Profondeurs mahlériennes
Gustav MAHLER (1860-1911)
Kindertotenlieder (arr. Riehn)
Lieder eines fahrenden Gesellen (arr. Schoenberg)
Quartettsatz
Feruccio BUSONI (1866-1924)
Berceuse élégiaque (arr. Stein)
Sara MINGARDO (contralto), Grazia RAIMONDI (violon), Silvio DI ROCCO (alto), Olaf LANERI (piano) MUSICA AUREI, Luigi PIOVANO (violoncelle et direction)
2011- DDD- 63’23’’- Texte de présentation en français et anglais – Eloquentia – EL1233
Six œuvres mahlériennes furent programmées aux concerts de l’éphémère Verein für musikalische Privataufführungen [Société d’exécutions musicales privées (1918-1921)] d’Arnold Schoenberg. Il fallait, pour l’occasion, effectuer des réductions de l’orchestre gigantesque pour lequel écrivait le compositeur et c’est l’auteur des Gurrelieder qui se chargea d’arranger les Leider eines fahrenden Gesellen pour formation chambriste. Ce n’est qu’en 1987 que Reiner Riehn réduisit pour sa part les Kindertotenlieder et toucha (peut-être mieux que Schoenberg) à l’essence même des partitions originelles (même si se passer de l’orchestre symphonique ne permet peut-être pas de rendre la tourmente [Braus], le tumulte [Saus] ou l’épouvante [Graus] évoqués par le texte du dernier Chant des enfants morts…). Incontestablement, Sara Mingardo possède toutes les qualités pour aborder ces chefs-d’œuvre. Dans la lignée de Ferrier, les profondeurs sont abyssales et si l’on regrette çà et là un manque de couleurs (ou tout au moins de dégradés), son aptitude à « conter » les textes est remarquable (a-t-on jamais « dit » la deuxième strophe de Ich habe’ein glühend Messer de cette manière?). L’accompagnement de Luigi Piovano est tout à fait honorable et la magnifique prestation des bois souligne à merveille quelques dissonances voulues douloureuses par Mahler. On trouve en complément le Quartettsatz de jeunesse du compositeur -dans une version que l’on aurait aimée plus engagée- et la belle (mais pas géniale) Berceuse élégiaque de Busoni qui figurait au programme du dernier concert de Mahler à New York (réduite ici par Erwin Stein, élève de Schoenberg). Un disque cohérent à retenir principalement pour Mingardo.
Nicolas Derny
Son 10 - Livret 8 - Répertoire 10 - Interprétation 8