Au Concert

Les concerts un peu partout en Europe. De grands solistes et d’autres moins connus, des découvertes.

Début mitigé de l’intégrale des Sonates de Beethoven par Boris Giltburg à Flagey

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S’attaquer à l’intégrale des Sonates pour piano de Beethoven est un défi musical et intellectuel considérable, et on ne peut que saluer l’ambition de Boris Giltburg -chouchou du public bruxellois depuis son triomphe au Concours Reine Elisabeth de 2013- de se confronter à ce monument.

Cependant, après les deux premières soirées consacrées à cette audacieuse entreprise, l’auditeur de bonne foi se trouve quelque peu désorienté par les irritantes inégalités des prestations de ce pianiste incontestablement doué.

Plutôt que de présenter ces œuvres dans l’ordre chronologique demeure composition, Giltburg -qui joue ici avec partition sur tablette- choisit de les interpréter dans un choix panachant chaque fois des sonates d’époques différentes, ce qui est une excellente initiative et évite toute monotonie pour le mélomane.

Mais c’est bien par la Première Sonate Op. N° 1 en fa mineur qu’il entame à juste titre le cycle. Et ici, il faut dire honnêtement que le pianiste n’est pas ici à son meilleur. Certes, le jeu du musicien est toujours techniquement très propre, mais hélas peu inspiré. Giltburg a bien sûr pris la mesure de cette oeuvre de jeunesse, et l’Adagio est joliment déclamé dans un beau son chantant. Mais les mouvements rapides sont assez lourds, avec des basses inutilement insistantes (la indications dynamiques sont bien sûr relatives, mais il est utile d’avoir à l’esprit  que les pianos de l’époque de Beethoven n’avaient que bien peu à voir avec les surpuissants instruments de concert d’aujourd’hui). Malgré un beau fini instrumental, l’impression est que cette œuvre constitue pour Giltburg une espèce de pensum, bien obligé qu’il est de la jouer dans le cadre de cette intégrale.  D’ailleurs, les mêmes remarques peuvent s’appliquer à la Deuxième Sonate op. 2 N° 2 qui ouvrait la deuxième soirée le lendemain. Là aussi, on entend quelque chose d’appliqué -et hélas dépourvu de cet humour impertinent que Beethoven tenait de Haydn- plutôt qu’une véritable recréation. 

Heureusement, le pianiste semble nettement plus dans son élément dans la superbe Sonate   n° 18, Op. 31 N° 3 où l’Allegro initial est plein d’esprit, puis le Scherzo (qui remplace ici le mouvement lent) plein de vivacité avec un interprète indubitablement sensible à l’originalité de la musique. Le jeu de questions-réponses du Menuetto est très bien rendu, mais le Presto con fuoco final est malheureusement assez lourd.

Les Rencontres musicales Enesco

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Au cours de sa riche histoire culturelle, la Roumanie oscilla entre deux pôles : l’attraction pour les particularismes populaires et l’aspiration à un langage stylisé commun à tous les peuples.

Le génie de Georges Enesco parvint à résoudre l’impossible équation : il emprunta, par exemple,  à l’Europe Centrale la nostalgie des Rhapsodies roumaines puis, pour  son unique opéra, se tourna vers le mythe universel d’ Œdipe. Se tenant à distance de la synthèse comme de l’ethnographie, le compositeur fit de l’éclectisme la substance même de son inspiration.

Dès lors, comment rendre compte de la complexité d’une telle personnalité sans la réduire à l’une ou l’autre de ses facettes? C’est le pari que relevaient avec brio ces « Rencontres musicales » de 2025 célébrant les 70 ans de sa disparition. En un mois, gala, concerts et concours dessinaient un portrait généreux et sensible du grand virtuose roumain. 

A commencer par le Concert de Gala du 13 octobre à L’Automobile Club de France qui avait inscrit au programme le rare et fabuleux l’Octuor Op. 7 pour instruments à cordes. Cette pièce maîtresse était précédée d’une présentation aussi agréable qu’érudite ainsi que de quelques œuvres pour chant et piano d’où se détachaient les 3 Etudes pour piano de Bartok ainsi qu’une jolie mélodie ukrainienne (Skoryk) interprétées par Inna Kalugina (chant) et Roman Lopatinsky (piano). Emmenés par le chef et violoniste Nicolas Dautricourt  passionné et fin connaisseur de l’Octuor Op. 7, les musiciens en donnaient une interprétation superlative. Renouvellement perpétuel, soulevée par un irrésistible et mystérieux ressac, cette immense fresque, « tour de force inouï de la part d’un adolescent de dix-neuf ans » selon Harry Halbreich, semblait en effet abolir le temps. Dans cet indescriptible tissus sonore, véritable orgie de cordes, les interprètes en osmose méritaient tous les éloges, second violon et alto solo en tête ; au final le public hypnotisé se levait d’un seul élan pour retrouver comme en rêve la Concorde illuminée.

Napoléon au Louvre

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Heureusement, le patrimoine musical français n’est pas menacé par les voleurs de bijoux. Il n’en est pas moins précieux comme le démontre ce concert du Louvre, intitulé « Un opéra pour Napoléon » . On a assez répété que l’Empereur aimait autant la musique qu’il la chantait mal mais on a peu mis en valeur l’importance qu’il lui accorda toute sa vie. C’est le mérite de cette série de  5 concerts et  une conférence regroupées sous le titre « Une révolution en musique ! » en lien avec l’exposition consacrée au peintre « Jacques-Louis David » (1748-1825). 

Les compositeurs, sculpteurs, peintres et même tragédiens comme Talma se tournent vers l’Antiquité classique néo- romaine. Le Premier Consul va y ajouter son goût pour l’Italie et les poèmes du barde Ossian ; ces derniers alimenteront le courant gothique-historique, l’une des sources du Grand Opéra Français. Les Bardes de Lesueur, La Vestale et Fernand Cortez de Spontini témoignent sur la scène de l’Opéra de l’influence impériale.  

La Vestale  de Spontini  dont deux airs figurent au programme remporte un succès phénoménal dès sa création en 1807 et marque d’une pierre blanche l’histoire de l’opéra.

L’exacerbation de sentiments dans un contexte de grandeur morale est devenue la règle. Autant sur scène qu’ à l’orchestre, les effectifs doivent être énormes, puissants et la scénographie spectaculaire (défilés militaires, chœurs pléthoriques jusqu’à éruption finale du Vésuve). Le Triomphe de Trajan (1807) métaphore de celui de l’Empereur, commandé à Lesueur poussera même à l’extrême « la magnificence extraordinaire du spectacle » écrit le critique Suard.

Un week-end luxembourgeois sous le signe de la musicalité

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Au nord-est du Luxembourg, la petite ville d’Echternach, à quelques centaines de mètres de la frontière allemande, abrite une salle polyvalente d’une qualité remarquable : le Trifolion. Lieu d’événements culturels à la programmation éclectique, il se veut avant tout un espace de mise en valeur des artistes luxembourgeois. Tout au long de l’année, plusieurs week-ends y sont consacrés à différents thématiques : EchterLive pour les musiques actuelles, Echter’World pour les musiques du monde, Echter’Jazz pour le jazz, et enfin Echter’Classic, dédié à la musique classique. Ce dernier s’est tenu les 10 et 11 octobre derniers, articulé en deux volets : les grands concerts du soir au Trifolion et une série de show cases de jeunes musiciens basés au Luxembourg, donnés dans la Salle des Glaces du Lycée Classique d’Echternach.

Les grands concerts du soir

La première soirée a réuni le vibraphoniste Pascal Schumacher et la pianiste Danae Dörken dans un programme intitulé Glass Two, où s’entremêlent les musiques de Philip Glass et de Schumacher lui-même. L’alliance du vibraphone cristallin et du piano plus dense crée un dialogue sonore fascinant : la résonance aérienne de l’un se fond dans la profondeur de l’autre. Leur interprétation, tantôt contemplative dans la répétition hypnotique des motifs, tantôt vive et contrastée par un jeu de nuances sonore très maîtrisé, capte littéralement le public. Danae Dörken, pianiste germano-grecque au tempérament lumineux, impressionne par son énergie et son sens du rythme, tandis que le Luxembourgeois Pascal Schumacher séduit par sa virtuosité et son imagination sonore. Les lumières mouvantes, aux teintes changeantes, contribuent à l’atmosphère méditative et immersive de ce concert exigeant et inspirant, où les musiciens entraînent le public dans une bulle où le temps semble suspendu.

Donaueschinger Musiktage 2025 : un festival de création

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Mi-octobre à Donaueschingen, on frissonne sous le vent gris d’un automne où résonne, comme ailleurs, le repli sur soi d’un monde qui s’était voulu ouvert, qui maintenant cède au cri, à la colère, autojustifiée, déifiée et déconnectée de sa réalité biologique (l’émotion est un moteur d'action, un outil de communication et un moyen d'adaptation) : les tribuns des réseaux (ils n’ont plus rien de sociaux) abrutissent et outrancient, conspuent et excluent, bradent et liquident – la liberté, le climat, la solidarité, la science (au profit de l’eau de javel), le légitime, la culture. Emergeant de la grisaille que nos efforts clairsemés peinent à dégager, les moments consacrés à l’art viennent comme des îles : les Donaueschinger Musiktage sont une de ces oasis, à la fois institution ancrée dans l’histoire et ogive fureteuse et dénicheuse – un des rares festivals à accueillir de grands ensembles (le financement institutionnel) et à privilégier la création (l’ouverture). Plus que centenaire, c’est sa collaboration de 75 ans avec la radio SWR (Südwestrundfunk) qu’on fête cette année – une impulsion décisive en matière d’expérimentation musicale et de diffusion internationale.

L’ombre (simple) de Pierre Boulez

C’est Anthèmes I, pour violon seul, qui m’attire au premier événement du vendredi – dont je découvre, un peu distrait, l’essentiel du programme en prenant place à la Strawinsky Saal des Donauhallen : une cohorte de discours célébrant l’anniversaire – ma compréhension de la langue allemande étant ce qu’elle est, je me rabats sur le texte anglais contenu dans la bible du festival (un véritable livre de près de 300 pages) et vois ma patience récompensée par un bienvenu entracte entre causeries.

Pierre Boulez est coutumier des transformations et versions multiples de nombreuses de ses pièces – un retravail constant d’un matériel musical jamais définitivement figé, guidé notamment par l’évolution technologique ; ainsi, la partition du (court et réjouissant) Anthèmes I, qui date de 1991, se base sur un fragment de la partie de violon d’…explosante-fixe… et connaît une révision (et augmentation : la longueur de la pièce double) en 1994 à l’IRCAM, sous le titre d’Anthèmes II, version électroacoustique pour violon et électronique en temps réel (ordinateur et six haut-parleurs) – le titre se réfère à la fois au concept de « thème », à « anthem », composition de psaumes et d’hymnes des 16ème et 17ème siècles et au chrysanthème.

La fin des palabres est ponctuée par un avant-goût de la performance du soir (à laquelle je n’ai pas prévu d’assister) de la platiniste Mariam Rezaei, DJ anglaise férue de musiques nouvelles, d’expérimentation et d’improvisation, qui utilise un système digital de platines vinyles (deux ici, quatre à 23 heures) pour manipuler en temps réel un grand nombre de samples – pour l’occasion, des échantillons des archives SWR / Donaueschinger Musiktage : c’est la coloration hip-hop et musique de club qui me repousse.

Retour au Rungis Piano Piano festival : compositrices et raretés mises en avant

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La sixième édition du Rungis Piano Piano Festival, unique en France à se consacrer exclusivement au duo de piano, s’est tenue du 1er au 5 octobre dernier. Cette année, les compositrices et leurs œuvres — trop rarement entendues — y ont occupé une place de choix.

« Girl Power »

La soirée du 2 octobre, intitulée « Girl Power », proposait deux concertos pour deux pianos : l’un de Dana Suesse (1909-1987), surnommée « Girl Gershwin », et l’autre d’Olga Viktorova (né en 1960), au titre aussi curieux que poétique : It all began with Arthur’s shoes.

Connue pour ses chansons populaires, Dana Suesse a pourtant laissé un corpus important d’œuvres dites savantes, dont ce concerto pour deux pianos. Peter Mintun, légataire universel de ces partitions, rappelle que la compositrice, autodidacte en matière d’orchestration, acheva cette œuvre en 1941 dans un style post-romantique teinté de jazz. La musique, fervente, originale et sans affectation, se déploie avec un certain panache : un premier mouvement un peu décousu, un second d’inspiration debussyste, un troisième énergique et jazzy, et un final étonnamment bref. Sous la direction de Julien Leroy, l’Orchestre Colonne met en valeur ces contrastes kaléidoscopiques, même si l’on souhaiterait parfois un peu plus de tempérament et de relief. Les deux pianistes, Ludmila Berlinskaïa et Arthur Ancelle, les directeurs artistiques du Festival, se montrent pleinement engagés, s’adaptant à l’acoustique sèche de la salle et à un orchestre semblant, par moments, quelque peu hésitant.

Dans la seconde partie, Olga Viktorova présente son œuvre sous la forme d’un échange complice avec Arthur Ancelle, expliquant que le titre fait référence à une paire de chaussures lui appartenant, et qu’elle a cherché à brosser le portrait de deux pianistes « doux, joyeux et drôles ». L’humour traverse en effet les trois mouvements — jusqu’à l’usage de marteaux en plastique dans le final — sans pour autant exclure des passages plus introspectifs, telle une fuguette du mouvement central mettant en lumière le basson, le violoncelle et l’alto, avant que les cordes ne prennent le relais dans un épisode plus lyrique. S’il fallait résumer ce concerto en un mot, ce serait : allégresse. Et pour clore la soirée, le duo Berlinskaïa-Ancelle a assumé le ton joyeux du programme jusqu’au bout, en offrant en bis la Danza Gaya de Madeleine Dring.

Renaud Capuçon galvanise la chaleur germanique de l’OPRL

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Ce premier concert de Renaud Capuçon à la tête de l’Orchestre Philharmonique Royal de Liège était une aventure en soi. Trois axes différents en composaient en effet le programme. Le classicisme aérien du Concerto n°4 de Mozart dirigé de son violon était tout sauf une rencontre de routine. Un peu carré dans le premier mouvement, l’orchestre s’abandonne ensuite dans le sillage chaleureux du lyrisme du violoniste français dans l’andante cantabile.

Avant cela, c’est le chef Capuçon qui dirigeait la création mondiale de La nuit n’est jamais complète de Camille Pépin dont le Grand Théâtre de Provence était le commanditaire principal et l’OPRL le co-commenditaire. Le lecteur pourra se reporter sur l’analyse de l’œuvre et l’interview de la compositrice réalisés lors des répétitions liégeoises. En concert dans l’immense véhicule du Grand Théâtre de Provence, la partition s’élargit encore et permet une lisibilité plus chatoyante de l’écriture instrumentale, soulignant maintes interventions solistes des vents et des percussions au milieu d’un matériau orchestrale en frémissement constant. La partition y gagne une continuité suggestive qui fait mouche chez l’auditeur qui ne peut cacher son plaisir face à une proposition orchestrale à la fois concentrée et variée où la motricité de sa force répétitive maintient un tonus permanent.

Florent Albrecht, Mozart en famille et en jeux

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Le 17 octobre dernier, l'Ensemble de L’Encyclopédie dirigé par Florent Albrecht interpréta un programme intégralement Mozart à l'Arsenal de Metz. Un programme Mozart familial, tant parce que les compositions étaient celles du père Leopold Mozart que de son célèbre fils Wolfgang Amadeus, 

Si le génie de Wolfgang Amadeus n'est plus à démontrer, la découverte du talent du père était un des aspects les plus plaisants de cette soirée pour les amateurs, qui ne le connaitrait pas encore. La juxtaposition des œuvres du père et du fils donnait également un sentiment de soirée au coin du feu, avec ce que cela implique d’humour, de partage, et un éclairage intéressant sur la nature joueuse du fils renommé. 

Ne nous le cachons pas non plus, le fait que Florent Albrecht et un nombre de ses musiciens soient messins, contribua à cette atmosphère agréable et plaisante. Mais ce sentiment tenait aussi pour une bonne part aux œuvres de Leopold Mozart, et à la  façon quasi théâtrale de l’Ensemble de L’Encyclopédie de jouer ses œuvres : par exemple en jouant aux invités buvant du champagne dans un coin pour la Promenade en traîneaux

Les compositions de Leopold Mozart ont effectivement bien des qualités, parmi lesquelles celle d'introduire des éléments de réel, comme des coups de fouets, des aboiements, des hennissements ou des rires pour Promenade en traîneaux, afin de nourrir leurs aspects narratifs. Erik Satie,  ne fera pas mieux avec son ballet Parade, mais sans ce fil conducteur illustratif. L'intrusion de la réalité, comme chez Satie, est ici une sorte de jeu comme  un amusement entre soi.

Jaap van Zweden et le Philhar’ : une association prometteuse, sous le signe de l’énergie

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Depuis la fin de la saison dernière, après dix années d’une harmonieuse collaboration avec Mikko Franck à sa tête, l’Orchestre Philharmonique de Radio France n’avait plus de directeur musical. Son successeur avait été désigné, mais seulement à partir de la saison prochaine (laissant celle en cours aux mains de différents chefs invités) : Jaap van Zweden. Il aura alors soixante-cinq ans. En 1979, à l’âge particulièrement précoce de dix-huit ans, il était nommé violon-solo de l’un des plus prestigieux orchestres du monde : celui du Concertgebouw d'Amsterdam (ville où il était né). À l’âge où la plupart de ses collègues en étaient encore à leurs études, il était donc chargé de les mener, et de se faire l’intermédiaire entre eux et les chefs les plus expérimentés de la planète. Il a conservé ce poste pendant près de vingt ans.

Il s’est alors tourné vers la direction d’orchestre. Pendant une quinzaine d’années, il a été à la tête de plusieurs orchestres néerlandais, avant de prendre, en 2012, les rênes de l’Orchestre philharmonique de Hong Kong, ainsi que, parallèlement, ceux de l'Orchestre philharmonique de New York en 2018. Avant d’en être désigné directeur musical, Jaap van Zweden avait bien entendu déjà dirigé l’Orchestre Philharmonique de Radio France. Mais la tournée dans laquelle s’inscrivait ce concert était leur première occasion de se retrouver depuis cette désignation.

Les 25 dans des Amis de l'Orchestre philharmonique de Monte-Carlo

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Les Amis de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo célèbrent leur 25ᵉ anniversaire avec un concert d’exception, symbole d’une fidélité indéfectible entre le public et l’une des phalanges les plus prestigieuses d’Europe.

S.A.S. le Prince Albert II, président d’honneur de l’association, honorait de sa présence cette soirée anniversaire, témoignant de son attachement constant à la vie musicale monégasque.

Le programme devait initialement être dirigé par Zubin Mehta, figure légendaire et partenaire de longue date de l’orchestre. Mais, pour raisons de santé, le maestro a dû renoncer à sa venue en Europe. C’est Lawrence Foster, directeur artistique de l’Orchestre entre 1980 et 1990, qui reprend la baguette. Un retour empreint de souvenirs et d’émotion, tant sa décennie monégasque demeure dans les mémoires comme une période d’ouverture et d’excellence.

À ses côtés, un invité de marque : Maxim Vengerov, l’un des violonistes les plus illustres de notre temps, dont la carrière, commencée sous les projecteurs de l’enfance, s’est muée en un parcours artistique d’une rare profondeur.

Le programme, entièrement consacré à Tchaïkovski, rend hommage à celui qu’on appelle volontiers le roi de la mélodie — un compositeur dont le lyrisme, la sensibilité et la franchise émotionnelle continuent de toucher toutes les générations.

Le concert s’ouvre sur le Capriccio Italien, composé à Rome en 1880. Inspirée par les sonorités populaires italiennes et baignée de lumière méditerranéenne, cette page flamboyante révèle le génie d’un orchestrateur qui savait marier la rigueur de la forme à la spontanéité de la danse.

Tchaïkovski y fait entendre, dès l’introduction, un appel de trompettes — écho au clairon militaire qui le réveillait chaque matin depuis la fenêtre de son hôtel romain. De cette anecdote pittoresque naît une œuvre débordante de vitalité, où les rythmes populaires se fondent dans un éclat orchestral irrésistible.