Giuseppe Porsile avec l'ensemble La Cicala
Giuseppe Porsile (1680-1750) : Cantates pour soprano. Stefanie True, soprano - Ensemble La Cicala, direction Inês d’Avena. 2019. Livret en anglais. 69.5. Passacaille 1061.
Le nom de Giuseppe Porsile n’est pas parmi les plus familiers aux oreilles des mélomanes, même si l’on retrouve l’une ou l’autre de ses compositions dans des parutions autour de la musique napolitaine chez Ramée ou Cyprès, ou à la fin du siècle dernier, chez René Gailly. Ce fils de musicien, né à Naples et décédé à Vienne, a été au service du Roi d’Espagne Charles III à Barcelone. Lorsque ce dernier, grand mélomane, a été intronisé en qualité d’Empereur dans la capitale autrichienne sous le nom de Charles VI après avoir renoncé à la couronne d’Espagne, Giuseppe Porsile a continué de faire partie de sa maison, en qualité de professeur de chant de l’épouse du souverain. Johann Joseph Fux, puis Antonio Caldara y occupant de hautes fonctions musicales, il n’a été nommé compositeur de la Cour qu’à partir de 1720, et y a terminé sa carrière. Il est l’auteur d’un grand nombre de partitions pour la scène, de plus d’une dizaine d’oratorios, de pièces instrumentales et vocales, dont des messes et des cantates. Le très documenté livret en anglais, dû au Dr Lawrence Bennett, s’étend sur la carrière de Porsile ainsi que sur les publications de ses œuvres dont des sources remontent jusqu’au Conservatoire de Bruxelles.
L’introduction du livret, sous la plume d’Inês d’Avena, nous apprend que le poignant aria Alla sorte che m’era si dura, un largo de la dernière cantate du CD, a été le point de départ d’un travail approfondi par la signataire à partir de 2003, qui l’a conduite à l’élaboration du programme, intitulé « Mannaggia Amore ». On lira toutes ces considérations musicologiques avec grand intérêt, et l’on pourra suivre les textes chantés, traduits aussi en anglais. Enregistré en mai de cette année, ce disque est constitué de pièces vocales et instrumentales (dont une brève et délicate sonate pour flûte seule) qui donnent une image représentative de l’art du compositeur s’étalant sur plusieurs décennies et de son goût affiné pour les accents légers ou élégiaques, mais aussi pour les galanteries et les aspects « coquins » de l’amour. Il s’agit pour la plupart de premières discographiques.
L’ensemble La Cicala, qui porte le nom d’un insecte de la famille des cigales que les anciens Grecs considéraient comme des messagers des Muses, a été fondé en 2011 et se consacre essentiellement à la redécouverte du répertoire baroque napolitain. Dirigée par Inês d’Avena, qui officie à la flûte (originaire de Rio, elle a notamment fait partie de l’Amsterdam Baroque Orchestra de Ton Koopman), cette formation de cinq musiciens compte à son actif deux autres CD, chez le même éditeur, bien accueillis par la presse. Quant à la soprano Stefanie True, d’origine canadienne, elle est venue, après Toronto, poursuivre ses études en Hollande, à La Haye, auprès de Barbara Pearson ou Michael Chance. Elle s’est produite dans des partitions de Haendel, Vivaldi ou Bach et a travaillé notamment avec Vox Luminis. La musique de Porsile agit sur l’auditeur par une séduction délicate, d’autant plus que Stefanie True possède une voix raffinée, pour ne pas dire aérienne, avec des inflexions subtiles, qui se marient idéalement avec la prestation des instrumentistes qui font preuve de finesse. Porsile est un compositeur qui mérite plus qu’un détour, avis aux amateurs !
Son : 9 Livret : 9 Répertoire : 8 Interprétation : 10
Jean Lacroix