Lucia di Lammermoor à l'Opéra de Nice

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L'Opéra de Nice continue sa saison avec un autre sommet du belcanto Lucia di Lammermoor de Gaetano Donizetti. 

Après La Sonnambula de Bellini, avec la révélation de l'extraordinaire Sara Blanch,  nous découvrons une Lucia exceptionnelle incarnée par la soprano américaine Kathryn Lewek. Elle se montre époustouflante dans la maîtrise de la ligne de chant autant que dans l'art des vocalises. Sa palette de nuances et ses pianissimi sont produits avec des tons magnifiques. Chaque mot est articulé au maximum. Elle a une technique, une puissance et une subtilité sans faille qu’elle combine avec un jeu scénique bouleversant.

Dans le fameux air de la folie, il y a encore plus de lumières et d'ombres fantomatiques et hallucinatoires dans sa voix. Une pure extase qui s'envole dans un tourbillon vocal. Elle chante comme le faisaient les sopranos d'autrefois. Le reste de la distribution est du plus haut niveau. Le saisissant jeune ténor calabrais Oreste Cosimo campe le rôle de l'amant Edgardo en donnant une leçon de musicalité et de perfection technique. 

 Il a une superbe voix, impeccablement dosée et raffinée, tour à tour virile et tendre. Il est également un excellent acteur, très à l'aise sur scène. Le baryton bulgare Vladimir Stoyanov remplace au pied levé Mario Cassi souffrant. Il a acquis une reconnaissance internationale et se produit sur les principales scènes d'opéra du monde. Il a déjà interprété le rôle d'Enrico au Met à N.Y. et à Berlin et son interprétation est des plus satisfaisantes. Philippe Kahn avec sa voix chaude de basse et son physique imposant est un Raimondo prodigieux.

Les interprètes des seconds rôles sont également parfaits :  le beau timbre du jeune ténor Grégoire Mour dans le rôle de Normanno, la mezzo Karine Ohanyan est une touchante Alisa, le ténor Maurizio Pace est un Arturo incisif.

L'intensité émotionnelle créée par ces brillants protagonistes, qui s'accentue au fur et à mesure du drame, est rendue encore plus forte grâce à l'excellence du Chœur de l'Opéra de Nice mené par Alessandro Zuppardo. 

Co-production avec le Teatro Verdi de Pise, la mise en scène classique, aristocratique et austère de Stefano Vizioli évoque à merveille l'ambiance étrange et mystérieuse de ce drame musical. Il fait une référence picturale avec le tableau de Jean Béraud “La Madeleine dans la maison du pharisien" (Musée d’Orsay) avec Lucia en blanc, et les notables bourgeois autour de la table en noir. 

Les choristes sont habillés dans de superbes costumes mordorés plutôt que dans des kilts écossais. Vizioli n'aime visiblement pas les genoux...

Andriy Yurkevych fait des merveilles à la tête de l'Orchestre Philharmonique de Nice. Il interprète l'opéra dans son intégralité, sans coupures. L'œuvre acquiert ainsi une force particulière. Il faut saluer le merveilleux solo de flûte qui accompagne la scène de la folie, ainsi que les solos de harpe.  Une grande soirée de belcanto qui déchaîne l'enthousiasme du public.

Nice, Opéra, le 17 février 2023

Carlo Schreiber

Crédits photographiques :  D. Jaussein

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