Livre : une autre facette de Stockhausen
Karlheinz Stockhausen: je suis les sons par Ivanka Stoïanova
Ivanka. Ivanka Stoïanova, musicologue et professeur émérite de l’Université Paris 8, nourrissait depuis plusieurs années le désir d’écrire un ouvrage sur celui qui fut l’un des compositeurs les plus importants du XXe siècle : Karlheinz Stockhausen.
Dans une approche différente des biographies traditionnelles, Ivanka Stoïanova combine ici sa proximité avec le compositeur et sa formation de musicologue pour créer un livre intéressant tant du point de vue de l’homme que de celui de l’œuvre. Structuré en trois parties, le livre nous fait pénétrer dans l’intimité du compositeur.
La première partie traite de sa musique. Nous y découvrons en profondeur les processus compositionnels et formels des œuvres de Stockhausen. Parfois très technique, cette partie s’adresse au public désireux de mieux comprendre ou de glaner quelques informations indispensables pour apprécier de manière plus complète la musique du maître allemand. Mais déjà en toile de fond se tisse une image du compositeur, celle d’un homme ouvert à son temps. Celle d’un être spirituel qui, doté d’une curiosité sans limite, explore les différentes philosophies religieuses. En somme une image qui, à l’instar de sa musique, se trouve en constant renouvellement. De la sorte, nous suivons au fil des chapitres ses compositions dites « ponctuelles », ses œuvres à formes ouvertes, sa musique électronique et mixte ainsi que ses œuvres scéniques. Ce dernier point amène d’ailleurs un chapitre intéressant sur la filiation impossible (et réfutée par le compositeur même) entre Stockhausen et Wagner.
Pour la deuxième partie, Stoïanova laisse sa plume aux proches du compositeur pour une quatre témoignages. Les deux premiers sont ceux des femmes de Stockhausen (Doris Andreae Stockhausen et Mary Bauermeister). Si le premier témoignage n’est pas conséquent, celui de Mary Bauermeister s’étend sur plusieurs pages et nous fait découvrir encore une autre facette de l'homme : celle de ses relations avec la gente féminine. Les deux témoignages suivants (Suzanne Stephens et Kathinka Pasveer) sont ceux de deux instrumentistes ayant collaboré avec le compositeur. Nous y découvrons son exigence et son sens de la perfection qui, d’après Suzanne Stephens « dépass[ait] la somme des notes et autres détails (…)».
Enfin la dernière partie est un travail de référencement comprenant des éléments autobiographiques, un catalogue des œuvres, une discographie ainsi qu’une bibliographie sélective.
Nous regrettonbs un peu que les éléments autobiographiques ne se trouvent pas en début d’ouvrage pour permettre au lecteur qui découvre Stockhausen d’acquérir quelques repères biographiques nécessaires qui rendraient plus agréable la lecture de la première partie. Et le catalogue d’œuvre consiste en une liste des œuvres renvoyant pour plus de détails au catalogue complet publié par le Stockhausen-Verlag (www.stockhausen.org).
Un ouvrage intéressant pour approfondir notre connaissance de Stockhausen mais difficile à aborder pour une première approche. Sa conduite rédactionnelle, à l'opposé des biographies traditionnelles, permet de brasser de nombreuses facettes du compositeur et de son œuvre. Elle ravira les amateurs.
Xavier Falques
2014. Edition Beauchesne, Collection l’éducation musicale, 356p., 34 euros