Emmanuel Hocdé se penche sur la superbe Symphonie « mariale » du chanoine Fauchard

par

Auguste Fauchard (1881-1957) : Symphonie no 3 « Mariale » ; Le Mystère de Noël. Emmanuel Hocdé, orgue. Livret en français, anglais. Février 2021. TT 55’26. CIAR Classics CC 013

Ténue, la discographie d’Auguste Fauchard se résume principalement à deux organistes. Friedhelm Flamme grava les deux premières symphonies en 1994 (Fermate) et 2002 (IFO, à la cathédrale de Laval, dans la ville d’attache du compositeur), couplées chaque fois avec Le Mystère de Noël qu’il réenregistra pour CPO avec les quatre symphonies. Et Emmanuel Hocdé qui en 2010 avait déjà confié à Hortus la première mondiale sur disque de la quatrième symphonie dite « eucharistique », avant de nous revenir avec cet album capté sur l’orgue de l’église parisienne Saint-Denys-du-Saint-Sacrement dont il est titulaire adjoint.

Contemporain de Gustave Charpentier, Guy Ropartz, Charles Koechlin, Florent Schmitt, et Charles Tournemire, Auguste Fauchard partagea sa vie entre foi et musique, délaissant le Conservatoire de Paris pour se consacrer à sa vocation sacerdotale. Après la première Guerre mondiale, son parcours s’accéléra dans les années 1920 : élève de Louis Vierne et Vincent d’Indy à la Schola Cantorum, avant d’être honoré comme chanoine honoraire de la cathédrale de Laval. Sa notoriété de prêtre-organiste dépassa la provinciale Mayenne, grâce à de nombreux récitals et inaugurations, et grâce à un recueil de Souvenirs qui documentent le métier et son contexte dans la France du premier XXe siècle. Il reçut des mains de Marcel Dupré les insignes de Chevalier de la Légion d’honneur en 1954, peu avant son ultime concert, à Bordeaux.

Son style se ressent de Vierne, Widor, mais évoque aussi Tournemire dans l’usage de matériau grégorien. Ainsi dans la Symphonie no 3 dite « Mariale », construite sur des motets ou hymnes à la Vierge (les quatre parties sont présentées dans le livret). Les huit sections du Mystère de Noël (thème et sept variations de circonstance) se déclinent sous forme de chorals inspirés du Jesu Redemptor omnium.

Initialement édifié par la maison Daublaine-Callinet en 1839 et reconstruit par Cavaillé-Coll en 1867, l’instrument situé dans le troisième arrondissement de la capitale parisienne compte aujourd’hui trente-huit jeux ; une disposition de transition sur une base classique. À la cathédrale de Laval, sur le petit orgue qu’avait installé le jeune Aristide en 1853, Fauchard disposait d’une palette de registration qui n’était certes pas plus abondante. Ces ressources relativement congrues, à comparer aux soixante-trois jeux du Schuke de la Heilig-Kreuz-Kirche de Detmold employé par Friedhelm Flamme, n’autorisent pas la débauche de couleurs mais servent la clarté du propos, dans une veine néoclassique.

D’autant que l’interprétation d’Emmanuel Hocdé se distingue par sa haute intelligibilité, jusque dans les passages les plus touffus. À cet égard, on regrette seulement que l’acoustique assez mate ne vienne asseoir la véritable grandeur qui s’élève de pages comme la Pièce symphonique, laquelle aurait mérité réverbération plus avenante pour laisser résonner le commerce entre les trois thèmes musicaux. On félicite en tout cas le Centre International Albert Roussel et l’Association Boëllmann-Gigout d’avoir contribué à la production de ce disque, digne contribution à la redécouverte du Chanoine Fauchard.

Son : 9 – Livret : 8,5 – Répertoire : 9 – Interprétation : 9

Christophe Steyne

 

 

 

 



Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.