Hommage du Ballet de l’Opéra à Jerome Robbins

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En juin dernier, lors du Festival Les Etés de la Danse, deux compagnies prestigieuses, le New York City Ballet et le Joffrey Ballet de Chicago, avaient rendu hommage à Jerome Robbins à l’occasion du centième anniversaire de sa naissance (11 octobre 1918) et du vingtième anniversaire de sa disparition (29 juillet 1998). Et c’est maintenant le Ballet de l’Opéra de Paris qui fait chorus  en présentant une tétralogie dont le premier volet, Fancy Free, entre ainsi au répertoire de la troupe.

Familier de la compagnie pendant plus de vingt ans, le grand chorégraphe américain est venu lui-même y régler douze de ses ballets entre 1974 et 1996. Le rideau s’ouvre donc sur Fancy Free élaboré sur une musique de Leonard Bernstein, ce qui permet un coup de chapeau au célébrissime chef d’orchestre et compositeur, lui aussi centenaire puisque né à New York le 25 août 1918. Créée au Metropolitan Opera par l’American Ballet Theatre le 18 avril 1944, cette œuvre d’une trentaine de minutes, relatant l’escapade de trois marins en permission à Manhattan, valut un triomphe inattendu aux deux compères qui, en un soir, devinrent célèbres.  Au Palais Garnier, se succèdent, en deux jours, deux distributions avec un impayable François Alu à la technique phénoménale prenant à parti par ses bonds faramineux un Stéphane Bullion, charmeur impénitent et un Karl Paquette aussi dégingandé que son jeune collègue du lendemain, Adrien Couvez. Et les girls du premier soir, Eleonora Abbagnato, Alice Renavand et Aurélie Bellet rivalisent de provocante drôlerie avec leurs consoeurs Eve Grinsztajn, Muriel Zusperreguy et Roxane Stojanow dans un décor suggestif d’Oliver Smith, des costumes de Kermit Love et des lumières de Jennifer Tipton. Et l’Orchestre de l’Opéra National  est placé sous la direction du chef russe Valery Ovsyanikov, précautionneux face à cette partition déroutante.

Mikhail Baryshnikov avait été le premier interprète de A Suite of Dances au New York State Theatre le 3 mars 1994. Et c’est aussi le dernier ballet que Jerome Robbins montera lui-même pour l’Opéra en mars 1996. Basé sur quatre pages extraites des Suites pour violoncelle seul de Bach confiées ici à Sonia Wieder-Atherton, ce bref solo d’une quinzaine de minutes fait intervenir un Paul Marque épousant les contours de la musique dont il ressent la pulsation interne, alors que, le lendemain, Hugo Marchand se voudra d’abord hiératique avant de se laisser emporter par la dynamique contrastée de ces pièces.

En seconde partie, Hugo Marchand apparaît dans Afternoon of A Faun sur la musique de Claude Debussy dans un décor de Jean Rosenthal suggérant une salle de répétitions et des tenues de travail imaginées par Irene Sharaff.  Conçu pour le New York City Ballet en mai 1953, proposé par le Ballet de l’Opéra en octobre 1974, cet ouvrage nous montre un danseur alangui par les effluves sirupeuses de la flûte, rejoint par sa partenaire aérienne Amandine Albisson, tandis que, le jour suivant, Audric Bezard étirera sa longue silhouette pour emporter vers les nuées la délicate Myriam Ould-Braham, comme la statue de La Danse selon Jean-Baptiste Carpeaux.

Et la soirée s’achève par Glass Pieces, utilisant trois pages de Philip Glass extraites de Glassworks de 1981 et d’Akhnaten de 1983. Créé par le New York City Ballet en mai 1983, entré au répertoire parisien en novembre 1991, ce triptyque se déroule devant un espace finement quadrillé conçu par le chorégraphe aidé de Ronald Bates, alors que la troupe revêt des justaucorps multicolores imaginés par Ben Benson. Défilent en s’arrêtant brièvement trente-six danseurs, au milieu desquels se faufileront trois couples arborant le rose orangé, le saumon et le vert tendre. Et lorsque les femmes s’aligneront en fond de scène, un Stéphane Bullion livrera un pas de deux, émouvant comme une incantation, avec Ludmila Pagliero suivie de Laura Hecquet. Sous de vibrantes ovations, le rideau tombe…

Paul-André Demierre

Paris, Palais Garnier, 10 et 11 XI 2018

Crédits photographiques :  Opéra de Paris

 

 

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