Réédition du premier enregistrement de l’orgue de la Frauenkirche de Dresde après sa reconstruction

par

Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Concerto en ré mineur BWV 596 ; Trio super Herr Jesus, dich zu uns wend BWV 655 ; Pièce d’orgue BWV 572 ; Partite diverse sopra BWV 768. Maurice Duruflé (1902-1986) : Suite Op. 5. Samuel Kummer, orgue Kern de la Frauenkirche de Dresde. Septembre 2005, réédition 2021. Livret en allemand, anglais. TT 66’53. Carus 83.517

Le 15 février 1945 s’écroulait le dôme de la Frauenkirche qui s’élevait dans le ciel de Dresde depuis plus de deux siècles, victime des frappes aériennes. La volonté d’une reconstruction reprit vigueur dans les années 1990, après la réunification de l’Allemagne, drainant des fonds qui permirent l’inauguration du nouvel édifice le 30 octobre 2005. Le buffet qui logeait un orgue installé par le célèbre Gottfried Silbermann en 1736, fut rétabli selon les plans d’origine de George Bähr, architecte de l’église. Le nouvel instrument, confié aux ateliers strasbourgeois de Daniel Kern, s’inspira des factures classiques saxonnes et alsaciennes, enrichies d’un quatrième clavier (expressif) propice au répertoire symphonique français.

Les deux répertoires correspondants sont à l’honneur dans ce disque, best seller qui s’était vendu à plus de trente mille exemplaires après sa première parution en CD. On vous conseillerait d’initier l’écoute avec les élaborations sur le choral Sei gegrüsset, Jesu gütig, qui détaille successivement quelques sonorités typiques, à commencer par le Principal de l’Oberwerk à découvert. L’interprète déploie des couleurs subtiles, ainsi la Voix Humaine accouplée au pédalier dans la neuvième variation, ou l’écho de cornets dans la dixième (celui du Hauptwerk dialogue non avec le Récit mais avec un assemblage à cinq rangs au Brustwerk). La prise de son n’aide pas au relief, toutefois la vaste acoustique, la captation un peu distante spatialisent ce chapelet dans un écrin de ferveur. Le programme inclut d’autres célèbres pages de Bach. Le BWV 572 où la troisième section (Lentement, à 7’12) sollicite le grondeur Fagott 32’ pour un effet particulièrement saisissant. Influence italienne pour le populaire concerto d’après Vivaldi, ici dans une lecture un peu falote, creuse (les allegros) et sentencieuse (la fugue). En tout cas, on ne manquera pas L’Art de la Fugue que Samuel Kummer vient récemment de graver à Naumburg, magnifié par les micros d’Aeolus.

C’est bien la Suite de Duruflé, une des œuvres du siècle dernier les plus enregistrées, qui révélait toutes les ressources de cet orgue flambant neuf et qui constitue le sommet de cette réédition : un Prélude dont Samuel Kummer exacerbe les complots, une Sicilienne qu’il nous sert tendue et narrative comme une allégorie, et enfin une Toccata pyrotechnique qui laisse oublier sa rhétorique superficielle. Un brasier ! Superbe prestation par l’organiste qui venait d’être nommé à cette console de soixante-sept jeux sur laquelle il grava bientôt un superbe album de symphonies de Louis Vierne pour le même label. 

Son : 7 – Livret : 9,5 – Répertoire : 9 & 10 (Bach) – Interprétation : 7 (BWV 596) à 10 (Duruflé)

Christophe Steyne

 

 

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