartok, tant ces mélodies semblent puiser leur inspiration dans la chanson populaire. Comme le souligne Yvan Nommick, auteur de la notice, on a affaire ici à un style populaire idéalisé, au langage à la fois raffiné, piquant, ironique, parfois douloureux. Le reste du programme est dévolu à Joaquin Rodrigo, dont les mélodies lyriques sont éparpillées un peu partout tout au long du disque. L'inspiration du compositeur du Concierto d'Aranjuez y est très diverse: tant les villancicos populaires du 16ème siècle que le noble Lope de Vega ou le monde séfarade sont sollicités dans ces pages généreuses qui parlent toujours directement au coeur. On ne voit guère d'artiste capable d'égaler la réussite de Bernarda Fink aujourd'hui. Regrettons seulement que plusieurs cycles ne soient présentés que par des extraits, et la rareté de ceux-ci ne fait qu'accroître notre frustration. Un album double aurait sans doute pu facilement les présenter dans leur intégralité. Mais, tel quel, ce disque s'imposait néanmoins et la réussite est au rendez-vous.
Bernard Postiau
Son 9 - Livret 10 - Répertoire 10 - Interprétation 9

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