On n'arrête plus Paavo Jarvi. Une nouvelle réussite dans la Septième Symphonie de Bruckner. 

par

Anton Bruckner (1824-1896) : Symphonie n°7 en mi majeur, WAB 107. Tonhalle Orchester Zürich, Paavo Järvi. 20022 64’54’’ Livret en anglais, français et allemand. Alpha 932 

Le chef estonien Paavo Järvi est sûrement l’un des chefs les plus intéressants à suivre de ce premier quart de siècle. A maintenant 60 ans on ne le présente plus, il s’est largement imposé sur la scène internationale et sa discographie aussi riche que variée compte de multiples réussites. On pense à ses cycles symphoniques consacrés à Beethoven, Nielsen ou bien encore Schmidt… Autant de jalons salués par Crescendo et bien d’autres. Alors forcément à chaque nouvelle sortie on se prend à croire que le miracle va se reproduire encore et encore. L’extraordinaire devient l’ordinaire avec un tel personnage. 

Prenez ce même chef et placez le à la tête d’un vénérable orchestre européen de tradition brucknerienne, la Tonhalle de Zurich, demandez leur de jouer l’incroyable Septième Symphonie du grand Anton et le tout dans une salle rénovée et à l’acoustique proche de la perfection… Cela part plutôt bien pour nous offrir un nouvel enregistrement de référence…un de plus. 

Mais réunir les ingrédients ne suffit pas toujours. Nos amis belges peuvent en témoigner avec la récente désillusion des diables rouges à la coupe du monde au Qatar. Alors Jarvi dans Bruckner ? Plutôt en mode Lukaku ou Messi ? 

Le chef est en terrain connu, fort de ses expériences à Francfort, il est ici plus convaincant. L’émotion et la finesse sont au rendez-vous. On sent un cœur battant. L'acoustique transparente de la Tonhalle offre un écrin idéal aux artistes.

L’Allegro est aussi beau que noble avec un sens inné de la construction. Jarvi nous propose une architecture confondante de densité et de cohérence. 

Le moment que tout mélomane attend, c’est bien évidemment l’Adagio qui sert de point de référence. Le phrasé est empreint de chaleur et d’une humanité rassurante jusqu’à son apothéose. Les qualités intrinsèques de l’orchestre nous rappellent son passé glorieux dans ce répertoire (8ème Symphonie avec Böhm et Kempe). Les cuivres nous prennent directement aux tripes. Jarvi lâche littéralement les chevaux à certains moments et varie habilement les tempi tout au long de l'œuvre pour en souligner les nombreux petits détails.

Le Scherzo est exaltant à souhait, enlevé et intelligent. On a l’impression que plus il avance et plus il accélère. On aime cela ! A notre grande surprise, peut-être notre mouvement favori. 

Après un tel envol, le plus dur c’est de savoir atterrir ! Mais il y a un pilote dans l’avion et Paavo Jarvi peut compter sur sa maîtrise sans égale pour conclure parfaitement avec un Finale tout en équilibre. 

La Septième Symphonie fait partie de ces œuvres bien servie par la postérité. Blömstedt, Böhm, Celibidache, Jochum, Karajan écrasent la concurrence. Pour s’asseoir à la table de ces géants du répertoire brucknerien, il faut en être un soi-même. Paavo Jarvi est grand mais pas encore un titan. Il nous manque ici une part de divin, quand la musique nous transcende au point qu’elle en devient mystique, qu’elle nous questionne sur notre rapport à l’éternité. Cet enregistrement trouvera sa place au panthéon des excellentes versions contemporaines et c’est déjà formidable. La perfection n’est pas de ce monde, heureusement il nous reste la musique de Bruckner !

Son : 10 – Répertoire : 10 – Interprétation : 9,5

Bertrand Balmitgère 

 

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