Portrait de l’orgue Sauer de la salle de concert « Die Glocke » de Brême : un peu fade

par

Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847) : Prélude et Fugue en mi mineur, Op. 35 no 1. Marco Enrico Bossi (1861-1925) : Thème et Variations, Op 115. Franz Liszt (1811-1886) : Consolation. Johann Sebastian Bach (1685-1750) : Fantaisie et Fugue en sol mineur BWV 542. Jehan Alain (1911-1940) : Deuxième Fantaisie. Maurice Duruflé (1902-1986) : Sicilienne ; Toccata. Joseph Jongen (1873-1953) : Chant de Mai Op. 53 ; Scherzetto Op. 108. Louis Vierne (1870-1937) : Finale de la Symphonie no 6 Op. 59.  Stephan Leuthold, David Schollmeyer, Felix Mende, Lea Suter, orgue Sauer de la salle Die Glocke de Brême. Août 2020. Livret en allemand, anglais. SACD. TT 77’26. MDG 951 2201-6

Située au cœur de Brême près de la cathédrale, « Die Glocke » abrite depuis 1928 deux salles de concert (environ 400 et 1400 places) et un restaurant, dans une architecture intérieure de style art déco. L’orgue date de la même époque, construit par la firme Sauer de Francfort/Oder, épargné par les bombardements. Après plusieurs décennies de déclin, il fut restauré voilà une quinzaine d’années. Pour son premier enregistrement après ces travaux, le label MDG propose ici un récital qui atteste la polyvalence de l’instrument (76 jeux sur quatre claviers et pédalier, traction électro-pneumatique). Nota bene, on relève une coquille dans la nomenclature des jeux page 19 : l’anche de 32’ est un Sordun, et non un Bordun. Avant-guerre, on y jouait même les concertos de Haendel. Les contemporains observèrent déjà les qualités acoustiques du bâtiment, vantées par Herbert von Karajan ou la soprano Margaret Price. Ce disque en laisse un reflet assez pâle, guère à la hauteur de cette réputation.

L’anthologie est distribuée entre quatre interprètes, qui chacun dans le livret présentent les œuvres jouées. Un parcours qui brosse large, tant pour la chronologie que l’esthétique, du Baroque allemand jusque l’école symphonique française. La perspective bien focalisée, la projection précise, les couleurs douces et feutrées engendrent une sonorité mate et cossue. Pourtant, on ne sort pas complètement enthousiaste de ce portrait en musique. L’émouvant diptyque de Bach semble enroué et prosaïque, le galbe néoclassique mendelssohnien paraît éteint. L’interprétation du Thème et Variations, pièce la plus célèbre de Bossi, laisse sur sa faim faute de variété et d’imagination ; on pourra en rester à Daniel Matrone sur son superbe disque chez REM (1997). Le sobre Chant de Mai de Jongen, conçu pour un instrument de concert, convient bien au lieu, tout comme le souple Scherzetto du compositeur belge. Les parfums arabisants de la Fantaisie d’Alain s’en tirent avec subtilité, au prix de parfums artificieux. Plus réussie, la Sicilienne de Duruflé, dessinée avec délicatesse ; en revanche, la Toccata quoique bien enlevée, nécessiterait davantage d’éclat, et une rumeur plus ample et grondeuse. Quant au Finale de la Symphonie de Vierne, on y apprécie une pulsation enjouée mais la maigre réverbération ne génère pas l’envol ni le brio attendus.

Malgré le talent et les efforts des quatre organistes, on déplore globalement qu’aucune pièce ne passe vraiment la rampe, ce qui laisse l’auditeur sur une impression de fadeur et de demi-mesure. D’autant que la restitution SACD, assez plate hélas, ne vient pas combler les audiophiles. On regrette aussi que les registrations ne soient mentionnées dans le livret : dommage pour cerner les ressources de cet orgue qui mérite une valorisation plus avenante.

Son : 7 – Livret : 9 – Répertoire : 8-10 – Interprétation : 7

Christophe Steyne

 

 

 

 

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