A Genève, un Orchestre du Gürzenich décevant 

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Pour le quatrième concert de sa saison 2022-2023, le Service Culturel Migros invite le Gürzenich Orchester Köln à se produire à Genève, Berne et Lucerne sous la direction de son chef invité, Nicholas Collon. Agé de quarante ans, ce Londonien a été le directeur artistique de l’Orchestre de la Résidence de La Haye jusqu’à 2021, avant de prendre les rênes de l’Orchestre Symphonique de la Radio Finlandaise tout en conservant celles de l’Aurora Orchestra qu’il avait cofondé avec Robin Ticciati à Londres en 2004. La musique contemporaine est, semble-t-il, au cœur de son répertoire puisqu’il a assumé de nombreuses créations dues à des compositeurs de renom tels que Philipp Glass, Unsuk Chin ou Mark-Anthony Turnage. 

Est-il aussi convaincant dans un programme ‘bateau’ Beethoven-Brahms ? L’on doit d’emblée répondre négativement et se demander si, dans une salle exiguë telle que le Victoria Hall de Genève, il faut recourir à une formation démesurée incluant quinze premiers, quinze seconds violons, sept contrebasses et les vents en proportion.

Ainsi, le célèbre Concerto n.5 en mi bémol majeur op.73 de Beethoven mérite bien d’être surnommé L’Empereur, puisqu’il débute en fanfare au pas de charge avec de lourds appuis sur les temps forts. Le soliste, Rudolf Buchbinder, s’y adapte comme il peut en tentant de glisser un peu de lyrisme dans un jeu très articulé qui recherche les contrastes de coloris. L’Adagio un poco mosso se veut plus retenu avec un piano qui ornemente délicatement un discours que le Final bousculera par d’impétueux élans qui brouillent les lignes. Devant l’accueil généreux que lui fait le public genevois, Rudolf Buchbinder lui concède à tempo infernal le Final de la Tempête (17e Sonate en ré mineur op.31 n.2), l’air de ne pas y toucher… 

La seconde partie est consacrée à une œuvre tout aussi rebattue, la Deuxième Symphonie en ré majeur op.73 de Johannes Brahms qui a d’abord belle allure par le magnifique legato des cors amenant le dialogue des cordes graves avec les bois. Mais dès les premiers tutti, le développement sombre dans l’exagération par la véhémence des contrastes dynamiques qui rendront même ronflant l’Adagio non troppo. Par chance, le Scherzo et le Final tamiseront mieux les éclairages.

Bon prince, le public applaudit avec générosité, ce qui incite Nicholas Collon à enchaîner deux bis qui constitueront en fin de compte le point fort de la soirée, une Valse triste de Sibelius, diaphane par ses pianissimi presque imperceptibles et une Cinquième Danse Hongroise de Brahms au brio irrésistible.

Paul-André Demierre

Genève, Victoria Hall, le 28 janvier 2023

Crédits photographiques :  Chris Christodoulou

 



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