Nicola Porpora : anthologie sacrée pour alto, sur les traces de la jeune Anzoletta

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Music for the venetian Ospedaletto. Nicola Antonio Porpora (1686-1768) : Placida surge, Aurora S232 ; Salve Regina S308 ; Qualis avis cui perempta S234. Concerto pour violoncelle en sol majeur. Josè Maria Lo Monaco, mezzo-soprano. Stile Galante, Stefano Aresi. Barbara Altobello, Matilde Tosetti, Rossella Borsoni, Elisa Imbalzano, violon. Krishna Nagaraja, alto. Agnieszka Oszańca, violoncelle. Daniele Rosi, contrebasse. Andrea Friggi, orgue, clavecin. Livret en anglais, français, allemand ; paroles en latin, traduction en anglais. Septembre 2022. 67’36’’. Glossa GCD 923537

Nicola Porpora abordait-il le répertoire sacré avec le même brio que ses airs d’opéra, tel qu’on l’échantillonnera dans ce récital présentant trois œuvres pour alto et orchestre ? Ces pages furent destinées à son élève Angiola Moro, que Porpora appréciait beaucoup, à l’instar de Bartolomea Anzolotti, autre talentueuse orpheline secourue par l'Ospedale dei Derelitti, –une des institutions caritatives de Venise où le compositeur se distingua comme professeur de chant entre 1742 et 1747. Il y affirma ses exigences pédagogiques envers une opportuniste administration retorse à rémunérer son mérite, et il veilla à acclimater en la cité des Doges le style vocal de sa Naples natale. Avant de s’éclipser pour la cour de Dresde.

De cette intense période, dans pareil environnement propice à la création pieuse, datent les motets Qualis avis cui perempta, Placida surge, Aurora et le Salve Regina dont les partitions dressent en creux le portrait de l’habileté vocale de la surnommée Anzoletta : sa tessiture, la cohésion de ses registres, sa maîtrise du souffle, que Josè Maria Lo Monaco a tâche de faire siennes. Dans son précédent album All’amore immenso de novembre 2020 (Glossa), nous succombions à sa prestation limpide et mordorée tout en regrettant une certaine carence de contraste, lissant le relief émotionnel.

Certes quelques étapes sembleront ici encore sous-caractérisées (Ad te suspiramus). Malgré ces édulcorations (le long, haletant Da per te, Virgo Regina, se refusant au brio), on admire ce naturel, cette aisance dénuée d’affectation qui furent peut-être celles de la Figlia di Coro, et qui conservent leur humilité jusque dans la carillonnante chorégraphie de l’Alleluia S232, ou l’essor du Ad te clamamus. Plus parfumé que charnu, distillant un vibrato bien dosé (introduction du Salve Regina), le timbre exhale des saveurs balsamiques qui séduisent sans éblouir, par capillarité. Le discret accompagnement peaufiné par l’équipe de Stile Galante s’avère un écrin parfaitement en phase avec cette attachante interprétation de l’alto sicilienne.

Le programme est complété par le Concerto pour violoncelle défendu par Agnieszka Oszańca. L’archet de la soliste polonaise y domine les enjeux d’expressivité et de virtuosité, sertis dans un tissu instrumental là encore aux petits soins, sous la conduite méticuleuse voire un brin miniaturiste de Stefano Aresi. Réalisé dans le cadre du projet Sound, Space and the Aesthetics of the Sublime hébergé par la Stanford University, « cet enregistrement est le fruit d'une recherche musicologique qui a cherché à mieux comprendre les pratiques d'interprétation fondées sur l'acoustique de l'Ospedaletto » indique la page 2 du livret. Sachant que la salle de musique ne fut construite qu’en 1776, et dans la mesure où les micros de Glossa furent posés dans une chapelle du Séminaire de Brixen (Italie, province de Bolzano), on aurait aimé en apprendre davantage sur cette relation au genius loci.

Christophe Steyne

Son : 8 – Livret : 8 – Répertoire : 8-9 – Interprétation : 8,5

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