Les Dichterliebe vus par deux ténors

par

Robert Schumann (1810-1856) : sélection de lieder et pièces pour piano – Dichterliebe opus 48 ;  Clara Schumann (1819-1896) : sélection de lieder et pièces pour piano ; Julian Prégardien, ténor – Éric le Sage, piano – Sandrine Piau, soprano. 2019-DDD-66’15-Textes de présentation en anglais, français et allemand-Alpha Classics-Alpha 457

Fidèle au texte et à sa vérité historique, Julian Prégardien dévoile sa version « critique » des magnifiques Dichterliebe de Schumann. Entrepris d’abord en 2016 pour être vite annulés suite à la parution de la nouvelle édition critique parue chez Barenreïter, le projet d’enregistrement du duo Prégardien/Le Sage s’offre ici un travail de longue haleine au regard particulièrement bienveillant et curieux.

Si cela peut surprendre lors de la lecture du texte de présentation, les choix esthétiques et les idées « nouvelles » entreprises et restituées par Julian Prégardien n’étonnent plus à l’écoute du disque. C’est un Schumann d’une rare beauté qui se dévoile ici, d’une poésie hors normes et d’une intériorité saisissante. In der nacht (opus 74) capte immédiatement l’auditeur par les voix de Prégardien et Sandrine Piau qui s’épousent et s’entremêlent avec tendresse. Vient ensuite le piano subtil d’Eric le Sage dans une romance de Clara Schumann, un magnifique Blüthner de 1856 restauré par Christophe Kern aux sonorités équilibrées. Julian Prégardien survole chacun de ces lieder en les dépoussiérant par le dramatisme de la ligne et la structure du texte. Rien n’est laissé au hasard, qu’il s’agisse des couleurs, des ambiances ou des dynamiques. Et puis arrivent enfin les Dichterliebe, un moment de grâce. Un cycle relativement court mais d’une rare densité. Il émerge de ce duo une force dramatique qui nous hypnotise par un discours très lisse et judicieusement construit. On ne se lasse à aucun moment des contrastes qui nous saisissent au cœur tant la lecture est limpide et d’une justesse remarquable. Du Schumann de très haut vol.

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 10

Ludwig van Beethoven (1770-1827) : An die ferne Geliebte  ; Hugo Wolf (1860-1903) : Liederstrauss ; Robert Schumann (1810-1856) : Der arme Peter – « Mondnacht » - Dichterliebe opus 48. 2018-DDD-65’22-Textes de présentation en anglais et allemand-Hänssler Classic-HC18025

Autre chanteur, autre vision. Pour accompagner les Dichterliebe, Benjamin Bruns explore d’autres répertoires germaniques avec Beethoven et Wolf. Benjamin Bruns débute l’apprentissage du chant comme alto solo dans le chœur des garçons de la ville d’Hanovre. Très vite, il rejoint l’Académie de musique et théâtre de Hambourg avant d’intégrer le Théâtre de Brême alors toujours étudiant. Son répertoire est large : Belmonte, Tamino, Don Ottavio, Don Ramiro, Loge… Au côté de grandes phalanges orchestrales, il voyage avec facilité dans l’oratorio et le lied. Lauréat de nombreux prix, il partage régulièrement la scène avec Karola Theill qui l’accompagne d’ailleurs ici au piano. 

Son timbre est précis et expressif. Il n’y a rien de trop qui vienne perturber la ligne. Au contraire, il se décèle une certaine décontraction qui permet d’offrir une lecture en toute simplicité. Tant chez Beethoven que chez Wolf, la ligne est présentée avec douceur sans aucune épaisseur ou dureté. Dans les Dichterliebe, actif sans pourtant précipiter les choses, le duo trouve un équilibre idéal et une homogénéité de caractère qui contribuent au dessein dramatique de la pièce. De la poésie avant tout, accompagnée par un piano délicat et attentionné.

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 9

Ayrton Desimpelaere

 

 

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