Le luth enchanteur de Thomas Dunford

par

Johann Sebastian BACH (1685-1750) : Suite pour violoncelle n° 1 en sol majeur – Suite pour luth en sol mineur (arrangée par Bach d’après la suite pour violoncelle n°5 en do mineur) – Chaconne de la Partita pour violon n°2 en ré mineur . Thomas Dunford (luth).2018 – 56’16’’ – Textes de présentation en français, anglais et allemand – Alpha 361

Au début du 18e siècle, alors que le luth, instrument-roi pendant les deux siècles précédents, tombe en désuétude dans l’Europe entière, supplanté par le clavecin, il brille de ses derniers feux en Allemagne. On y trouve encore quelques luthistes virtuoses, comme Johann Kropfgans ou le célèbre Sylvius Leopold Weiss. C’est peut-être leur présence qui amena Jean-Sébastien Bach, exact contemporain de ce dernier, à composer sept pièces pour luth seul, dont la moitié sont en fait des arrangements d’œuvre préexistantes pour d’autres instruments. Parmi celles-ci, une transcription de la 5e Suite en do mineur pour violoncelle seul, la plus polyphonique des six, transposée en sol mineur pour l’occasion. 

Thomas Dunford, étoile montante du luth français, en fait ici la pièce centrale de son troisième disque. Il la fait précéder de la 1e Suite du même recueil, l’adaptant à son instrument, comme Bach, en ajoutant des basses ou des accords et en changeant certaines lignes mélodiques. Ces Suites pour violoncelle, prisées par de nombreux et divers instruments, de l’alto au marimba en passant par le tuba, avaient déjà fait l’objet d’une transcription complète au luth en 2013 par Hopkinson Smith, luthiste américain et professeur de Thomas Dunford à la Schola Cantorum de Bâle. 

Thomas Dunford en propose néanmoins une interprétation très différente. Dès les premières notes du prélude de la 1e Suite, un legato impressionnant pour un instrument à cordes pincées se déploie dans une sonorité magnifique, chaleureuse et douce, amplifiée par l’acoustique exceptionnelle de la Salle de musique du Théâtre Populaire Romand de La Chaux-de-Fonds. Si les préludes et les sarabandes sont de pures merveilles, les mouvements de danses plus rapides paraissent un peu lisses, faisant regretter un instant le mordant et le rebond de Hopkinson Smith. Les graves, bien posés et résonnants, nous font entendre de nouveaux chemins de basses. 

La chaconne de la 2e Partita pour violon seul, elle aussi fréquemment arrangée pour d’autres instruments, clôture magistralement l’album. Par une construction très bien pensée, Thomas Dunford parvient à maintenir la tension jusqu’à la fin, toujours avec cette qualité de timbre qui fait le charme de l’album. 

Un disque à recommander chaudement, particulièrement aux violonistes et violoncellistes qui découvriront un nouveau visage à ces œuvres si souvent jouées.

Aline Masset, reporter de l’IMEP

 

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