La parfaite synthèse du génie de Leonard Bernstein

par
Mass

Leonard BERNSTEIN
(1918 - 1990)
Mass
Kevin VORTMANN (ténor), solistes, Westminster Symphonic Choir, Temple University Concert Choir, The American Boychoir, Temple University Diamond Marching Band, The Philadelphia Orchestra, dir.: Yannick NEZET-SEGUIN
2018-Live- 53' 22'' et 54' 23''-Textes de présentation en anglais, allemand et français-chanté en latin, en anglais et en hébreu-Textes chantés inclus-2 CD DG 483 5009

Le centenaire de la naissance de Bernstein est bien fêté. Pour prendre deux exemples, DG sort un très gros coffret de ses interprétations, et Naxos publie l'ensemble des enregistrements de Marin Alsop. En fait "Lenny" n'a jamais connu de purgatoire, tant comme chef que comme compositeur. Il est très présent sur You Tube, et les CD et DVD s'enchaînent. C'était un artiste fascinant, au charisme rare. Il a touché à tous les genres, a tâté de tous les styles. Cette Mass peut être considérée comme une oeuvre emblématique : elle reflète à la perfection cet aspect éclectique, essentiel à la personnalité de Bernstein. Commandée pour l'inauguration du John F. Kennedy Center for the Performing Arts de Washington, elle fut créée en 1971. Bernstein avait le choix de la forme, et opta pour la messe, révélant sa soif spirituelle. Le canevas général suit le déroulement liturgique, du "Kyrie" à l'"Agnus Dei" et la communion, mais ces moments officiels sont entrelardés d'interludes orchestraux, intitulés "Méditations" (la 3ème est remarquable), et de textes profanes, politiques même : c'était l'époque de la théologie de la libération, de la guerre du Viêt-Nam aussi, période foisonnante, riche et déconcertante, que la Mass reflète on ne peut mieux. Elle n'est pas écrite d'une traite, comme d'autres pages similaires : le War Requiem de Britten, A Child of our Time de Tippett, ou The Beatitudes d'Arthur Bliss. Elle suit les hésitations de son auteur, ses élans comme ses peurs, ses folies comme ses apaisements. Voilà pourquoi, contrairement aux oeuvres citées, elle ne ralliera jamais l'unanimité. Voilà pourquoi, aussi, elle se révèle si humaine et si passionnante. Le ténor, qui endosse le rôle du célébrant (le prêtre qui dit la messe), a un rôle central. Fil conducteur de toute l'oeuvre et intervenant souvent, il devient fou dans l'avant-dernière partie ("Fraction") : le voilà qui casse le calice, brise les croix et - oui ! - danse sur l'autel. Cette scène fit scandale à l'époque. Kevin Vortmann domine bien sa partition, dès son "Simple song" initial, très musical. Et sa longue scène de folie, bien articulée, constitue une véritable performance musicale et dramatique (admirable "Oh, I suddenly feel"). Les multiples choeurs, à l'avant-plan, brillent partout, et tout le temps, dans le Gospel-Sermon, par exemple, dans le joyeux "Sanctus" (chanté en hébreu) ou dans l'exaltant et très bernsteinien "Dona nobis pacem". Nézet-Séguin s'y montre parfait, excité, nerveux, dansant. Le plus beau moment arrive tout à la fin : entrée de la flûte, puis du treble, et, petit à petit, des autres solistes, qui, tout doucement, entament l'immense gradation de la mélodie finale "Lauda, Laude, Laudate Deum". L'émotion est là. Oeuvre hétéroclite donc, on le sait, mais foisonnante, et richissime. L'interprétation des forces philadelphiennes de Yannick Nézet-Séguin respecte cette diversité stylistique, qui fait sa richesse, son intérêt, et sa beauté.
Bruno Peeters

Son 10 - Livret 9 - Répertoire 10 - Interprétation 10

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