Jean-Louis Beaumadier et la flûte piccolo 

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Éminent représentant de la flûte, Jean-Louis Beaumadier est un virtuose du piccolo. Avec cet instrument, il a parcouru le monde, jouant sous la direction des plus grands chefs tout en contribuant salutairement à faire connaître le répertoire pour son instrument. Alors qu’il fait paraître chez Calliope un album intitulé “Viva Piccolo”, il répond à nos questions   

Vous êtes connu pour votre action pour faire connaître la flûte piccolo. Qu’est-ce qui vous a attiré vers cet instrument ? 

Lorsque j'étais jeune, mes grands-parents ont acheté pour moi  une flûte en argent d'occasion à la veuve d'un flûtiste, et en prime cette dame a ajouté un vieux piccolo  ! C’était un instrument en ébène de la marque française  Bonneville. Cet instrument en bois, avait un son merveilleux et j'avais grand plaisir à y jouer les classiques de la flûte, Bach, Telemann ,Mozart, notamment grâce au magnifique registre grave qu'il avait !

Je suis entré à l'Orchestre National de France avec cet instrument, mais j'ai dû rapidement en changer à cause de la justesse de l'orchestre auquel il n'était pas adapté. J'ai pris alors un instrument de la marque américaine Haynes. Ces productions sont directement inspirées par l'ancienne facture française, et j'ai tenté de retrouver le son d'origine de mon premier piccolo, en quelque sorte un son bio ...

 S’il existe une école française de la flûte mondialement réputée, qu’est est-il d’une école française de la flûte piccolo ?  Quelles en seraient les caractéristiques ? 

De nos jours, avec les échanges internationaux, les concours, les Master-classes, les  styles de jeu ont tendance à se standardiser. Cependant, la caractéristique de l'école française demeure la clarté de l'articulation ! Et d'après moi, il en est de même pour le piccolo.

 Votre nouvel album se nomme “Viva Piccolo”. Il semble être une vitrine musicale de toutes les potentialités de la flûte piccolo. Comment l’avez-vous conçu ? Comment avez-vous choisi les œuvres proposées ? 

Cette question nous ramène directement au duo que je forme avec Véronique Poltz. En effet, les choix sont collectifs puisque Véronique a arrangé personnellement plusieurs pièces de l’album. Ces choix sont éminemment musicaux : ce récital dans  sa version concert commence par les classiques, se poursuit par la musique française et se termine par des pièces plus romantiques. Mais nous avons dû nous adapter pour le disque  en commençant  par les romantiques. Nous avons souhaité enregistrer un album qui nous ressemble : à la portée du plus grand nombre, mais riche de puissantes pièces musicales souvent très  émouvantes. Dans la période troublée du monde contemporain, nous souhaitons  offrir un  baume musical divertissant et doux. 

Dans notre époque qui aime catégoriser, les instruments sont souvent limités à des images d’Epinal. On pourrait ainsi dire que la flûte piccolo est un instrument purement virtuose, essentiellement dans les traits d’orchestre. Est-ce que vous devez batailler pour imposer une autre vision de la flûte piccolo ? 

En 1979, j'ai obtenu avec Jean Koerner au piano, le grand prix International de l'Académie Charles Cros pour le disque "La Belle époque du piccolo". C’était un disque également  édité par  Calliope ! Le piccolo était déjà soliste sur les kiosques à Musique au dix-neuvième siècle, avec également des pièces très chantées de différents maîtres aujourd'hui oubliés. J'ai enchaîné avec les baroques, Vivaldi, Telemann...Puis j'ai un jour pensé que mon originalité viendrait en jouant toutes les musiques sur mon piccolo, ma vraie voix . 

 Vous contribuez également à élargir le répertoire de la flûte piccolo avec des commandes à des compositeurs de notre temps. Est-il important d’augmenter le nombre d'œuvres pour votre instrument ? 

C'est toujours très important ! J'ai enregistré plusieurs albums de pièces de compositeurs de notre temps qui ont accepté d'écrire pour moi : Pierre Bartholomée, Régis Campo, Florentine Mulsant, Véronique Poltz, Yoko Kubo, Alain Moëne, Jacques Lenot, Alexandre Ouzounoff, Lucien Guérinel, Jean-Jacques Werner, Jean-Michel Damase, Marcel Frémiot  et j'en passe...

 J’ai lu dans votre biographie que vous avez également joué dans l’Orchestre Saito Kinen au Japon sous la direction de Seiji Ozawa. Comment avez-vous été embarqué dans cette aventure ? 

C'est très simple ! Les anciens élèves de Jean-Pierre Rampal ont entre eux une vraie solidarité ! Mon ami Shigenori Kudo, flûte solo d'Ozawa depuis de très longues années, a eu besoin de recruter un piccolo  pour une certaine période et il a pensé à moi. J'ai eu le plaisir de jouer le solo de la Symphonie n°9 de Beethoven pour les Jeux Olympiques  de Nagano et dans d'autres concerts, au milieu de cet orchestre international ! C'était très enrichissant et très  émouvant. J'ai le souvenir d'Ozawa voyageant au fond du car avec les garçons d'orchestre et descendu aider lorsqu’il avait fallu mettre des chaînes aux pneus  dans la neige... incroyables grandeur et  simplicité .

 Votre discographie est très importante. Est-ce que vous avez déjà en tête de futures réalisations ? 

J’y pense tous les matins en me levant car j'ai un projet en tête et en général j'arrive toujours à le réaliser plus ou moins bien, ainsi il ne reste pas à l'état de rêve ...

Le site internet de Jean-Louis Beaumadier : https://piccolo-beaumadier.com

  • A écouter : 

Viva Piccolo. Oeuvres de : Benjamin Godard / Camille Saint-Saëns / Christoph Willibald Gluck / Fritz Kreisler / Joachim Andersen / Johannes Brahms / Maurice Jaubert / Philippe Gaubert / Théobald Boehm / Wolfgang Amadeus Mozart. Jean-Louis Beaumadier, flûte piccolo ; Véronique Poltz, piano. 1 CD Calliope

Propos recueillis par Pierre-Jean Tribot

Crédits photographiques : DR

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