Premier concert parisien de Musicus Soloists Hong Kong à la Salle Gaveau
Le 16 novembre dernier, l'orchestre à cordes Musicus Soloists Hong Kong (MSHK) a fait ses débuts sur la scène parisienne. Fondé en 2022 sous l’impulsion du violoncelliste Trey Lee qui assure la direction artistique, cet ensemble s'engage à promouvoir des collaborations entre artistes locaux et internationaux tout en soutenant les jeunes talents musicaux de Hong Kong. Ce premier concert à Paris marque une étape significative dans la réalisation de ces perspectives.
Le programme du concert, résolument éclectique, mêle des œuvres de Rameau, Vivaldi, Milhaud et Bartók, avec pour pièce maîtresse la création mondiale d’Umbra, un double concerto pour violoncelle, ondes Martenot et orchestre à cordes, signé par la compositrice Seung-Won Oh. Dans cette œuvre, chaque séquence repose sur une formule jouée par les cordes, souvent constituée de motifs rythmiques répétitifs. Ces fondations mettent en valeur le violoncelle, les ondes Martenot, ou les deux instruments ensemble, qui émergent avec des lignes mélodiques linéaires, proposant des contrastes saisissants avec le reste de l’orchestre. La composition progresse par superposition de ces motifs et de lignes de solo, qui évoluent progressivement avant qu’une nouvelle formule n’apparaisse pour initier un chemin similaire. Si la compositrice parvient à conjuguer avec finesse les deux instruments solistes -un clin d’œil au fait que Maurice Martenot, l’inventeur des ondes Martenot, était lui-même violoncelliste-, l’écriture reste cependant prévisible, sans offrir de véritables surprises, même si ce n’est probablement pas l’intention première de l’œuvre. Sur le plan de l’interprétation, le lyrisme de Trey Lee se marie harmonieusement avec le timbre surnaturel des ondes Martenot, interprétées par la Française Nadia Ratsimandresy. Les deux forgerons du son au jeu inspiré rendent le plus beau des arabesques musicales de leurs parties. Cependant, dans certains passages, le violoncelle se trouve parfois couvert par les ondes, sans doute à cause d’un réglage technique du son électronique.
Le programme comprenait également une autre œuvre contemporaine, présentée en création française : Sampling Tea pour violon, alto et pipa (luth chinois) composé par Willis Wong. Dans cette pièce, le dialogue entre les trois instruments -deux cordes frottées d’origine occidentale et un instrument asiatique à cordes pincées- se révèle à la fois surprenant et empreint de fraîcheur. L’œuvre gagne en relief grâce à une variété de combinaisons et de techniques instrumentales, offrant une expérience sonore originale et vivante.
Les deux œuvres baroques au programme -le Concert en sextuor n° 5 de Rameau et le Concerto pour quatre violons en ré mineur, RV 580 de Vivaldi- ont été interprétées dans une esthétique qui pourrait être considérée comme héritière du romantisme du siècle dernier, caractérisée par un son dense, large et riche.
En conclusion du concert, l’Octuor de Milhaud -une œuvre combinant les Quatuors n° 14 et 15, conçus pour être joués simultanément- ainsi que les Danses roumaines de Bartók, semblaient mieux convenir au tempérament de l’ensemble. Ces pièces ont permis à l’orchestre de déployer toute sa vivacité, soutenue par une articulation rythmique d’une grande précision et d’un éclat remarquable.
Le choix des œuvres illustre clairement l’ambition de l’ensemble, qui aspire à une polyvalence musicale en mêlant styles, époques et influences culturelles. Cependant, un bémol notable réside dans l’organisation du programme. En effet, chaque pièce nécessitait des changements de plateau plus ou moins importants, ce qui a perturbé le rythme général du concert et atténué quelque peu sa fluidité.
Paris, Salle Gaveau, le 16 novembre 2024
crédit photographique : Courtesy of Musicus Society © 4kmediastudiohungary