Mahler et Bruckner par Haitink

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Gustav Mahler (1860-1911) : Les symphonies - Das Lied von der Erde - Das Klagende Lied - Lieder Eines Fahrenden Gesellen - Kindertotenlieder - Extraits de Knaben Wunderhorn. Solistes, choeurs, Royal Concertgebouw Orchestra, Bernard Haitink. 1962-1975-Notice en anglais, allemand et français. 1 coffret de 12CD et 1 Blu-ray audio. Référence 483 4643. Anton Bruckner (1824-1896) : Les symphonies - Te Deum. Solistes, choeur. Royal Concertgebouw Orchestra, Bernard Haitink. 1964-972. Notice en anglais, allemand et français. 1 coffret de 10 CD et 2 Blu-Ray Audio. Référence 483 4660.

Alors que le Maestro Bernard Haitink célèbre ses 90 ans, Universal Music réédite, en coffrets de luxe remarsterisés et complétés de deux Blu-ray audio, ses intégrales fondatrices de Mahler et Bruckner enregistrées au pupitre du Concertgebouw d’Amsterdam entre 1962 et 1975 pour Philips.  

Dans les deux cas, ces intégrales sont des piliers de la discographie et cela à plusieurs niveaux historiques, éditoriaux et interprétatifs ! Historiquement, ces gravures restent des pionnières car le chef couvrait toutes les symphonies dans leur intégralité, refusant le côté sélectif des grands anciens comme Willem Mengelberg ou Wilhelm Fürtwangler. Au niveau des symphonies de Mahler, cette intégrale est contemporaine de celles de Leonard Bernstein (CBS), Georg Sollti (Decca) et Rafael Kubelik (DGG), mais tous ces chefs étaient de la génération précédente de celle d’Haitink qui s’imposait alors comme le plus jeune intégraliste mahlérien de son temps. Quant à Bruckner, elle fut menée en même temps que celle d’Eugen Jochum pour DGG, là aussi le saut de génération était important !

L’un des grands intérêts de ces gravures est de restituer le Concertgebouw d’Amsterdam dans son esthétique sonore des années 1960/1970 avec une transition entre les générations d’instrumentistes : ceux qui étaient rentrés à l’époque de Willem Mengelberg cédaient progressivement leur place, emportant avec eux une esthétique sonore plus râpeuse mais ultra-sensible, en particulier chez les cuivres avec un vibrato caractéristique de cette école instrumentale de l’entre-deux-guerres. Le son est aussi plus global et massif qu’aujourd’hui où la pâte des Amstellodamois s’avère beaucoup plus soyeuse et phonogénique que dans ces années 1960/1970.

Au niveau interprétatif, la vision d’Haitink frappe par sa modernité d’alors. Le chef néerlandais impose un Mahler plutôt objectif et moins brassé ou subjectif que les mahlériens historiques Bruno Walter ou Otto Klemperer. Certains, dans les années 1960, pouvaient le trouver trop aseptisé car retranché derrière le respect du texte et la logique narrative, mais avec le temps, la force de la vision d’Haitink s’est naturellement imposée et tous les chefs actuels en sont, à des degrés divers, des disciples. La cohérence de vue entre les symphonies et les cycles de lieder est encore un autre atout de ce coffret qui fait toujours référence. Il n’y a pas de points faibles dans cette somme ! Notons que Decca nous offre deux versions de la Symphonie n°1 : la pionnière de 1962, premier enregistrement mahlérien du chef, et un remake de 1972, mais hélas uniquement disponible dans en Blu-ray audio.       

Du côté de Bruckner, on retrouve cette vision composée d’un respect scrupuleux du texte et d’un sens naturel de la gradation qui porte ses fruits dans les redoutables Symphonies n°5 et n°8 qui restent, malgré une discographie désormais pléthorique, des références incontournables. Le respect d’Haitink envers l’oeuvre du maître de Saint-Florian ressort dans sa volonté, alors visionnaire, d’ajouter au cycle des 9 symphonies, la Symphonie en ré mineur n°0 dite “ Die Nullte” du fait de son reniement par son compositeur ! Si Haitink n’en grava pas la première au disque (à mettre au crédit d’un autre Néerlandais : Henk Spruit avec l'Orchestre philharmonique des Pays-Bas en 1951), notre chef lui donna une visibilité mondiale sans précédent ! Ce souci éditorial se retrouve chez Mahler avec l’une des premières gravures du Klagende Lied.  

On remercie Decca de nous offrir une réédition aussi luxueuse avec, c’est désormais rare chez eux, des notices de présentations passionnantes !

Son 10 – Livret 10 – Répertoire 10 – Interprétation 10

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