Aux Hall’on a l’esprit subtil, avec André Messager
André MESSAGER (1853-1929) : LES P’TITES MICHU. Violette POLCHI, Marie-Blanche ; Anne-Aurore COCHET, Blanche-Marie ; Philippe ESTEPHE, Gaston Rigaud ; Marie LENORMAND, Mme Michu ; Damien BIGOURDAN, M.Michu ; Boris GRAPPPE, Le Général des Ifs ; Artavazd SARGSYAN, Aristide ; Caroline MENG, Mlle Herpin ; Romain DAYEZ, Bagnolet ; Orchestre National des Pays de Loire ; Choeurs d’Angers Nantes Opéra ; Pierre DUMOUSSAUD, dir. Enr. Théâtre Graslin, Nantes les 23 et 24 mai 2018. 2018- 2 CD - CD1 59:25 - CD2 43:30 – Palazzetto Bru Zane Livre-Disque – textes en français et anglais- chanté en français
Il est étonnant de constater à quel point les tragédies et bouleversements de la Révolution française et ici, plus précisément, de la Terreur (où l’intrigue prend sa source) ont inspiré des œuvres. Leur lot de substitutions d’enfants, de disparitions, de survivants ou d’ orphelins … adoptés par un Régiment comme la Fille du même nom ou, ici, les consorts Michu, remplit les recueil de jurisprudence et fournit matière à maints rebondissements dramatiques.
Forcé de fuir la guillotine, le Marquis des Ifs dont la femme vient de mourir en donnant naissance à une fille la confie à Madame Michu qui vient elle aussi d’accoucher d’une fille. Monsieur Michu, après avoir donné un bain aux fillettes, est incapable de les reconnaître au moment des les rhabiller. Dix-sept ans plus tard, lorsque le Marquis des Ifs devenu Général d’Empire se présente flanqué d’un sémillant capitaine, les époux Michu, fromagers aux Halles, ne peuvent distinguer Blanche-Marie et Marie-Blanche qu’ils ont élevées en jumelles et qu’ils chérissent tendrement. En trois actes, sur le livret de Vanloo et Duval, Messager tire un parti ingénieux des oppositions entre verdeur populaire et panache aristocratique, des nombreux quiproquos, de la quête d’identité et d’amour. Un esprit bon-enfant imprègne tout cela. Le compositeur se souvient de ses études chez Niedermeyer pour écrire une prière dépouillée à Saint Nicolas à côté de quadrilles, galops bondissants, musique militaire ou tendre madrigal. Une inspiration mélodique élégante lie dialogues parlés, final d’acte entraînant, rebondissements divers, avec beaucoup de naturel. Le côté parfois clinquant des années Offenbach fait place à une vivacité où rien ne pèse ni ne piège l’émotion. L’instrumentation délicate « chante » avec les personnages tandis que les rythmes et accélérations font rebondir l’intérêt. Ainsi du ravissant duo des deux soeurs à l’Acte II Ah Quel malheur ! soutenu par un orchestre aérien qui commente et relance tout en douceur. Créé le 16 novembre 1897 au Théâtre des Bouffes-Parisiens, l’opérette remporte un succès immédiat. Ici, la Compagnie Les Brigands, l’Orchestre National des Pays de Loire et les Chœurs d’Angers Nantes Opéra sous la baguette de Pierre Dumoussaud en font ressortir toutes les facettes avec une justesse de ton et une verve bien allante. La prise de son aurait pu arrondir quelques sonorités tandis que le livret et la présentation sont fort bien réalisés… sous réserve du classement incongru de l’œuvre dans la catégorie « opéra français » et sous la rubrique générale musique romantique française !
Quoi qu’il en soit, et hors catégories, voici un cocktail de bonne humeur qui, sous son charme et sa légèreté, s’avère plus intéressant à beaucoup d’égards qu’il n’y paraît.
Son 9- Livret 10- Répertoire 10- Interprétation 10
Bénédicte Palaux Simonnet