A Genève, un Concerto Köln aseptisé

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Concrto Köln beim Konzert im Herkulessaal München 28. 11. 2009

Pour sa saison 2018-2019, le Service Culturel Migros a décidé d’inviter en alternance les orchestres symphoniques et les formations de chambre. Et c’est dans cette seconde catégorie qu’il faut inscrire le Concerto Köln qui, depuis 1985, s’est spécialisé dans la musique ancienne en ayant la particularité de jouer sans chef et debout pour la plupart (les pauvres !) même si, à l’interne, la conduite artistique est gérée par le bassoniste Lorenzo Alpert. Quatre des violonistes peuvent assurer la fonction de solo ; à Genève, le 26 février, ce fut la violoniste nippone Mayumi Hirasaki qui s’en chargea.

Sous son impulsion, la formation, restreinte à dix-huit musiciens (comportant quatre premiers, quatre seconds violons, deux alti, deux violoncelles, une contrebasse, un luth et les bois), propose d’abord l’un des douze Concerti de l’opus 1 de Pietro Locatelli publiés à Amsterdam en 1721 ; et l’œuvre choisie, le Concerto en sol mineur, révèle une suite de danse dans le style ‘da camera’, imposant une profondeur austère au Largo initial, suivie d’une Allemanda aux traits acérés et d’une Sarabanda impétueuse. Dans un son étriqué manquant singulièrement de souffle expressif, le violon solo dessine de rapides ‘passaggi’ qui entraînent dans leur sillage le Presto et la Gavotta conclusifs. Beaucoup plus émoustillante s’avère ensuite une page de Charles Avison, un musicien écossais du XVIIIe siècle qui a été élève de Francesco Geminiani à Londres et qui a publié en 1744 ses douze Concerti à sept parties d’après des sonates de Domenico Scarlatti. Son Onzième Concerto en sol majeur fait se succéder les mouvements lents et rapides en conférant aux premiers une ampleur de ligne qui contraste singulièrement avec les traits virtuoses extrêmement ardus des seconds. Plus surprenante encore, la brève Sinfonia que Benedetto Marcello élabora en guise d’ouverture pour son ‘azione sacra’ Joaz composée vers 1726-27. Car ici se développe une progression rapide toute en finesse, cédant la place à un moderato que chantent les premiers pupitres du concertino, avant de conclure par une série de ‘volatine’ descendantes frisant le burlesque.

Entre ces diverses pièces intervient en soliste le violoniste Giuliano Carmignola qui s’accommode aisément autant d’un instrument moderne que d’un violon baroque ; et c’est évidemment à ce type d’instrument qu’il recourt pour présenter les trois célèbres concerti de Bach, en commençant par le Double en ré mineur BW 1043 ; dialoguant avec Mayumi Hirasaki, il se charge de la seconde partie en dessinant avec souplesse un Vivace pimpant, un Largo irisé de nuances et un Finale beaucoup trop bousculé pour être précis. Dans les deux Concerti pour violon seul, il profite de l’appui sur les temps forts pour conférer énergie et vitalité aux mouvements rapides, tout en s’émancipant dans les ‘andante’ afin de leur prêter une dimension introspective. En bis, un finale du Double Concerto, bien mieux calibré, respirant une joie primesautière.      

Paul-André Demierre


Genève, Victoria Hall, le 26 février 2019

Crédits photographiques : DR

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