Il était une fois...

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Récital d'airs et de duos de Massenet, Offenbach, Isouard et autres...
Aux côtés de la redécouverte d'opéras méconnus comme cette Olympie de Spontini au Théâtre des Champs-Elysées ce 3 juin (voir critique dans nos colonnes), ou l'impressionnante brochette prévue pour la saison prochaine (Le Timbre d'argent et Proserpine de Saint-Saëns, La Reine de Chypre d'Halévy), le Palazzetto Bru Zane présente aussi de petites soirées, à l'écoute d'un répertoire plus intime. Ainsi ce spectacle placé sous le cadre du conte de fées, monté au Théâtre des Bouffes du Nord, et donné par deux chanteuses et un quatuor avec piano. Sur la scène, meublée par un piano, un peu en retrait, deux fauteuils, trois chaises et quelques livres, Jodie Devos et Caroline Meng, accompagnées par le Quatuor Giardini, ont enchanté un public très nombreux durant une bonne heure et demie. La soirée était divisée en trois parties, "Insouciance", "Mélancolie" et "Réjouissances", groupant chacune airs et duos lyriques, chaque fois introduits par une pièce de musique de chambre. Les morceaux s'enchaînaient l'un à l'autre, et les musiciens célèbres et peu connus alternaient. Ainsi, le premier mouvement d'un quatuor avec piano de Fernand de la Tombelle précédait deux pages d'illustres obscurs (Charles Silver et Laurent de Rillé) mais aussi de célébrités (Offenbach et Nicolo (Isouard). Et l'on passait de La Belle au bois dormant à Barbe-bleue, du Petit Poucet à Cendrillon. La seconde partie était introduite par l'admirable et très parsifalien mouvement lent du Quatuor op. 30 de Chausson, suivi de deux airs de Rossini et de Pauline Viardot, puis d'inénarrables couplets de l'opérette La Saint-Valentin d'un certain Frédéric Toulmouche, qui ont déridé tout le monde. Avec le final, "Réjouissances", on rejoignait un monde plus familier. Après l'amusante valse de concert Pippermint-Get de Déodat de Séverac, dans un arrangement du maître de jeu, Alexandre Dratwicki, la soirée s'est terminée par le splendide duo entre le Prince Charmant et Cendrillon de l'opéra de Massenet, l'exorde initial des Hazards de Florent Schmitt donné avec force par le quatuor Giardini, et enfin trois extraits du Voyage dans la Lune et de La Fille du Tambour-Major d'Offenbach. Cerise sur le gâteau, un bis délectable : un duo extrait de La Demoiselle du Téléphone de Gaston Serpette, qui concluait la soirée avec cette pensée d'une rare profondeur : "Si vous aimez, n'en dites rien, on vous aimera davantage". Les deux chanteuses ont ravi le public, conquis par leur enthousiasme, leurs rires et leurs prouesses vocales. Jodie Devos s'est particulièrement distinguée par son impeccable diction et de superbes aigus filés qui ont fait merveille dans l'air de la fée de Massenet, baguette magique comprise : voilà un rôle écrit pour elle ! Caroline Meung, au mezzo corsé, impressionnait dans l'air d'Isabelle de L'Italienne à Alger, chanté en français, avant de se relâcher dans les couplets de Toulmouche : "Le flirt ? oh ! Passe-temps charmant !" Un CD de cette soirée est prévu chez Alpha Classics.
A noter que ce genre de spectacle tourne dans toute la France, avec d'autres interprètes et un répertoire parfois différent, mais suivant le même principe. Un grand bravo !
Bruno Peeters                     
Paris, Théâtre des Bouffes du Nord, le 4 juin 2016

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