A Marseille, la maîtresse du roi

par
La Favorite

Pour les premières représentations de « La Favorite » de Donizetti depuis 1968 l’Opéra de Marseille a opté pour une version concertante et a choisi la version originale en français. « La Favorite » fut en effet créée à l’Opéra de Paris en 1840, commandée par Léon Pillet, Administrateur de l’Opéra, qui avait demandé au compositeur « un ouvrage capable de correspondre au « style français » et avec un livret en français.

Si c’est comme « La favorita », donc dans la version italienne (imparfaite) de 1842, que l’œuvre a peut-être été plus populaire, c’est sans doute grâce aux interprétations (enregistrées) d’illustres chanteurs comme Giulietta Simionato ou Luciano Pavarotti. Mais maintenant on présente généralement « La Favorite » (livret d’Alphonse Royer et Gustave Vaëz) dans sa version originale pour laquelle Donizetti a pourtant réutilisé une grande partie du matériel musical qu’il avait imaginé pour un ouvrage destiné à une autre scène parisienne (Le Théâtre de la Renaissance) : « L’ange de Nisida »  mais qui est resté inachevé. L’Opéra de Marseille avait réuni une distribution quasiment complètement francophone qui sous la baguette du chef italien Paolo Arrivabeni (directeur musical de l’Opéra de Wallonie de 2008 à 2017) nous a fait vivre l’histoire de l’amour malheureux de Fernand, novice au monastère de Saint-Jacques de Compostelle pour Léonor de Guzman, la maitresse d’Alphonse XI, roi de Castille.
Le rôle de Léonor était interprété par Clémentine Margaine qui a su donner vie au personnage, son amour, ses angoisses, ses souffrances et son désespoir avec une voix chaude, homogène et expressive, une interprétation nuancée et une belle projection du texte. Son dernier acte était vraiment émouvant. Fernand avait la voix ensoleillée de Paolo Fanale, agréable mais trop légère pour le rôle. L’interprète s’engage mais dans l’affrontement avec le roi et les seigneurs courtisans au troisième acte il manque absolument de poids vocal. Je dois avouer que je craignais qu’il ne tiendrait pas le coup mais la voix était encore bien là pour un gentil « Ange si pur » au quatrième acte. Mais pourquoi trouvait-il nécessaire d’afficher presque tout le temps un sourire béat ? Jean-François Lapointe donnait de l’allure scénique et vocale au roi Alphonse, chanté avec sa chaude voix de baryton, bien conduite mais forçant parfois le son inutilement et son admirable projection de texte. Balthazar, le supérieur du monastère, avait la voix grave et le ton bienveillant et sévère de Nicolas Courjal. Jennifer Michel donnait charme et spontanéité à Inès, chanté d’une fraîche voix de soprano et Loïc Félix campait un Don Gaspard plus que convaincant dans ses intrigues. Bonne prestations des chœurs, attentifs et disciplinés. Paolo Arrivabeni veillait à ce que l’orchestre soit bien présent comme protagoniste, mais un protagoniste discret qui soutenait et inspirait les solistes et ne les noyait pas dans des flots de son tout en achevant une belle résonance et dynamique.
Erna Metdepenninghen
Opéra de Marseille, le 13 octobre 2017

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