Partitions de poche chez Henle de Bach à Schönberg

par

Les éditions Henle continuent d’alimenter leur vaste catalogue d’Urtext avec 4 nouvelles parutions dans leur collection au format de poche. Notons la qualité et la solidité de la couverture et celles du papier qui laissent à penser que ces parutions supporteront usages et annotations. Ces partitions d’étude comportent toujours une introduction trilingue (Allemand, anglais et français) et l’appareil critique bilingue (allemand et anglais). 

Jean-Sebastian Bach (1685-1750) : Concerto pour clavecin n°3 en Ré majeur, BWV 1054. HN 7382. ISMN : 979-0-2018-7382-4

On commence ce parcours avec le Concerto pour clavecin n°3. Les concertos pour clavecin de Bach sont, selon toute vraisemblance, des transcriptions réalisées par Bach lui-même de concertos pour solistes originellement destinés au violon ou à un instrument à vent de la famille des bois : mais rien ne permet de l’entendre le moins du monde. Dans de nombreux cas, nous ne connaissons pas le modèle original, mais il n’en va pas ainsi pour le Concerto en Ré majeur BWV 1054, qui fut composé vers 1738 en tant que transcription du Concerto pour violon en Mi majeur BWV 1042. 

Cette édition Urtext intégrale de Henle qui propose la partition d’orchestre complète est réalisée sous la direction de Norbert Müllemann et Maren Minuth. 

Johannes Brahms (1833-1897) : Triumphlied, Op.55. HN 9030. ISMN 979-0-2018-9030-2

Brahms composa son Triumphlied (Chant triomphal) pour chœur à huit voix, baryton solo et orchestre en réaction directe à la victoire de l’armée allemande lors de la guerre franco-germanique de 1870-1871 et à la fondation du Reich impérial qui en a résulté. Comme pour le Requiem allemand achevé peu avant, Brahms en a compilé lui-même le texte à partir de fragments de la Bible -en l’occurrence le chapitre 19 de l’Apocalypse de Jean. En raison du pathos qui marque quelque peu la composition et du contexte de sa création, empreint de nationalisme, l’œuvre n’a que rarement trouvé le chemin des salles de concerts dans les temps actuels. Au contraire d’ouvrages de circonstance au patriotisme démonstratif comme la Kaisermarsch (Marche impériale) de Richard Wagner, il s’agit, avec le Triumphlied, d’une pièce authentiquement brahmsienne, d’une réelle substance musicale. 

La présente partition d’étude, réalisée sous la direction de Johannes Behr et Ulrich Tadday reprend le texte musical de l’édition intégrale des œuvres de Brahms (HN 6030), garant d’une exactitude scientifique. Une passionnante découverte figure en annexe : une version précoce du premier mouvement, en Ut majeur, inconnue jusqu’alors et découverte à Brême en 2012 seulement.

Claude Debussy (1862-1918) : Danses pour harpe et orchestre à cordes. HN 7584. ISMN : 979-0-2018-7584-2

La composition des deux courtes danses de Debussy doit son existence à une commande de la firme d’instruments Pleyel qui cherchait à développer sa commercialisation d’une harpe chromatique en y intéressant des grands noms. Mais les danses peuvent être également jouées sans problèmes sur la harpe à pédales -laquelle devait s’imposer dans le monde du concert. Le style archaïque, à l’harmonie modalisante, des pièces qui font entendre un rite «sacré» et une danse de joie «profane» renvoie à l’enthousiasme de Debussy -et du monde des arts autour de 1900- pour l’antique.

La présente édition, sous la direction de Peter Jost, est la première édition critique de cette composition, pour laquelle le manuscrit autographe et la première édition ont été soumis à un examen minutieux.

Arnold Schönberg (1874-1951) : Quatuor  à cordes n°2, Op.10. HN 7542. ISMN : 979-0-2018-7542-2

Cette pièce de musique de chambre, composée en 1907–1908, marque une rupture non seulement dans l’œuvre de Schönberg, mais aussi plus largement dans l’histoire moderne de la musique. Le système tonal majeur/mineur qui s’imposait depuis des siècles est, au fil des quatre mouvements, abandonné de manière toujours plus sensible au profit d’une atonalité libre. Cette rupture avec la tradition musico-historique va de pair avec un autre coup porté aux conventions: Schönberg introduit dans les deux derniers mouvements une voix de soprano pour mettre en musique deux poèmes de Stefan George. Avec la transition vers l’atonalité, Schönberg ouvre la voie à un nouveau langage musical, qui aboutira peu de temps après au dodécaphonisme.

La nouvelle édition Henle a été réalisée par Ullrich Scheideler, spécialiste de Schönberg, sur la base des recherches les plus récentes. La partition Urtext Henle présente ce «classique de la modernité» dans une nouvelle gravure.

Pierre-Jean Tribot

Vos commentaires

Vous devriez utiliser le HTML:
<a href="" title=""> <abbr title=""> <acronym title=""> <b> <blockquote cite=""> <cite> <code> <del datetime=""> <em> <i> <q cite=""> <s> <strike> <strong>

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.