Le monde pianistique de Leoš Janáček par Jan Bartoš
Leoš Janáček (1854-1928) : De la rue : 1er octobre 1905–Sur un sentier envahi d’herbes (première et deuxième séries)–Dans les brumes–Thème et variations–Réminiscence. Jan Bartoš (piano). DDD–2019–75’ 36’’–Textes de présentation en anglais, allemand et français–Supraphon SU-4266-2
Leoš Janáček étant d’abord et avant tout perçu comme un compositeur d’opéras, un des plus importants, à coup sûr, de la première moitié du XXe siècle, on ignore trop souvent qu’à ses débuts, il a aspiré à une carrière de pianiste virtuose et qu’au cours des années 1870, à Brno où il était venu s’établir à l’âge de onze ans, il était déjà devenu un exécutant des plus habiles. Mais il s’est bientôt tourné vers la composition et, tout naturellement, les premières pièces qu’il a écrites sont dévolues au piano (dont Thème et variations à laquelle il a lui-même attribué le numéro d’opus 1). La plupart d’entre elles sont très marquées à cette époque par Robert Schumann et Félix Mendelssohn-Bartholdy, alors que celles qu’il donnera à partir des années 1900 le seront, peu ou prou, par Claude Debussy. Ce qui a fait parfois dire à certains spécialistes que Leoš Janáček est un impressionniste slave.
Il convient toutefois de constater, comme le montre le présent CD, qu’il y a dans ses œuvres pour piano seul un ton, une musicalité à la fois suave et sombre, exquise et grave, qui n’appartient qu’à lui, qu’à son univers propre et, somme toute, qu’à sa psychologie personnelle. Le musicologue Jiri Zahradka a d’ailleurs raison de reconnaître qu’il est incapable d’imaginer la musique de Leoš Janáček « sans un contexte psychologique ». « Quand il composait, souligne-t-il, [il] avait toujours un besoin essentiel de dire quelque chose qui le préoccupait. » Et de préciser que selon lui, « l’approche psychologique » constitue un « postulat de base de son langage musical ». Entre 1900 et 1912, les années durant lesquelles il a écrit les superbes pièces réunies ici, Leoš Janáček a ainsi dû faire face à la maladie et à la mort de sa fille Olga, au refus du Théâtre national de Prague de monter Jenufa et aux nombreuses difficultés pour mener à bien Osud.
La beauté de ce disque doit énormément au pianiste tchèque Jan Bartoš . Est-ce parce qu’il est natif de Brno, qu’il en a intégré le cadre et l’atmosphère si moraves, et qu’il s’est comme fondu dans l’intimité, dans l’âme, de son illustre compatriote ?
Son 9 – Livret 9 – Répertoire 10 – Interprétation 9
Jean-Baptiste Baronian