Beethoven par Andreas Haefliger
Ludwig van Beethoven (1770-1827) : Sonates pour piano, Opus 31. Andreas Haefliger, piano. 2022. 70’28’’. Livret en anglais, allemand et français. BIS Records. BIS2607
Andreas Haefliger n’a plus à prouver qu’il est un fantastique interprète du répertoire de Beethoven. En 2004, il débute « Perspective », une suite de concerts et d’enregistrements mettant en opposition les sonates pour piano de Beethoven avec des œuvres d’autres compositeurs tels que Liszt ou Moussorgski. Le dernier enregistrement de cette série date de 2018 et est sorti sous le label BIS Records. Et c’est à nouveau sous ce label que nous le retrouvons pour, une fois n’est pas coutume, un disque exclusivement consacré à des sonates de Beethoven.
L’opus 31 comporte trois sonates assez différentes, composées entre 1801 et 1802. Cette période de la vie du compositeur est assez sombre. Sa surdité commence à lui peser fortement et 1802 sera d’ailleurs l’année de l’écriture du Testament de Heiligenstadt, lettre jamais envoyée dans laquelle le compositeur, isolé dans la campagne viennoise, déplore son état qu’il veut garder secret et le jugement des autres qui découle de cet isolement.
La première sonate de cet opus contraste avec cette situation par son caractère joueur et espiègle amené par cette succession de syncopes dans le premier mouvement. Andreas Haefliger annonce d’entrée la couleur. Il connaît Beethoven et il sait où il veut aller. Le texte est précis, bien que manquant un peu de clarté dans certains traits fort rapides, et l’échelle des nuances est très étendue. Le pianiste colle à la partition et suit la moindre indication du compositeur, tout en prenant de temps en temps des libertés rythmiques et métronomiques toujours de bon goût. Les deuxième et troisième mouvements confirment l’aisance d’Andreas Haefliger dans ce répertoire dans lequel il peut démontrer tantôt sa virtuosité, tantôt son magnifique phrasé.
La deuxième sonate, est appelée La tempête en référence à la réponse de Beethoven à Schindler qui l’interrogeait sur la signification de la pièce : “Lisez la Tempête de Shakespeare". Le premier mouvement de cette sonate est, pour moi, la plus grande réussite de Haefliger sur ce CD. Le contraste entre la dureté de la mélodie à la main gauche et la douceur de celle à la main droite est magnifiquement interprété. Au vu de ce magnifique premier mouvement, le deuxième paraît un peu moins bien interprété bien qu’il soit d’une grande qualité. Le troisième mouvement, l’un des plus connus des sonates de Beethoven, est joué sans bavures mais malheureusement sans grandes surprises non plus.
Le CD se termine donc avec la sonate No. 18 en mi bémol majeur. Elle est composée de quatre mouvements, fait de plus en plus rares dans les sonates de Beethoven au fil du temps. Elle est très bien interprétée d’un bout à l’autre par Andreas Haefliger, avec une grande précision, et ses grands accords majestueux clôturent parfaitement cet opus.
Son : 8 - Livret : 7 - Répertoire : 9 - Interprétation : 8,5
Alex Quitin