Henze à travers le temps 

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Hans Werner Henze (1926-2012) : Nachtstücke und Arien, Los Caprichos, Englische Lieder. Juliane Banse, soprano ; Narek Hakhnazaryan, violoncelle ; ORF Vienna Radio Symphony Orchestra, Marin Alsop. 2020. Livret en anglais. 67’23. Naxos. 8.574181. 

Quelques semaines après un tonitruant album consacré à des oeuvres de Paul Hindemith, Marin Alsop et son orchestre radio symphonique de Vienne consacrent une nouvelle parution à des partitions avec orchestre de Hans Werner Henze. 

Compositeur prolifique actif dans de nombreux domaines, Hans Werner Henze présente une oeuvre riche de tant de merveilles magnifiées par une écriture virtuose et puissante autant à l’aise dans le domaine orchestral que dans le domaine lyrique. Marin Alsop et ses Viennois font le choix de proposer trois œuvres qui illustrent bien les facettes et l’inspiration du compositeur allemand. 

Le parcours commence avec Nachtstücke und Arien, partition qui marquait l’abandon des principes du dodécaphonisme qui fut un temps le compagnon de Henze. Créée au festival de Donaueschingen en 1957 sous la direction de Hans Rosbaud, l'œuvre fit déguerpir du public les tutélaires de la modernité radicale, Boulez, Nono et Stockhausen.  Composée pour soprano et grand orchestre sur des poèmes d'Ingeborg Bachmann, cette pièce présente une beauté froide et expressive, presque post-bergienne par ses climats sombres et son mélodisme saillant. Marin Alsop dirige avec retenue et sens du théâtre ces Nachtstücke und Arien, elle est parfaitement secondée par la soprano Juliane Banse, rompue à ce répertoire. Cette nouvelle version égale celle déjà superlative de Claudia Barainsky et Markus Stenz au pupitre du Gürzenich de Cologne (Capriccio). 

Inspirée par la série de gravures de Goya, Los Caprichos (1963) est une évocation subtile et engagée de cette réalisation du peintre espagnol marquée par une forte symbolique de satire sociale, préoccupation qui rencontrait alors le militantisme de Henze aux côtés de la gauche radicale. Tout est acide et grinçant sous la direction narrative et presque cinématographique de la cheffe d’orchestre.  

Le violoncelle est un instrument qui est proche de la voix humaine et il n’est pas étonnant qu’il occupe une place dans l’oeuvre concertante de Henze, si doué pour l'opéra, dont il faut citer le superbe chant de Ode an den Westwind. On retrouve toute l’acuité d’inspiration du compositeur dans les 6  Englische Lieder composés en 1984/85, transposition musicale de poèmes anglais de styles et d’époques différentes. L’excellent Narek Hakhnazaryan est un narrateur engagé et tant profond que goguenard de ces textes transposés au violoncelle. Cette lecture est plus humaniste et moins analytique que celle pourtant excellente d’Anssi Karttunen et d’Oliver Knussen au pupitre du BBC Symphony Orchestra (Wergo). 

Cet album est une nouvelle réussite d’un tandem artistique des plus prometteurs tant par les choix de répertoire que par l’excellence musicale. 

Son 10 - Livret 8 - Répertoire 10 - Interprétation 10

 

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