Tiède oratorio de la Passion, replanté dans son berceau de l’abbaye de St. Florian

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Franz Joseph Aumann (1728-1797) : Passionsoratorium. Alois Mühlbacher, altus (Die Hoffnung). Markus Miesenberger, ténor (Die Liebe). Alexandre Baldo, basse (Der Sünder). Fabio Alves Pereira, Kendrick Nsambang, soprano (Der Glaube). Laurenz Oberfichtner, Valentin Werner, soprano (chœur). Ars Antiqua Austria. Gunar Letzbor, Peter Aigner, violon, alto. Nina Pohn, Mira Letzbor, violon. Jan Krigovski, violone. Erich Traxler, orgue. Mars 2023. Livret en allemand, anglais ; paroles en allemand. Digipack deux CDs 55’19’’ + 56’41’’. Accent ACC 24405

Formé à Vienne, ordonné prêtre dans l’Ordre des Augustins, Franz Joseph Aumann laisse un abondant catalogue de musique sacrée, qui alimenta le répertoire de l’abbaye de St. Florian, resté en usage tout au long du XIXe siècle. Anton Bruckner s’en instruisit. Après deux albums consacrés à un Requiem (Pan Classics, 201) et à de la musique instrumentale (Challenge, 2021), Gunar Letzbor nous propose un des quatre oratorios de la Passion que l’on prête au compositeur autrichien. Archives des abbayes de St. Florian, de Schlägl, exploration du catalogue RISM : c’est avec une sagacité de détective que Gunar Letzbor a persévéré pour ramener au jour ce Passionsoratorium. Au terme de ses recherches, une copie lui fut providentiellement adressée par le Dr. Karin Schamberger, bibliothécaire de la Benediktinerstift d’Admont. Après cette exhumation, l’œuvre a fait l’objet de cet enregistrement. Le lendemain des sessions, elle fut sitôt donnée en concert, au Brucknerhaus de Linz, et elle était encore à l’affiche de l’église collégiale d’Admont en mars 2024.

En l’état, il s’agit en langue allemande d’un rare exemple de Passion répondant au culte catholique, bien plus rare que dans le giron protestant, tel qu’il en émergea dans l’empire des Habsbourg. À ce titre : une intéressante révélation. En mars 2012, l’équipe d’Ars Antiqua Austria s’était déjà penchée sur un autre spécimen, l’Oratorium Germanicum de Passione Domini de Johann Joseph Fux (Pan Classics). Dans le contexte de l’humanisme et de l’Aufklärung, le livret ne puise pas directement aux Évangiles, mais cultive son impact émotionnel en illustrant les états d’âme d’un pécheur face à des personnages allégoriques : l’amour, l’espérance, la foi.

La notice signée de Gunar Letzbor accorde quelques lignes à l’approche interprétative, rappelant que la partie soprano, peu exigeante, était confiée à un garçonnet, tandis que la tessiture altus relève d’une voix adulte, expliquant son surcroît de virtuosité. Plutôt que des considérations, peu claires, sur le rôle du violone au sein de la nomenclature instrumentale, cette notice aurait mérité d’expliquer que le format chambriste ici employé correspond aux limitations croissantes de l’abbaye de St. Florian telles que les connut Aumann après sa nomination de « Regens Chori » en 1755, un poste qu’il conserva jusqu’à sa mort. L’effectif à sa disposition ne dépassait pas une poignée de cordes et de chanteurs, dont les enfants, ce qui correspond aux moyens congrus mais légitimes qu’utilise cet enregistrement.

Pour autant, le frêle rôle des archets, essentiellement ornemental, distille un regrettable ennui dès l’Introduction. Transparence, finesse, douceur : l’accompagnement tissé par Ars Antiqua Austria ne compense pas cette trame intrinsèquement étiolée. En outre, la monotonie rythmique de maints numéros tend à lasser, dès l’interminable aria Mein Jesus hängt am Kreuzestamm, qui connaît hélas d’autres séquelles (Brennet zarte Liebesflammen). La qualité des chanteurs ici réunis, dont un remarquable Alexandre Baldo, saurait-elle transcender les longuets à-plats de la partition ? Les deux épisodes choraux conviant les jeunes Sängerknaben du lieu manquent d’étoffe, de conviction, quand les interventions solistes des garçonnets véhiculent autant d’émotion que de fragilité technique. On distinguera un éloquent Wann man sieht die Erde zittern attisé par Alois Mühlbacher, au sein de ces deux heures dont l’écoute impatiente souvent. Doit-on taire que le genius loci et le talent des artistes en jeu ne réussissent guère à éveiller l’intérêt pour cette œuvre, dont on se demande si elle gagnait à sortir des oubliettes ?

Christophe Steyne

Son : 8,5 – Livret : 8 – Répertoire : 4 – Interprétation : 7

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