Une bonbonnière de sonates pour psaltérion nord-italiennes à l’époque galante
Per il salterio. Angelo Conti (fl. XVIIIème s) : deux Sonates pour psaltérion et basse continue en sol majeur. Carlo Monza (c.1735-1801) : Sonates pour psaltérion et basse continue en ut majeur, en sol majeur. Sonate pour orgue en sol majeur. Baldassare Galuppi (1706-1785) : Sonate pour clavecin en ré majeur. Pietro Beretti (fl. XVIIIème s) : Sonate pour psaltérion et basse continue en sol majeur. Anonyme : Sonate pour psaltérion et basse continue en sol majeur. La Gioia Armonica. Margit Übellacker, psaltérion. Jürgen Banholzer, clavecin, orgue. Août 2019. Livret en anglais, allemand, français. TT 78’29. Ramée RAM 1906
Après quelques CD entrepris depuis une dizaine d’années autour de motets et arias (Antonio Caldara et Portus Felicitatis chez Ramée, Conserva me Domine chez CPO), l’équipe de La Gioia Armonica se produit ici en duo. Le livret retrace la facture du psaltérion, son usage et son répertoire au sein de la musique baroque, précisant que « les partitions dans lesquelles le salterio est utilisé comme instrument solo et d’accompagnement sont conservées pour la plupart dans les bibliothèques italiennes ». Une spécialité locale qu’avaient déjà illustrée divers enregistrements, depuis le vinyle Musica per salterio de Karl-Heinz Schickhaus et Gudrun Haag (Tudor, 1974) jusqu’au Salterio italiano de Franziska Fleischanderl et son consort Dolce Conforto (Christophorus, 2018) qui documentait l’artisanat melliflu des compositeurs Fulgenzio Perotti, Florido Ubaldi ou Vito Ugolino. Voici un nouvel assortiment de cinq sonates dans des tonalités souriantes et adaptées à l’instrument, où le continuo est tenu par le clavecin en alternance avec les tuyaux d’un organo legno.
Au programme, Carlo Monza, Maître de Chapelle milanais actif à la Capella Ducale puis à la Cathédrale. Le peu de choses que l’on sait aujourd’hui d’Angelo Conti (lui aussi actif à Milan) et de Pietro Beretti, la notice nous le résume. Mieux connu, ne serait-ce que par ses opere buffe, Galuppi apparaît ici par le biais d’une Sonate pour clavecin, jouée avec davantage de probité que d’imagination. Peut-être parce que le Bruce Kennedy de 1985 apparaît dans une étroite perspective peu flattée par les micros. Les œuvres pour l’instrument vedette de cet album sont en revanche interprétées avec une variété de ton et de frappe qui honore Margit Übellacker, sur un modèle construit par Christian Fuchs (2017) d’après un original de 1745.
De quoi faire oublier la naïveté mélodique et les tournures banales qui confisent ces pages ? La notice conclut par la définition que le théoricien allemand Friedrich Wilhelm Marpurg (1718-1795) donnait du style galant où « l’auditeur qui ne comprend rien des obscurs secrets du canon rétrograde trouve du plaisir et de l’émotion ». À telle enseigne, on éviterait d’écouter après Die Kunst der Fuge ce charmant disque à fort indice glycémique. Fera-t-il fureur en fond sonore dans les salons de thé de la Piazza del Duomo, ou dans quelque échoppe à bibelots sur le Pont du Rialto ?
Son : 8,5 – Livret : 8,5 – Répertoire : 5 – Interprétation : 7-9
Christophe Steyne