Ippolitov-Ivanov, musique en cartes postales

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Mikhail IPPOLITOV-IVANOV (1859-1935) : Esquisses caucasiennes, suites n° 1 op. 10 et n°2 op. 42 ; Rhapsodie arménienne op. 48 ; Prélude de l’opéra « Ruth » ; Marche turque op. 55. Transcriptions pour piano à quatre mains. Maria Ivanova et Alexander Zagarinskiy, piano. 2019. Livret en allemand et en anglais. 54.21. Hänssler HC19039.

A part la première Suite Esquisses caucasiennes et son majestueux Cortège final, qui pourrait citer les titres d’autres partitions d’Ippolitov-Ivanov, qui fit précéder son patronyme « Ivanov » de celui de sa mère pour qu’on ne le confonde pas avec un critique musical du temps ? Sa production, qui connaît le sort de celle de maints créateurs du temps, celui de l’indifférence, en tout cas dans le monde occidental, mérite mieux que l’oubli, en raison de l’exotisme qu’il introduit dans ses créations. Né à Gatchina, cité située à 45 kilomètres de Saint-Pétersbourg, Ippolitov-Ivanov étudie la composition avec Rimsky-Korsakov ; il est aussi contrebassiste. Nommé professeur puis directeur de l’Ecole de Musique de Tiflis dans le Caucase, il s’intéresse aux traditions de la musique de la région, comme il le fera pour des thèmes arméniens, géorgiens, finlandais, turcs ou de l’Ouzbékistan, apportant ainsi à son inspiration une grande diversité. Son ami Tchaïkowski, conscient de ses dons, conseille de le nommer au Conservatoire de Moscou où il aura notamment pour élèves Glière et Vassilenko. Il prend un moment la direction du même Conservatoire avant de se tourner vers la direction d’orchestre. On le retrouve au Bolchoï en 1925. Il a créé trois opéras de Rimky-Korsakov : La Fiancée du Tsar, Le Conte du Tsar Saltan et Katscheï l’immortel. On lui doit aussi la réorchestration du tableau devant la cathédrale Saint-Basile de la première version de Boris Godounov ainsi que l’achèvement et l’instrumentation du Mariage, deux partitions de Moussorgski. Ippolitov-ivanov est lui-même l’auteur de six opéras -dont La Trahison, créé en 1910, connut un certain retentissement- d’œuvres pour orchestre, de musique de chambre et de musique vocale. Tout cela n’est guère disponible en dehors des Esquisses caucasiennes qui sont souvent sur CD un complément de programme. Sa Symphonie n°1, de belle facture, parue chez Naxos, a cependant ouvert la porte à un intérêt qui devrait se faire plus curieux. 

Le CD qui nous occupe est donc utile, même s’il s’agit de transcriptions pour piano à 4 mains et même si, une fois de plus, le plat de résistance consiste en ces fameuses Esquisses caucasiennes au caractère folklorique dansant et enlevé, certes, mais dont l’orchestre révèle mieux le côté festif. Le duo qui nous les offre, formé en 2004, est originaire de Moscou ; il a étudié au Conservatoire Tchaïkowski, puis à Berlin, à Salzbourg et à Lübeck. Une des caractéristiques de leur répertoire est de réaliser des transcriptions d’œuvres symphoniques de compositeurs russes. Dans cet enregistrement de mars 2019, ils nous donnent accès au « tube » d’Ippolitov-Ivanov dont ils soulignent le rythme, la couleur locale, le lyrisme souvent sentimental et l’inventivité avec enthousiasme. Ce dernier les entraîne pourtant de temps à autre à frapper le clavier sans ménagement (la prise de son va un peu dans ce sens), négligeant parfois la finesse et la fraîcheur qui se trouvent dans la Rhapsodie arménienne ou l’originalité épique de la Marche turque. 

Son : 7  Livret : 7  Répertoire :  7 Interprétation : 6

Jean Lacroix  

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