Crash au Hangar 7 de Salzbourg

par

Wolfgang Amedeus MOZART (1756-1791)
Die Entführung aus dem Serail
Live from Hangar 7- Salzburger Festspiele 26 août 2013
PCM Stereo, DD 5.1, sous titres allemand, anglais, français, espagnol, italien, coréen-16:9-O- 125'+ 27'bonus-DVD 9 NTSC-Arthaus musik 102 183
Désirée RANCATORE Konstanze, Tobias MORETTI Bassa Selim, Javier CAMARENA Belmonte, Rebecca NELSEN Blonde, Thomas EBENSTEIN Pedrillo, Kurt RYDL Osmin, Salzburger BACHCHOR, CAMERATA SALZBURG, Hans GRAF, dir., Adrian MARTHALER, mise en scène, Felix BREISACH, directeur video

Il faut vraiment que Mozart soit un très grand compositeur pour résister au crash -test que lui inflige la mise en scène du cinéaste suisse Adrian Marthaler (frère aîné de Christoph)! On est navré pour les musiciens, les chanteurs, les costumiers, les techniciens qui ont fourni tant d'efforts et réalisé de véritables exploits. Mais ne s'est-il donc trouvé personne pour crier « Halte là ! », pour demander « dans quel but» une telle débauche d'énergie et de talent ? En effet, que voit-on sur cette captation d'une représentation « moderne » de l' « Enlèvement au Sérail » ? Le hangar 7 de l'aéroport de Salzbourg « transformé » nous dit-on en lieu de culture (sic) et « d'expérience sonore ». Avec pour décor des avions historiques, un restaurant-buvette, « onze aires de jeux distincts et éloignés les uns des autres » le programme dixit. Ce qui implique de séparer d'au moins 80 mètres (souvent beaucoup plus) l'orchestre et les interprètes, obligeant les chanteurs à porter sur la joue gauche une sorte de patate jaune -oreillettes et micros ; les « solistes » étant en outre dirigés par des sous-chefs qui suivent sur un moniteur portable les consignes du chef... Dès lors, que la synchronisation soit seulement approximative constitue un petit miracle ! L'idée parallèle de présenter un défilé de mode, éphémère par définition, se condamne en elle-même à l'obsolescence. Tout aussi ringard, le jeu de scène qui fait monter les héros dans un avion ou un hélicoptère... cloué au sol. Quitte à surprendre, il fallait au moins les faire décoller ! Mais non. On reste dans les escaliers, les couloirs, des lounges, un bar où Osmin se laisse enivrer, parmi un rassemblement de machines à coudre pilotées par des soubrettes stéréotypées en noir et blanc vaguement castratrices (pauvre Osmin!). Le public docile fait de la figuration en suivant les uns et les autres d'un air ahuri. Et maintenant, qu'entend-t-on ? Un orchestre plus que terne aux sonorités presque étouffées, dirigé par un chef (Hans Graf) dépassé par les événements et les contraintes. Les chanteurs encombrés de costumes peu seyants (Osmin ressemble à un conducteur de locomotive au XIXème siècle et Constance à un paquet cadeau géant) font des prodiges pour relever les défis techniques. Mais l'irréparable est accompli lorsque les textes du livret de Gottlieb Stephanie rédigés selon les indications de Mozart sont tout simplement « remplacés » dénaturant ainsi gravement la pensée du compositeur. Le Pacha n'est plus cette noble figure humaine capable de se dominer, de renoncer et de pardonner mais un golden boy hystérique et hargneux. Exit l'admiration de Mozart pour les idéaux maçonniques. Exit toute ombre de transcendance. Au fait, combien a coûté cette désolante plaisanterie à l'aéroport de Salzbourg et qui l'a financée ?
Bénédicte Palaux Simonnet

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