Le baryton Michaël Volle interprète Brahms : admirable ! 

par

Johannes BRAHMS (1833-1897). Michael VOLLE, baryton ; Karl-Peter KAMMERLANDER, piano (CD1) ; Adrian BAIANU, piano (CD 2), Hartmut VOLLE, narrateur  (CD2), ; Stephanie IRANYI, mezzo-soprano (CD 3) ; Helmut DEUTSCH, piano (CD 3). 2007-DDD- 3 CD- CD 1 55’59- CD 2 78’56- CD 3 62’14- présentation en anglais et allemand- texte et chanté en allemand- BRILLANT CLASSICS 95916

Longtemps Brahms fut assez mal aimé des Francophones (Saint -Saëns allant jusqu’à écrire : « Je serai tant qu’on voudra pour Wagner contre Brahms »!). L’inextricable contexte géopolitique de ces années troublées y est pour beaucoup. Quant aux mélodies, on en a longtemps ignoré l’originalité foncière comme la place qu’elles occupent dans l’œuvre du compositeur. Or l’auteur de Geheimnis (opus 71, 1877) ou Alte Liebe (opus 72 n°1 de 1876) a laissé plus de 200 Lieder, 80 duos ou quatuors vocaux avec piano. C’est dire combien l’art vocal en général et l’art du Lied en particulier accompagnent « intimement » toute la vie du musicien. Ce trésor inépuisable et singulier nous a été peu à peu révélé grâce à nombre d’interprètes tels Dietrich Fischer-Diskau, Hans Hotter, Kathleen Ferrier, Janet Baker et, plus récemment, Anne Sofie von Otter, Matthias Goerne ou Ian Bostridge.

S’imposant chez Bach, Mozart ou Verdi, le baryton Michael Volle qui incarne un superbe Hans Sachs sur scène (entre autres rôles wagnériens), se tourne ici vers des enregistrements réalisés il y a plus d’une dizaine d’années qu’il redécouvre surpris et ravi, pour son bonheur et le nôtre. Car le coffret réalisé par Brillant s’avère aussi riche que beau et rare. Riche par l’abondance, le choix et l’éclectisme du programme : 19 mélodies empruntées à différents opus pour le premier disque comprenant les Vier Ernste Gesänge de l’opus 121 tandis que le deuxième disque inclut les Romances de Maguelonne opus 33 et, le dernier, les Lieder et Duos de l’opus 28 et 22 des 49 deutsche Volkslieder. C’est avec un naturel, une justesse de ton qui n’excluent ni la chaleur ni une fraternelle générosité que le baryton met ses moyens vocaux, sa diction parfaite comme la précision de son émission au service d’un répertoire qu’il semble vivre spontanément « de l’intérieur ». Puissant ou discret, il est rejoint par la voix limpide de Stéphanie Irànyi pour les Duos et Volkslieder. A cette beauté contribue le piano vivant d’Helmut Deutsch qui sait s’adapter à tous les affects, d’un jeu clair, puissant, toujours poétique, passant avec brio de la confidence aux grands éclats brahmsiens. Enfin, les Romances de Maguelonne, habilement insérées au centre, mettent en relief cette forme littéraire assez rare hors de l’Allemagne, inspirée de la Ballade qui mêle narration (confiée à Hartmut Volle) piano et chant. Si bien que toutes ces facettes, se mettant réciproquement en valeur, font ressortir la spécificité de l’art vocal de Brahms au-delà des quelques mélodies (toujours les mêmes) devenues célèbres. Doutant de lui-même : « opus 5 mauvais, opus 6 épouvantable (sic!), opus 7, ridicule... », il demandait à la bien-aimée Clara de lui dire « franchement » ce qu’elle pensait de chaque Lied. Fine mouche, elle sut trouver les mots pour éviter que l’auteur insatisfait ne finisse par jeter ses brouillons au feu. Grâce lui soit rendue ! - Aimez-vous Brahms ? interrogeait Françoise Sagan. Mille fois oui avec Michael Volle qui nous le rend proche, sensible et familier comme une langue natale.

Bénédicte Palaux Simonnet

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 10

 

 

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