Mots-clé : Werner Van Mechelen

Mozart lyrique en rééditions  

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Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791 ): Le Nozze di Figaro ; Don Giovanni ; Così fan tutte. Solistes, La Petite Bande, direction : Sigiswald Kuijken. 1992 - 1998. Livret en allemand et anglais. 9 CD Accent ACC 24390  

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791 ): Le Nozze di Figaro ; Don Giovanni ; Così fan tutte, Die Zauberflôte, Der Schauspieldirektor.  Solistes, Wiener Philharmoniker, direction : Erich Kleiber (Le Nozze di Figaro) ;  Karl Böhm (Così fan tutte et Die Zauberflöte) ; Josef Krips (Don Giovanni) ; Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, Ferdinand Leitner (Der Schauspieldirektor). 1955-1989. Livret en allemand et anglais. 10 CD Profil. PH 23005    

Un monstre d’orgueil et d’ambition« Henri VIII » de Camille Saint-Saëns

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Un monstre d’orgueil et d’ambition, tel est le Henri VIII magistralement incarné par Lionel Lhote, tel est le Henri VIII que nous propose le metteur en scène Olivier Py.

Henri VIII est un opéra de Camille Saint-Saëns, créé à l’Académie nationale de musique de Paris (aujourd’hui Opéra de Paris) le 5 mars 1883. Un opéra rarement représenté : cette saison, « all over the world », il ne sera à l’affiche que pour cette production bruxelloise ! C’est dire. 

Justifie-t-il ce désintérêt ? Mérite-t-il cette sorte d’exhumation ? Oui et non. C’est une œuvre musicalement bienvenue, de belle orchestration, de belle instrumentation. Et l’on comprend le bonheur d’Alain Altinoglu de nous la faire découvrir. De nous la faire bien découvrir dans la mesure où, très bien suivi par un Orchestre de la Monnaie qu’il a manifestement convaincu et stimulé, il en exalte les richesses. Mais c’est une œuvre qui n’a pas la tension de ces grands chefs-d’œuvre lyriques qui nous emportent inexorablement dans leur déferlement ou qui nous marquent à jamais par l’un ou l’autre épisode de leur partition. 

Elle nous confronte donc à cet Henri VIII dont nous savons tous par infusion culturelle qu’il s’est marié six fois, et que d’ailleurs l’un de ces mariages a provoqué le schisme anglican. Cet Henri VIII dont nous reconnaissons à l’instant le portrait peint par Holbein. Le livret, qui prend des libertés avec l’Histoire, nous invite à le rejoindre au moment où il répudie Catherine d’Aragon, la remplace par Anne de Boleyn et de ce fait quitte l’Eglise romaine avec fracas. Ce livret insère un certain Don Gomez de Féria, ambassadeur espagnol auprès de la Cour d’Angleterre, amant dorénavant rejeté par Anne de Boleyn, mais pour qui elle avait écrit une lettre d’instante recommandation auprès de la reine aujourd’hui ostracisée, une lettre qui pourrait compromettre sa merveilleuse ascension (« l’humble fille d’hier sera reine demain »). Un livret assez linéaire en fait et qui n’abonde guère en « coups d’opéra ».

Olivier Py s’en est emparé dans une mise en scène dont tous les aspects visent à faire du monarque un monstre d’orgueil et d’ambition, un cynique jouant sur tous les tableaux, de la séduction à la menace sans appel (Ses derniers mots : « si j’apprends qu’on s’est raillé de moi, la hache désormais »). 

La première séquence est si révélatrice : Henri VIII entre sur le plateau vêtu d’une redingote noire. Un photographe s’installe. On revêt le monarque d’un manteau et d’un chapeau d’apparat. Henri VIII, tel que l’a imposé pour l’éternité le portrait d’Holbein. Photo. Plus tard, une autre photo, tout aussi majestueuse, sur un faux cheval. Plus tard encore, au début du troisième acte, le roi entre en scène… sur un vrai cheval, incroyable tribune pour des paroles d’autorité et de décisions sans appel.

Souvent, alors que les autres protagonistes sont à l’avant-plan, il est là, à l’affût, à l’écoute. Et même, le voilà batifolant avec une dame d’honneur d’Anne de Boleyn, en négation méchamment ironique de ses grands serments d’affection et de prédilection.

Tout cela s’inscrivant dans une scénographie et des costumes de Pierre-André Weitz, le complice au long cours de Py, qui nous plongent dans un univers surdimensionné, majestueux, dont le noir typique permet des contrastes éclatants avec certains vêtements rouges ou blancs.

Olivier Py est un incontestable créateur de tableaux scéniques époustouflants. Ainsi, la séquence du synode qui se conclura par le schisme : masse rouge vif des prélats rassemblés se métamorphosant, chasubles retirées, en peuple acclamant son roi (un grand moment pour les chœurs !).

Mais Olivier Py, ce sont aussi, qui m’ont moins convaincu, ses éternels beaux jeunes gens quasi dénudés (mais cette fois, un seul « tout nu » : a-t-il été tiré au sort ou l’a-t-il voulu ?) qui doublent les séquences ou en anticipent des réalités futures. C’est aussi ce que j’appellerai un caprice de metteur en scène : cette locomotive qui, au début du deuxième tableau du quatrième acte, surgit sur le plateau en défonçant un mur, tout cela pour dire qu’on est parti à la campagne… Ce sont aussi des séquences chorégraphiées (par Ivo Bauchiero), obligées par le genre certes, dont j’interroge la signification et l’intérêt (mais cette réticence est peut-être liée à ma relation personnelle à la danse).

Mais si cet Henri VIII restera dans notre souvenir, ce sera, et c’est essentiel en l’occurrence, grâce à celui qui l’incarne : Lionel Lhote. Il est, vocalement et scéniquement, le monstre d’orgueil et d’ambition de son personnage. Quelle rage, quelle séduction doucereuse, quelle conviction, quelles menaces dans les intonations de sa voix, dans la conduite et la maîtrise de son chant. Et son jeu corporel est alors comme le prolongement, comme l’exacte visualisation de ce qu’il nous donne à entendre. Quelle maturité ! 

Werner Van Mechelen met sa sensibilité au service de Verlaine et de la musique de Debussy, Fauré et Hahn

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Mélodies de Verlaine. Claude Debussy (1862-1918) : Trois mélodies de Verlaine L. 81 ; Suite bergamasque III. Clair de lune L.75. Gabriel Fauré (1845-1924) : Cinq mélodies de Venise op. 58 ; Deux mélodies op. 46 II. Clair de lune ; La Bonne Chanson op. 61, version pour piano et quatuor à cordes. Reynaldo Hahn (1874-1947) : Chansons grises. Werner Van Mechelen, baryton-basse ; Florestan Bataillie, piano ; Quatuor Desguin. 2020/21. Notice en anglais, en français et en néerlandais. Textes de Verlaine avec traduction anglaise. 64.50. Etcétera KTC 1728.

De Kinderen der Zee: une remarquable redécouverte

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On n’apprendra rien à personne en faisant observer que les organisateurs de concerts en Belgique ne se signalent que rarement par leur souci de mettre en valeur le patrimoine musical du Plat pays, ce qui est franchement regrettable d’autant plus que ce ne sont pas les (re)découvertes à faire qui manquent.

On n’en félicitera que davantage Alain Altinoglu d’avoir mis à l’affiche cette saison deux représentations en concert de De Kinderen der Zee (Les enfants de la mer), unique opéra du compositeur Lodewijk Mortelmans (1868-1952). Mortelmans travailla 15 ans à cette oeuvre pour laquelle il choisit de mettre en musique la pièce éponyme de Rafaël Verhulst, et qu’il mena à bien en août 1915 alors que la Première Guerre mondiale faisait rage. L’Opéra Royal flamand d’Anvers avait d’abord envisagé de créer cet opéra en 1918 en vue de marquer le vingt-cinquième anniversaire de l’institution. Mais les séquelles du conflit firent cependant que ces plans prirent du retard, de sorte que la première dut attendre jusque mars 1920. Si la critique musicale salua unanimement la musique, la mise en scène et les décors, elle se montra plus réservée sur certains interprètes mais surtout sur le livret, jugé assez faible et insuffisamment théâtral (nous y reviendrons). Il faut ajouter que la personnalité de l’auteur de la pièce n’était sans doute pas étrangère à certains jugements. (Rafaël Verhulst était en effet un personnage contesté. Fervent partisan de la cause flamande, il fut condamné à mort en 1920 pour collaboration avec l’ennemi : rédacteur en chef du journal Het Vlaamsche Nieuws, organe de l’activisme flamand, il siégea également au Raad van Vlaanderen -Conseil de Flandre-, parlement officieux constitué sous l’oeil bienveillant de l’occupant et qui proclama l’indépendance de la Flandre en 1917. L’intéressé s’étant réfugié aux Pays-Bas, la peine ne put être exécutée.) Très peiné par l’accueil de la critique et le fait que De Kinderen der Zee ne connut que sept représentations, Mortelmans décida d’interdire toute représentation scénique de l’oeuvre. Il en fit cependant entendre le troisième et dernier acte en concert à Anvers en 1924 et tira de l’opéra une suite orchestrale et vocale de 90 minutes exécutée à Anvers également en 1942.

C’est donc un public à l’affût de la découverte qui se pressait au Palais des Beaux-Arts pour entendre une oeuvre dont la partition avait pris la poussière pendant plus d’un siècle.

Penthesilea, l’opéra « coup-de-poing » de Dusapin

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Pascal Dusapin (né en 1955): « Penthesilea », Opéra avec prologue, 11 scènes et épilogue d’après Heinrich von Kleist.  Natascha Petrinsky, Marisol Montalvo, Georg Nigl, Werner Van Mechelen, Ève-Maud Hubeaux, Wiard Witholt, Yaroslava Kozina, Marta Beretta. Orchestre symphonique et chœurs de La Monnaie, dir. Franck Ollu.2019-2CD-89’51"-Textes de présentation en français, néerlandais et anglais-Livret en allemand-Cyprès CYP4654 419