À Genève, une Belle au Bois Dormant par de jeunes Russes 

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Pour achever sa saison, le Grand-Théâtre de Genève invite le Ballet Yacobson de Saint-Pétersbourg pour quatre représentations de l’un des grands chefs-d’œuvre de Tchaikovsky, La Belle au bois Dormant.

Fondée en 1969 par le chorégraphe Leonid Yacobson, cette compagnie est totalement indépendante d’un théâtre et regroupe de jeunes danseurs constituant en fait le Ballet Académique National de Saint-Pétersbourg, avec actuellement à sa tête Andrian Fadeev, ex-danseur étoile devenu son directeur artistique depuis 2011. Elle est accompagnée par la formation qui collabore régulièrement à ses spectacles, l’Orchestre Symphonique National de Saint-Pétersbourg, placé sous la direction d’un chef chevronné, Alexander Titov.

La chorégraphie a été confiée à Jean-Guillaume Bart qui avait été promu danseur étoile à l’Opéra de Paris le 5 janvier 2000 lors d’une représentation de La Belle au Bois Dormant ; et maintenant c’est lui qui élabore sa propre version d’après celle de Marius Petipa qui en est la base historique. S’y dégage aussi l’influence de la production parisienne de Rudolf Nureyev que Jean-Guillaume Bart a dû danser maintes fois, en incorporant certaines de ses trouvailles comme la scène des tricoteuses du premier acte, l’intermède dansé dans la partie de chasse ou le voyage de la Fée des Lilas et du Prince dans une nacelle en forme de cygne. Dans le dernier tableau, il rétablit même, lors de l’évocation des contes de Perrault, la rencontre de Cendrillon et du fils du roi en quête de la pantoufle de vair. Et sa relecture est développée avec fluidité dans un décor sobre utilisant les intérieurs de palais et sous-bois tirés des cartons des Galli-Bibiena et des costumes tout aussi simples élaborés par Olga Shaishmelashvili sous de beaux éclairages dus à Evgeny Ganzburg.

Dès la frémissante Introduction orchestrale brossée par la baguette d’Alexander Titov, suscitant quelques ‘couacs’ vite estompés, paraît la malfaisante Carabosse s’attaquant à la grille frontale du château, mais aussitôt repoussée par les gardes tandis que survient la Reine enceinte, accompagnée de son époux. Puis le Corps de ballet, réduit à un effectif d’une quarantaine de danseurs, constitue le groupuscule de courtisans venus pour célébrer le baptême d’Aurore. Immédiatement s’imposent Angelina Grigoreva qui prête à Maléfice une expression cynique vengeresse et Anna Skvortcova dessinant une Fée des Lilas irradiante de bonté salvatrice, face à un couple royal magnanime (Sergey Davidov et Svetlana Golovkina), secondé par le ridicule Catalabutte de Tasman Davids. Au premier acte apparaît finalement la Princesse Aurore de Sofia Matyushenskaya, trop jeune pour un rôle si écrasant, négociant difficilement sa redoutable entrée, évitant sauts et bonds pour se concentrer sur sa technique de pointes, sans parvenir à donner une réelle présence à son personnage totalement introverti. Bien supérieur, son partenaire, Andrey Sorokin, maîtrisant avec le sourire toutes les figures techniques que doit affronter le Prince Désiré. Au troisième acte, dans la narration des contes, brille le fascinant Oiseau bleu de Kyrill Vychuzhanin dialoguant avec la Princesse Florine plus retenue de Nuryia Kartamyssova.

Lorsque le rideau tombe, le public ovationne autant l’ensemble du plateau pour sa fraîcheur juvénile que les instrumentistes ayant restitué avec fougue une partition difficile. 

Paul-André Demierre

Genève, Grand-Théâtre, le 27 juin 2019

Crédits photographiques : Yacobson Ballet

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