Du sang, de la volupté et de la mort

par
Salomé

Richard STRAUSS
(1864 - 1949)
Salomé
Emily MAGEE (soprano), Peter BRONDER (ténor), Michaela SCHUSTER (mezzo-soprano), Wolfgang KOCH (baryton), Benjamin BRUNS (ténor), Claude EICHENBERGER (mezzo-soprano), Frankfurt Radio Symphony, dir. : Andres OROZCO-ESTRADA
DDD–2017–62’ 40’’ et 50’ 22’’–Textes de présentation et livret en allemand et anglais–Pentatone PTC 5186 602
Le 9 décembre 1905, la création de Salomé à l’Opéra royal de Dresde devait avoir sur plusieurs critiques « un effet vraiment révoltant », ainsi que le rapporte Joseph Gregor dans son Richard Strauss, un essai très personnel dont la traduction française a paru en 1942. Pour certains, le drame d’Oscar Wilde, à partir duquel le compositeur bavarois a bâti son œuvre, était tellement achevé que « l’intervention » de la musique n’avait pu que lui nuire. Ils avaient même parlé d’« anéantissement » pur et simple et crié à une « trahison » inadmissible. Pour d’autres, cette « production dramatico-musicale » en un acte était destinée à n’avoir de toute façon qu’une « vie éphémère », vu qu’elle lui manquait une chose essentielle : « la valeur d’éternité ». Elle leur avait d’ailleurs paru « burlesque », avec des chants gorgés de « fleurs de rhétorique » et un ensemble orchestral par trop abondant (cent vingt musiciens, il est vrai) – une « hystérie ». Certains de ces critiques étaient même allés jusqu’à traiter Richard Strauss d’artiste libidineux, attiré par un érotisme « putride ». Dans son livre, Joseph Gregor dit toutefois que la grande majorité des mélomanes présents à la création de Salomé avaient été, eux, « sous le charme » et que les plus enthousiastes n’avaient pas hésité à la comparer à celle du Crépuscule des dieux de Richard Wagner à Bayreuth, en 1876, sous la direction de Hans Richter.
« Sous le charme », les amateurs le restent toujours, chaque fois qu’ils assistent à une représentation de Salomé ou qu’ils l’écoutent, et peut-être précisément, paradoxalement, parce que l’opéra est nourri de sang, de volupté et de mort, comme le dirait Maurice Barrès, et qu’en cela, il est bel et bien hystérique. Cette musique et ce chant hystériques, on les retrouve intacts, presque frustes et crus, dans l’interprétation qu’en a donnée le Frankfurt Radio Symphony dirigé par Andres Oeozco-Estrada, avec entre autres Emily Magee, Wolfgang Koch, Petrr Bronder, Michaela Schuster et Banjamin Bruns dans les principaux rôles. Un enregistrement live du 10 septembre 2016 à l’opéra de Francfort, un des bastions actuels du théâtre lyrique allemand.
Jean-Baptiste Baronian

Son 8 – Livret 7 – Répertoire 10 – Interprétation 9

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