Bernstein à la Bavaroise
Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Symphonie n°5 en Ut mineur, Op.67 ; ouverture de Leonore III en Ut majeur, Op.72b. Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, direction : Leonard Bernstein. 1976. Livret en anglais et allemand. 49’39’’ BR Klassik 900229.
Robert Schumann (1810-1856) : Symphonie n°2 en Ut majeur, Op.61 ; Leonard Bernstein (1908-1990) : Divertimento pour orchestre. Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, direction : Leonard Bernstein. 1983. Livret en anglais et allemand. 56’34’’. BR Klassik 900228.
Franz Schubert (1797-1828) Symphonie n°9 en Ut majeur, D.944 (disque bonus avec des extraits des répétitions). Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks, direction : Leonard Bernstein. 1983. Livret en anglais et allemand. 50’27’’ (CD bonus : 60’28’’) BR Klassik 900229.
On associe pas foncièrement le nom de Leonard Bernstein avec le Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks de Munich. Si en Europe, le chef avait noué des relations étroites avec les Wiener Philharmoniker ou l’Orchestre national de France, sa présence à Munich est documentée par une magistrale captation audio et vidéo de Tristan et Isolde de Wagner et la Grande messe en Ut de Mozart chez DGG.
C’est seulement en octobre 1976 que Bernstein fait ses débuts au pupitre de la phalange avec un concert spécial 100% Beethoven au profit d’Amnesty International. Bernstein revient en 1981 pour le Tristan et Isolde mentionné et à partir de 1983, il sera présent pour un concert d’abonnement par saison. BR Klassik nous propose ainsi 3 parutions qui illustrent cette collaboration courte mais magistrale entre un chef fulgurant et un orchestre d’élite.
Nous traiterons ces parutions de manière chronologique avec en premier lieu ce concert de Beethoven phénoménal de 1976. Certes c’est du Beethoven épais pour nos oreilles rééduquées et historiquement informée avec cette phalange en tutti et ce geste sculptural mais Bernstein impose une force dramatique telle un rouleau compresseur titanesque dans lequel se déploie un orchestre magistral dans ses tutti et d’une finesse sublime dans ses solistes. On sent la phalange captivée par cette baguette qui à la fois impose une puissance démoniaque mais qui laisse libre court à la fantaisie avec un 3e mouvement “allegro” léger et humoristique jusqu’à la puissante transition avec un dernier mouvement emporté au panache avec la beauté intimidante d”un temple antique ! C’est sans nulle doute l’une des plus grandes Symphonie n°5 conservée au disque, de celles qui clouent l’auditeur à son fauteuil ! L’ouverture de Leonore III qui conclut cet album poursuit avec cette force musicale implacable magnifiée par un orchestre galvanisé et concentré par cet impact dramaturgique qui rend chaque mesure passionnante du déroulement suivant.
On reste sur des cimes vertigineuses avec le concert de 1983. La Symphonie n°2 de Robert Schumann est magistrale par son énergie communicative qui transcende le matériau musical. Le ton est romantique, parfois presque échevelé, porté par une urgence dramatique absolue. On a rarement entendu Schumann aussi vivant et électrique sous cette direction inspirée qui peut s’appuyer sur des pupitres magistraux. Avec de tels musiciens, Bernstein peut tout oser au fil de son inspiration des accélérations, des contrastes, des couleurs ! Changement radical de ton avec le pétulant Divertimento de Bernstein en personne, composé pour les 100 ans du Boston Symphony Orchestra et qui était présenté en première munichoise. Bernstein fait danser et virevolter, avec sens du rythme, les musiciens bavarois.
Enfin, dernière parution de cette série : une Symphonie n°9 de Schubert captée en 1987. Le ton global change, Bernstein est plus dans une noirceur traversée en clair-obscur. Le construction musicale est parfaite, portée encore par des pupitres magistraux. La finesse du trait est la grande qualité de cette interprétation où le chef dirige dans jamais forcer, appuyant juste telle nuance ou tel équilibre. Après le choc musical énergisant des deux précédentes parution, il faut un temps pour s'adapter à cette lecture automnale et nostalgique. Le disque bonus nous permet de retrouver Bernstein répéter, en allemand, cette oeuvre ; ce type de document est toujours précieux pour comprendre le travail du chef.
Dès lors, 3 parutions essentielles qui illustrent le génie et le charisme de ce musicien hors normes. Notons que ces albums ne seront pas diffusés sous forme numérique et que le format physique est le seul moyen de les acquérir.
Note globale : 10