Monologue intérieur sur musique de Janacek

par
Klara Festival

Le Journal d'un disparu
Le Klarafestival se donne pour mission  « d’aborder des thèmes de société pertinents et actuels » et met la migration et le déplacement, l’exil et l’identité au centre du programme de l’édition 2017, sous le titre de Home sweet home. Le festival veut aussi mettre en valeur les productions de théâtre musical belge et présente cette année, en collaboration avec le Kaaitheater, Muziektheater Transparant et la Monnaie The diary of one who disappeared, une nouvelle production de Ivo van Hove basée sur le cycle de lieder éponyme de Leos Janacek.

En 1916, le journal tchèque Lidové noviny publiait un « journal en vers » anonyme racontant l’histoire de Janik qui tombe amoureux d’une jeune tzigane et décide de quitter son village pour la suivre. Janacek décida d’adapter ce poème en un cycle de lieder Journal d’un disparu inspiré par l’amour qu’il éprouvait pour Kamila Stösslova. Dans une lettres à Kamila, il écrit : Cette sombre tzigane de mon Journal d’un disparu, c’était toi. C’est pourquoi ce morceau est si émouvant. Les élans passionnés de Janacek sont ainsi à l’origine d’une œuvre mystérieuse et troublante qui parle d’aliénation et d’identité. Pour cette version scénique mise en scène par Ivo van Hove, la compositrice flamande Annelies Van Parys a été invitée à écrire quatre fragments qui reflètent la composition de Janacek. Sa contribution influence le rythme de l’œuvre, comme si l’apparition du personnage féminin calmait l’ardente fièvre du jeune homme. Et Zefka la tzigane devient un personnage actif qui prend en considération les conséquences de sa liaison avec un « gadja » (non Romani). Cette addition au livret est inspirée par la poésie traditionnelle féminine Romani. La combinaison est réussie et émouvante.
Ivo van Hove situe l’action dans un cadre contemporain, une grande pièce avec piano, fauteuil, cuisine et atelier de photographe avec tous ses attributs (décor Jan Versweyveld) et il présente l’action comme le « monologue intérieur » d’un vieil homme qui, au retour des obsèques de sa femme, se perd dans ses souvenirs : qui est-il ? qui aurait-il pu être ? Les textes sont empruntés aux lettres de Janacek et Kamila et au testament du compositeur. C’est le comédien Hugo Koolschijn qui évoque son impossible amour de jeunesse et le ténor Ed Lyon qui l’interprète de sa voix virile et expressive. La mezzo-soprano Marie Hamard fait partie des mémoires et incarne Zefka d’une voix qui gagne en ampleur au cours du spectacle. Il y a beaucoup d’activité -surtout dans l’atelier du photographe- mais l’histoire proposée par Ivo Van Hove n’accroche pas vraiment et relègue la musique au second plan. Dommage pour Janacek, pour les chanteurs et pour la pianiste Lada Valesova.
Erna Metdepenninghen
Bruxelles, Klara Festival, Kaaitheater, le 12 mars 2017

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.