Paul Lewis et le BNO au Namur Concert Hall

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Ce samedi 29 octobre a lieu le concert du Belgian National Orchestra au Namur Concert Hall. La phalange bruxelloise, sous la direction du chef espagnol Roberto González-Monjas, est accompagnée par l’un des plus brillants interprètes du répertoire pianistique et dont la réputation n’est plus à faire : le pianiste britannique Paul Lewis. Trois œuvres sont au programme lors de cette soirée : Preludio, corale e fuga d’Ottorino Respighi, le célèbre Concerto pour piano n°25 en do majeur, K.503 de Mozart et la Symphonie N°3 de Camille Saint-Saëns, dite Symphonie pour orgue.

La première partie débute avec cette œuvre trop peu jouée de Respighi, Preludio, corale e fuga. Il composa cette pièce pour son examen final au Liceo Musicale di Bologna. Cette composition, notamment le fruit de plusieurs cours avec Nikolaï Rimski-Korsakov, a conquis le jury. Le verdict était le suivant : « Respighi n’est pas un élève, mais un maître ! ». La pièce commence avec des accords solennels joués par les cuivres et les cordes graves agrémentés d’arpèges aux harpes. S'ensuit l’entrée énergique de l’ensemble des cordes. Un beau choral, présenté par les cors et les trompettes, est repris avec brio par l’ensemble de l’harmonie avec de brèves interventions des cordes. Le passage suivant met en avant un pupitre de cors majestueux avant un moment d'accalmie et de douceur avec la petite harmonie. Des solos du Konzertmeister et du violoncelliste soliste viennent embellir le thème énoncé quelques mesures auparavant par les bois. La fugue, au caractère affirmé, commence avec des musiciens engagés. La fin de la pièce, triomphale et dans le style d’un choral, clôture doucement l’œuvre. Les cordes interprètent d’un seul homme le thème final ponctué par l’harmonie. Un dernier moment de quiétude met les harpes en avant avec des glissandi et des arpèges. La pièce se clôture sur un grand crescendo bref mais intense. Le chef, Roberto González-Monjas, mène avec beaucoup d’enthousiasme et d’énergie le BNO dans cette œuvre méconnue de Respighi.

La première partie se termine avec l’un des concertos les plus célèbres du répertoire pianistique : le Concerto pour piano n°25 en do majeur, K.503 de Mozart. Le pianiste britannique Paul Lewis rejoint les musiciens sur scène pour interpréter ce qui est considéré par beaucoup comme l’un des plus beaux concertos pour piano que Mozart ait composé. Le premier mouvement, Allegro maestoso, commence par un long tutti, souvent comparé à la Symphonie Jupiter, faisant la part belle à l’orchestre. Nous retrouvons notamment dans cette introduction une énonciation du thème de la future Marseillaise. Après cette page symphonique, au tour du soliste de faire son entrée pour entamer un dialogue avec l’orchestre. Son jeu virtuose allie à la fois la technique et la musicalité mais aussi la douceur et la franchise. L’orchestre est attentif au pianiste et les passages solos du piano sont parfaitement maîtrisés. Un grand tutti engagé amorce la cadence du soliste. Celle-ci est brillante, il y a des contrastes et les différents thèmes du premier mouvement sont interprétés tantôt avec caractère et franchise, tantôt avec délicatesse. Ce mouvement se clôture par un bref tutti énergique. Le deuxième mouvement, Andante, conjugue poésie et gravité. Il faut souligner la belle cohésion entre le chef et le pianiste. Tous deux connaissent leur partition sur le bout des doigts. Lors de la reprise du thème, le flûtiste se démarque par la justesse de ses interventions. Le troisième et dernier mouvement, Finale, voit Paul Lewis montrer l’étendue de son talent dans cet allegretto. Un chef particulièrement attentif au soliste permet d’assurer une belle continuité des phrases musicales entre l’orchestre et le piano.  Il faut cependant souligner que l’équilibre entre le piano et l’orchestre n’est pas toujours optimal, le piano étant parfois perdu dans la masse sonore de l’orchestre. 

Cela n'empêche pas un public conquis d'applaudir et d’acclamer l’interprétation réussie de ce concerto. Le soliste du soir a livré une prestation admirable et intelligente, accompagné par un chef et un orchestre à l’écoute. 

Après l’entracte, place à la Symphonie n°3 de Camille Saint-Saëns, dite Symphonie pour orgue. Cette œuvre phare du répertoire symphonique rend hommage à Franz Liszt. Composée de quatre mouvements, elle est cependant répartie en deux parties. La première est composée de l’Allegro et de l’Andante, la deuxième étant composée du Scherzo et Finale. L’Allegro commence avec un lent prélude introductif. La justesse des bois dans l’unisson est excellente. Après cette introduction, place à la partie rapide du mouvement avec l’énonciation du thème cyclique par des cordes mouvementées. Le jeune chef espagnol Roberto González-Monjas fait preuve d’une énergie débordante se traduisant par de grands tuttis imposants et sonores. De beaux solos du basson et du hautbois sur fond de pizzicati des cordes achèvent doucement ce premier mouvement. L’Andante suit immédiatement avec l’entrée de l’orgue, amplifié et laissant malheureusement entendre un bruit parasite via l’amplification. Malgré cela, un climat méditatif d’une éloquente gravité nous assaille. Cette première partie se termine tout en douceur sur un grand decrescendo réussi. La deuxième partie commence avec le Scherzo. Le thème principal, abordé par les cordes avec caractère et énergie avant de se développer avec le reste de l’orchestre, est un dérivé du thème cyclique du premier mouvement. Le trio, plus rapide, voit arriver le piano avec des interventions impétueuses et un triangle scintillant. Ce mouvement se termine tout en douceur avant de repartir de plus belle pour le dernier mouvement, Finale. L’orgue refait son apparition avec un accord puissant. Le choral des cordes est accompagné avec brio du piano à quatre mains. Cependant, la balance n’est pas optimale puisque l’orgue a tendance à couvrir l’orchestre. La double fugue s’installe et monte crescendo pour arriver au grand tutti finale. Cet ultime allegro mobilise toutes les forces en présence pour une conclusion triomphale. 

Le public est conquis par cette prestation et applaudit vivement les artistes pour l’interprétation qu’ils viennent de livrer. Le principal chef invité du BNO, Roberto González-Monjas, a mené avec enthousiasme la phalange bruxelloise. Mention spéciale à l’harmonie pour l’excellente qualité dont ils ont fait preuve ce soir.

Pour information, le Belgian National Orchestra va partir en tournée du 3 au 10 novembre au Royaume-Uni avec Paul Lewis au piano et Roberto González-Monjas à la direction. Pour la première fois de son d'histoire, le Belgian National Orchestra se produira à Londres. Ce concert donnera le coup d'envoi d'une grande tournée avec pas moins de huit représentations en autant de jours. Au programme, six oeuvres : Preludio, corale e fuga d’Ottorino Respighi,  Ruslan et Lyudmila Ouverture de Michail Glinka, le Concerto pour piano n°25 en do majeur, K.503 de Mozart, le Concerto pour piano n°1 en sib mineur de Pyotr Ilyich Tchaïkovski, la Symphonie en ré mineur de César Franck et la Symphonie n°3 de Camille Saint-Saëns.

Thimothée Grandjean, Reporter de l’IMEP

Namur Concert Hall, le 29 octobre 2022

Crédits photographiques :  Johan Jacobs

 

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